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                                                                                Les attentats anarchistes

 

La " propagande par le fait " :
les attentats anarchistes (1892-1894).




La mort de Jules Bonnot,
28 avril 1912.




par Marc Nadaux


 





Ouvrier mécanicien, Jules Bonnot cesse rapidement de travailler régulièrement. Après avoir fabriqué de la fausse monnaie, il se spécialise dans le vol d'automobiles, s'employant ensuite avec l'aide d'un associé à les revendre sous couvert d'un atelier de réparation dans la banlieue parisienne. Bonnot fréquente également les milieux anarchistes d'où proviennent la plupart de ses futurs compagnons de route.

Son trafic est bientôt découvert par la police.
Sur le point d'être arrêté au mois d'octobre 1911, il tue (peut être de manière accidentelle) un anarchiste italien, Sorentino dit Platane au retour de Lyon puis prend la fuite. Dès lors, s'enchaînent les méfaits qui défraient la chronique et font la célébrité de la " bande à Bonnot " : vol d'automobiles et de particuliers, attaques à main armée, assassinats de policiers. 

L'opinion s'effraie et la traque des "bandits tragiques" devient une affaire d'État après une interpellation du ministre de l'Intérieur à la Chambre. Ceux-ci n'hésitent d'ailleurs pas à se jouer des forces de l'ordre en correspondant avec la presse. Enfin les agissements de Jules Bonnot et consorts prennent fin au cours de l'année 1912, l'affaire révèle néanmoins l'utilité des nouveaux moyens d'investigation : l'automobile et la photographie.















Lors du procès d'Émile Henry, le greffier du tribunal, M. Wilmés, rappelle en lisant les deux actes d'accusation les circonstances de son arrestation :


Le 20 décembre dernier, Émile Henry se présenta à la Villa Faucheur, rue des Envierges, et loua une chambre sous le nom de Louis Dubois.
Là, il se procura les substances nécessaires à la fabrication d'engins explosifs, notamment de l'acide picrique, et s'occupa de préparer une bombe.
Dans une petite marmite en métal, dont il supprima l'anse et le bouton qui surmontait le couvercle, il introduisit une enveloppe cylindrique en zinc.
Entre cette enveloppe et les parois évasées de la marmite, il plaça, a-t-il déclaré, cent vingt balles.
Dans le cylindre de zinc, il en disposa un autre sensiblement plus petit, et remplit d'une substance explosive l'intervalle qui les séparait.
Enfin, dans le plus petit, il mit une cartouche de dynamite garnie d'une amorce au fulminate de mercure.
A cette amorce aboutissait une mèche de mineur dont la longueur était calculée de manière à brûler 15 secondes.

Le 12 février, il quitta sa chambre, après avoir prévenu le gardien de la villa qu'il ne rentrerait pas de quelques jours. Il y laissait, selon sa déclaration, trois kilos et demi d'acide picrique. Il emportait sa bombe, à l'exemple de Vaillant, dans la ceinture de son pantalon.
Il était muni d'un revolver chargé dont il avait mâché les balles, afin, dit-il, de faire plus de mal, et d'un poignard dont il avait cherché à empoisonner la lame.
Ainsi armé, il se dirigea vers l'avenue de l'Opéra, jeta un coup d'œil au restaurant Bignon, puis au café Américain, puis au café de la Paix, mais dans aucun de ces établissements il rie trouva un nombre suffisant de victimes, et il continua son chemin.
Au café Terminus, où il arriva vers huit heures et demie, la foule était particulièrement pressée autour d'une estrade où jouait un orchestre.
Il entra, s'assit devant un guéridon placé tout près de la porte et demanda un bock qu'il paya d'avance.
Il s'en fit bientôt servir un second avec un cigare qu'il paya également dès qu'ils lui furent apportés. Il attendait que le public fût encore plus nombreux.
A neuf heures, il approcha son cigare allumé de l'extrémité de la mèche, puis se leva et gagna la porte dont une très petite distance le séparait.
Alors il se retourna et lança la bombe dans la direction de l'orchestre.
L'engin rencontra le lustre électrique, brisa une des tulipes de cristal, et tomba à terre en répandant une fumée épaisse et âcre.
Quelques secondes plus tard, elle éclata avec une détonation sourde, enfonçant le parquet et blessant dix-sept personnes.
L'assassin prit la fuite en criant : " Ah! le misérable, où est-il? "
Il fut aussitôt poursuivi par le garçon Tissier et par deux consommateurs qui l'avaient vu jeter l'engin.
Le gardien de la paix Poisson, qui était de service sur le refuge situé en face du café, s'élança aussi derrière lui.
A l'angle de la rue du Havre et de la rue d'Isly, un employé de la compagnie de l'Ouest, le sieur Etienne, le rejoignit et lui mit la main sur l'épaule en lui disant " Je te tiens, canaille! " - " Pas encore! " répondit l'accusé, qui lui tira un coup de revolver en pleine poitrine.
La balle heureusement s'aplatit sur un bouton et ne pénétra pas, mais Etienne tomba, évanoui.
Le sieur Maurice, coiffeur, le saisit à son tour, un peu plus loin. Un second coup de revolver le jeta à terre, lui faisant une blessure des plus sérieuses.
A ce moment arrivait le gardien de la paix Poisson. L'accusé le visa, mais le manqua et continua sa route. Poisson tira son sabre et reprit la poursuite. Il gagnait du terrain, quand un coup de feu l'atteignit à la . poitrine. Resté debout, il levait le bras pour frapper, mais l'accusé déchargea sur lui les deux derniers coups de son revolver. L'une des balles frappa le côté droit; l'autre se perdit dans le portefeuille de l'agent.
Celui-ci se précipita sur l'accusé et tomba avec lui.
D'autres agents survinrent au moment où Poisson perdait connaissance. Ils s'emparèrent de Henry, qu'ils durent protéger contre la fureur des assistants.

Au cours de l'information, Henry, qui avait d'abord pris le faux nom de Breton, n'a témoigné aucun repentir de cette série d'actes criminels.
Il a, au contraire, exprimé devant une de ses victimes, le sieur Étienne, le regret d'avoir fait usage d'un revolver défectueux, ainsi que d'avoir diminué la force explosive de sa bombe en assujettissant mal le couvercle de la marmite.
L'expert commis par le juge d'instruction a déclaré que l'engin projeté par Henry était " combiné et construit de manière à donner la mort en tombant au milieu d'une foule, et à détruire partiellement l'édifice dans lequel il aurait été lancé.
Comme tous les anarchistes, il affirme avoir agi sous l'empire d'une résolution purement personnelle.