La lettre d'infos


A voir et à lire
sur
19e.org,
et ailleurs.

S'abonner à la lettre d'infos
 

 L'actualité
sur 19e.org

 
 

 A voir sur le Web

     Vous êtes ici :   Accueil   Biographies   G   >   Laurent GOUVION SAINT-CYR              Contact

 

Laurent GOUVION SAINT-CYR 

(Toul, 13 août 1765 - Hyères, 17 mars 1830)


Français.

militaire et homme politique.



par Marc Nadaux


 

     Quelques dates :

1794, n
ommé général de brigade par le Comité de Salut public.
1800,
nommé conseiller d’Etat à la section de la Guerre.
1805,
fait Grand-Aigle de la Légion d'honneur.
1808, en Espagne.
1812, en Russie,
chargé du commandement du Corps bavarois, le VIème Corps de la Grande Armée.
          reçoit son bâton de Maréchal.

1814,
nommé chevalier de Saint-Louis, puis pair de France.
1815, n
ommé ministre de la Guerre.
1818, loi Gouvion Saint-Cyr rétablissant la conscription.



 






Laurent Gouvion naît le 13 août 1765 à Toul, austère ville frontalière sise sur la Moselle. Implantés dans la cité depuis le XVIIème siècle, les Gouvion se sont rapidement élevés dans l’échelle sociale, donnant à Toul quelques uns de ses échevins. Le futur maréchal d’Empire est lui d’extraction plus modeste. Son père est un artisan tanneur. Il a épousé une jeune fille âgée de quinze ans, qui le quitte alors que l’aîné de ses trois fils, Laurent, n’est âgé que de trois ans. Le divorce sera prononcé en 1795, Jean-Baptiste Gouvion se remariant neuf années plus tard.

Celui-ci se heurte à son fils, en qui il espère un successeur à la tête de l’atelier familial. L’adolescent lui a une âme d’artiste. Il suit en « auditeur libre » les cours de l’école d’artillerie de Toul. L’abbé Sirjean, qui contribue à son éducation, le présente bientôt à un professeur de dessin, dénommé Houot. Mais Laurent Gouvion choisit l’aventure. A dix-huit ans, il quitte Toul, gagne Paris, puis Rome, un voyage initiatique pour le jeune homme. A son retour, quelques années plus tard et fort d’une nouvelle expérience, il enseigne quatre années durant son art au collège de Toul, avant de regagner la capitale. Là, Gouvion entre dans l’atelier de Brenet, un ancien élève de Boucher.

C’est alors que la Révolution éclate. A vingt-huit ans, devenu garde national, il s’enrôle au mois de septembre 1792 dans le 1er bataillon de chasseurs républicains. Celui qui se fera désormais appeler Gouvion Saint-Cyr – un nom que sa mère a porté – se porte ainsi volontaire pour défendre la République qui vient d’être proclamée. La « Patrie est en danger » et l’ennemi bientôt aux portes de Paris. Après Valmy, auprès de l’armée de Moselle devant Mayence à la mi-novembre, il se fait remarquer de ses supérieurs et devient adjoint à l’adjudant général du Génie Gay de Vernon.



Le 11 septembre 1793, ce poste est attribué à Gouvion Saint-Cyr par la Convention, alors que les troupes françaises viennent d’évacuer la Belgique. Il reprend peu après le camp de Nothweiler aux Autrichiens et est nommé adjudant chef de brigade par le nouveau général en chef, Hoche. L’offensive est en effet un succès puisque au cours de l’hiver l’ennemi est contraint de se replier au delà du Rhin. Nommé général de brigade par le Comité de Salut public, le 10 juin 1794, puis général de division, le 2 septembre suivant, il s’emploie alors avec ses troupes à assiéger Mayence.

