C'est tardivement, pendant l'automne 1897, qu'Émile Zola prend position dans l'Affaire Dreyfus aux côtés du parti dreyfusard. Celui-ci tarde à s'organiser, au rythme des révélations de Mathieu Dreyfus et du lieutenant-colonel Picquart, ce dernier étant soigneusement tenu éloigné de la capitale et même du territoire de la métropole par l'État-major et le ministère de la Guerre. Tout s'accélère quant Auguste Scheurer-Kestner, vice-président du Sénat, adhère à la cause révisionniste. C'est ce dernier qui, le 13 novembre 1897, persuade le romancier de l'innocence du capitaine Dreyfus et le presse d'agir. 

L'année précédente déjà, Émile Zola s'était élevé contre les attaques haineuses d'Édouard Drumont contre les Français juifs. En réponse, le Figaro publie le 16 mai 1896 un article au titre provocateur : " Pour les Juifs ". Car cette campagne antisémite de La Libre Parole est pour l'écrivain une " monstruosité ". Oubliées donc, les ambiguïtés de son roman L'Argent à propos de la banque juive rédigé en 1890. Zola s'engage donc, au moment où peu de personnalités ont fait entendre leur voix. La sienne accélérera le dénouement de l'Affaire, lui donnant un retentissement historique et universel.