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A Paris.


L'organisation du plébiscite des 20 et 21 décembre 1851.


par Marc Nadaux

 






Désireux de conserver le pouvoir, Louis-Napoléon Bonaparte rompt avec les pratiques républicaines en organisant le coup d'État. La révision de la constitution organisant les institutions de la Seconde République est un préalable indispensable. Un plébiscite, dont l'annonce est effectuée dès le 2 décembre 1851, doit lui permettre d'acquérir une nouvelle légitimité. Dans son esprit celle-ci doit reposera sur une large adhésion populaire dans le cadre du suffrage universel, rétabli pour l'occasion, suivant la tradition impériale.

Les 20 et 21 décembre 1851, les Français acceptent dans leur grande majorité les réformes du prince-président (7.145.000 "oui" contre 600.000 "non") qui se voit ainsi confier les pouvoirs nécessaires pour établir une nouvelle constitution.








Un plébiscite est annoncé, 2 décembre 1851.
Circulaire du ministère de l'Intérieur aux Maires concernant l'organisation du scrutin, 2 décembre 1851.
Le scrutin aura finalement lieu à bulletins secrets, 4 décembre 1851.
Affiche du ministère de l'Intérieur précisant le sens du bulletin "oui", décembre 1851.



 





Un plébiscite est annoncé,
2 décembre 1851.




Quelques jours après le coup de main contre la Seconde République, les 21 et 22 décembre, un plébiscite est organisé, les Français devant se prononcer sur le fait d'accorder à Louis-Napoléon Bonaparte les pouvoirs nécessaires pour rédiger une nouvelle constitution. Cette consultation, destinée à fonder en droit une dictature de fait, se fera au suffrage universel. L'armée, promise à devenir un des principaux soutiens du régime, y participera. 



DÉCRETS

Concernant la proposition du maintien de l’autorité
 de Louis-Napoléon Bonaparte, et la délégation des pouvoirs
qui lui sont nécessaires pour faire une Constitution, etc.


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS.


LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE,


Considérant que la souveraineté réside dans l’universalité des citoyens et qu’aucune fraction du peuple ne peut s’en attribuer l’exercice ;

Vu les lois et arrêtés qui ont réglé jusqu’à ce jour le mode de l’appel au Peuple, et notamment les décrets des 5 fructidor an III, 24 et 25 frimaire an VIII, l’arrêté du 30 floréal an X, le sénatus-consulte du 28 floréal an XII,


DÉCRÈTE :


ARTICLE 1er . Le Peuple français est solennellement convoqués dans ses comices, le 14 décembre présent du mois, pour accepter ou rejeter le plébiscite suivant :

" Le Peuple français veut le maintien de l’autorité de Louis-Napoléon Bonaparte, et lui délègue les pouvoirs nécessaires pour faire une constitution sur les bases proposées dans sa proclamation ".

ARTICLE 2 . Sont appelés à voter tous les Français âgés de vingt et un ans, jouissant de leurs droits civils et politiques.
   Ils devront justifier, soit de leur inscription sur les listes électorales, en vertu de la loi du 15 mars 1849, soit de l’accomplissement, depuis la formation des listes, des conditions exigées par cette loi.

ARTICLE 3 . A la réception du présent décret, les maires de chaque commune ouvriront deux registres sur papier libre, l’un d’acceptation, l’autre de non acceptation du plébiscite.
   Dans les quarante-huit heures de la réception du présent décret, les juges de paix se transporteront dans les communes de leur canton pour surveiller et assurer l’ouverture et l’établissement de ces registres.
   En cas de refus, d’abstention ou d’absence de la part des maires, les juges de paix délégueront, soit un membre du conseil municipal, soit un notable du pays pour la réception des votes.

ARTICLE 4 . Ces registres demeureront ouvert au secrétariat de toutes les municipalités de France pendant huit jours, depuis huit heures du matin jusqu’à six heures du soir, et ce, à partir du dimanche 14 décembre jusqu’au dimanche suivant 21 décembre.
   Les citoyens consigneront, ou feront consigner, dans le cas où ils ne sauraient pas écrire, leur vote sur l’un de ces registres, avec mention de leur nom et prénom.

ARTICLE 5 . A l’expiration du délai fixé par l’article précédent et dans les vingt-quatre heures au plus tard, le nombre des suffrages exprimés sera constaté ; chaque registre sera clos et transmis par le fonctionnaire dépositaire au sous-préfet qui le fera parvenir immédiatement au préfet du département.
   Le dénombrement des votes, le clôture et la transmission des registres tenus par les maires seront surveillés par les juges de paix.

ARTICLE 6 . Une commission composée de trois conseillers généraux déléguée par le préfet fera aussitôt le recensement de tous les votes exprimés dans le département.
   Le résultat de ce travail sera transmis par la voie la plus rapide au Ministre de l’Intérieur.