De retour à Toul au début de l’année suivant, l’officier se marie à sa cousine germaine, Anne Gouvion, le 26 février 1795. De nouveau sur le front de l’Est, après les revers de l’armée de Rhin-et-Moselle commandée par le général Pichegru, Gouvion Saint-Cyr reprend l’offensive et s’empare de Homburg et Landstuhl. L‘armistice est signé peu après, le 21 décembre 1795. Celui-ci est de courte durée. L’année suivante, alors que Moreau a succédé à Pichegru, le Directoire ordonne une offensive générale aux frontières de l’Est. Malgré les succès de l’armée de Rhin-et-Moselle et son avancée en Bavière, celle-ci doit se replier au delà du Rhin. L’armée de Sambre-et-Meuse, commandée par Jourdan, vient en effet d’être défaite, avant que la jonction d’avec les troupes commandées par Moreau ait été effectuée. La retraite s’annonce dangereuse et n’est permise que grâce à la victoire de Gouvion Saint-Cyr à Biberach, le 2 octobre 1796.

A la tête l’année suivante de l’armée du Rhin, après la mort de Hoche, il reçoit le 8 mars 1798 le commandement provisoire de l’Armée de Rome. Celle-ci venait de contraindre à la fuite son général, Masséna, qui pillait la ville occupée à son profit. Gouvion Saint-Cyr parvient à ramener la discipline parmi les officiers, avant d’être rappelé à Paris, le 26 juillet. Aux cotés de Jourdan, il participe avec l’armée du Danube à une offensive face aux Autrichiens au cours du printemps suivant, avant de demander à être envoyé en Italie, après avoir appris la venue de Masséna. Dans la péninsule la situation s’aggravait, le Milanais avait été évacué et il fallait à présent défendre Gènes et le littoral. Sous le commandement de Joubert, il participe alors à la bataille de Novi, le 15 août 1799, face aux forces russes et autrichiennes et assure la retraite des Français, mal engagés dans la lutte. Toujours en Italie, Gouvion Saint-Cyr, qui n’a jamais caché son attachement à la République, apprend quelques semaines plus tard, non sans réticences, le coup d’Etat du 18 Brumaire et la prise du pouvoir par Bonaparte.

Apprenant les victoires de Gouvion Saint-Cyr sur les Autrichiens, contraints de se replier dans l’arrière-pays, le Premier Consul lui décerne le brevet de premier lieutenant de l’Armée et un sabre d’honneur. Sur la demande du général Moreau, il est affecté à l’Armée d’Allemagne et prend le commandement d’un corps d’armée, le 13 avril 1800. Ayant pris l’initiative de l’offensive, Gouvion Saint-Cyr est de nouveau vainqueur à Biberach face aux Autrichiens, le 8 mai suivant. En désaccord avec Moreau, le général victorieux demande un congé, qui lui est accordé, et quitte définitivement l’armée du Rhin, le 5 juin 1800. A Paris, Bonaparte, qui n’apprécie guère Moreau, le nomme conseiller d’Etat à la section de la Guerre, dès le 20 septembre suivant. C’est aux Tuileries où siège le Conseil d’Etat, que l’officier général fait la connaissance du monde de la législation, découvrant également la prodigieuse capacité de travail du futur Empereur. Les séances du Conseil, animées par Bonaparte, sont en effet interminables.



Quatre mois plus tard cependant, le 9 février 1801, alors que la paix est signé avec l’Autriche à Lunéville, Gouvion Saint-Cyr est chargé d’une mission diplomatique en Espagne. Il s’agit alors d’interdire l’accès des cotes portugaises à l’Angleterre, toujours en guerre contre la France. Peu après la conclusion d’une alliance militaire, les troupes françaises et espagnoles pénètrent au-delà de la frontière. Cette nouvelle campagne est de courte durée, mais les tractations diplomatiques qui ne manquent pas de prendre la suite et auxquelles il se trouve mêlé aux cotés de Lucien Bonaparte, ne plaisent guère à Gouvion Saint-Cyr. De retour à Paris, il est immédiatement envoyé en Italie, avec le titre de Lieutenant général, et placé sous les ordres de Murat, général en chef. En cette année 1803, les Français réoccupent les Etats napolitains, l’Angleterre n’ayant pas respecté les engagements pris lors du traité d’Amiens, autrement dit l’évacuation de l’île de Malte.