ARTICLE 7 . Le recensement général des votes exprimés par le Peuple français aura lieu à Paris au sein d’une commission qui sera institué par un décret ultérieur.
   Le résultat sera promulgué par le pouvoir exécutif.

ARTICLE 8 . Les frais faits et avancés par les administrations centrales et communales et les frais de déplacement des juges de paix pour l’établissement des registres seront acquittés, sur la représentation des quittances ou sur la déclaration des fonctionnaires, par les receveurs de l’enregistrement ou les perceptions des contributions directes.

ARTICLE 9 . Le Ministre de l’Intérieur est chargé d’activer et de régulariser la formation, l’ouverture, la tenue, la clôture et l’envoi des registres.



Fait au Palais de l’Élysée, le 21 décembre 1851,



LOUIS-NAPOLÉON BONAPARTE


Le Ministre de l’Intérieur,
DE MORNY.







AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS.



LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE,



 

DÉCRÈTE :


ARTICLE 1er . Le projet de plébiscite soumis à l’acceptation du Peuple français est également soumis à l’acceptation de l’armée de terre et de mer.

ARTICLE 2 . Chaque régiment, chaque corps de troupe isolé, chaque brigade de gendarmerie voteront dans les vingt-quatre heures de l’envoi, fait au colonel ou au chef de corps, du présent décret.
   Les équipages des vaisseaux en mer voteront dans le même délai.

ARTICLE 3 . A cet effet, deux registres sur papier libre, l’un d’acceptation, l’autre de non acceptation du plébiscite, seront ouverts par les soins des colonels, chefs de corps ou chefs de brigade de gendarmerie.
   Les votes seront consignés de huit heures du matin à quatre heures du soir.
   Ceux qui ne sauront pas écrire feront consigner leur vote.

ARTICLE 4 . Après ce délai, le nombre des votes sera constaté, les registres seront clos, puis transmis directement aux secrétariats des Ministère de la guerre et de la marine.

ARTICLE 5 . Une commission sera instituée par le Ministre de la guerre pour opérer le dépouillement des registres et le recensement des votes.
   Le résultat de ce recensement sera proclamé par le Pouvoir exécutif.

ARTICLE 6 .Les Ministères de la guerre et de la marine sont chargés chacun en ce qui le concerne de l'exécution du présent décret.



 

Fait au Palais de l’Élysée, le 21 décembre 1851,



LOUIS-NAPOLÉON BONAPARTE


Le Ministre de la guerre,
DE SAINT-ARNAUD.








Circulaire du ministère de l'Intérieur aux Maires
concernant l'organisation du scrutin,
2 décembre 1851.



Le comte de Morny, nouveau ministre de l'Intérieur, confie à la responsabilité conjointe du Maire et du juge de paix l'organisation du plébiscite. Suivant le modèle des scrutins du Premier Empire, deux registres permettront d'enregistrer les votes des Français. Ce système, qui ne garantie aucunement le secret du vote, permet ainsi aux notables, qui adhèrent largement dans les campagnes au coup de main parisien et à la personne de Louis-Napoléon Bonaparte, d'influencer leurs concitoyens et au delà d'avoir un droit de regard sur leur opinion.












Le scrutin aura finalement lieu à bulletins secrets,
4 décembre 1851.



Quelques jours plus tard, et devant les bonnes nouvelles qui parviennent au gouvernement de la province, une nouvelle circulaire annonce une modification du mode de scrutin. Celui-ci aura lieu à bulletins secrets, cette procédure devant par ailleurs garantir davantage le secret du vote. Celui-ci s'effectue à l'aide de bulletin manuscrits ou imprimés, seuls ces derniers étant fournis par l'administration... A noter également qu'un grand nombre de bureaux de vote, de mairie donc, sont placés sous la surveillance de l'armée, notamment dans le sud de la France où se sont déroulés les plus violents mouvements d'insurrection en opposition au coup d'État du 2 décembre.













Affiche du ministère de l'Intérieur
précisant le sens du bulletin "oui",
décembre 1851.



Le décret du 2 décembre avait d'abord prévu un vote sur registres, d'acceptation ou de non-acceptation du plébiscite avec mention des noms et prénoms des votants, ces registres étant ouverts dans toutes les mairies du 14 au 21 décembre. Un second décret, daté du 4 décembre, modifie cette procédure de vote, ramenant la consultation dans sa durée à deux journées (les 20 et 21 décembre), sous la forme d'un scrutin secret par "oui" ou "non" au moyen d'un bulletin manuscrit ou imprimé. Mais l'administration préfectorale n'a fait imprimer que des bulletins affirmatifs, tandis que le ministère de l'Intérieur s'empresse d'en rappeler le sens...