A Paris, Bonaparte est sacré Empereur, le 18 mai 1804. Anticipant l’événement, les différents corps d’armée rédigent auparavant des adresses à destination du Premier Consul le pressant de se faire sacrer, ce que refuse Gouvion Saint-Cyr aux troupes directement placés sous ses ordres. Selon lui, l’armée n’a pas à s’immiscer au cœur de la chose politique. Lui déplait également l’évolution autoritaire du régime républicain. Peu de temps après, la sanction tombe. Gouvion Saint-Cyr est nommé Colonel-général des Cuirassiers, et non Maréchal comme ses pairs, Lannes, Ney, Soult… Il est tout de même fait Grand-Aigle de la Légion d'honneur, le2 février 1805. L'officier passera trois années dans le royaume de Naples, à la tête duquel l’Empereur place son frère Joseph, devenu roi, avant de revenir en France au mois d’août 1807 afin de prendre le commandement du camp de Boulogne. Avec le départ de la Grande Armée vers l’Est, 30.000 hommes formant le Ier Corps de réserve font ainsi face à l’Angleterre.

Au printemps 1808, Gouvion Saint-Cyr reçoit de Napoléon Ier une dotation en Westphalie et un titre de Comte, le souverain pourvoyant ainsi la nouvelle noblesse d’Empire. Avec le soulèvement général en Espagne, ses talents militaires sont de nouveau mis à contribution. Le 17 août, il reçoit l’ordre de former à Perpignan le VIIème Corps de la Grande Armée, qui doit ensuite gagner la Catalogne voisine. Malgré le dénuement de ses troupes, Gouvion Saint-Cyr parvient à prendre le fort de Roses, le 4 décembre 1808, puis Barcelone. Devant la résistance de Girone cependant, le général encourt une fois de plus la disgrâce de l’Empereur des Français et donc l’éloignement des champs de bataille. Replié dans sa propriété de Reverseaux, en Beauce, il sera rappelé, enfin, le 14 avril 1811, après dix-huit mois d’un exil douloureux.

Le 22 juin 1812, la France a de nouveau déclaré la Russie et Gouvion-Saint-Cyr est chargé du commandement du Corps bavarois, le VIème Corps de la Grande Armée. Pénétrant toujours plus avant à l’Est, il est vainqueur de Wittgenstein à Polotsk, le 7 août 1812. Quelques temps plus tard, le 27 août, Napoléon lui donne enfin le bâton de maréchal. S’il souffre comme ses hommes du froid et de la faim pendant la terrible retraite de Russie, Gouvion-Saint-Cyr est aussi atteint par le typhus en arrivant sur le Rhin. Aussi, au mois de mars 1813, affaibli par la maladie, le maréchal d’Empire rentre à Paris, auprès de son épouse. Entre temps, la situation à l’Est du Rhin s’est dégradée. Remis, le maréchal est appelé auprès de Napoléon Ier, qui lui confie le XIVème Corps, composé de jeunes recrus et désigné pour couvrir la ville de Dresde et, au delà, les frontières de Bohème. Il participe à la bataille de Dresde des 26 et 27 août 1813, avant de défendre la ville. A court de vivres et de munitions, Gouvion-Saint-Cyr capitule le 11 novembre. A présent prisonnier de l’ennemi, le maréchal est détenu à Carlsbad jusqu’en juin 1814, moment du retour sur le trône de France du roi Louis XVIII.



Le nouveau souverain, qui cherche à se concilier les anciennes gloires de la République et de l’Empire, a couvert de ses faveurs le maréchal de Gouvion-Saint-Cyr. Avant que ce dernier ait franchi le Rhin, il est nommé chevalier de Saint-Louis, le 2 juin, pair de France le 4 ! Retiré sur ses terres, le maréchal conseille au roi de « laisser à l’armée son drapeau ». Le 7 mars 1815, il reçoit l’ordre de se rendre à Lyon : l’Empereur est de retour de l’île d’Elbe. A Orléans, Gouvion-Saint-Cyr, qui en homme d’ordre s’est rallié à la monarchie, fait porter la cocarde blanche à ses troupes. Celles-ci se révoltent bientôt et le contraignent à se réfugier dans sa propriété de Reverseaux. Napoléon absout son ancien lieutenant, qui ne jouera plus aucun  rôle pendant les Cent Jours. Après Waterloo et l’abdication définitive de l’Aigle, le maréchal est aux cotés du roi, qui fait de nouveau son entrée dans Paris occupé par les Alliés, le 8 juillet 1815. Nommé ministre de la Guerre dans le cabinet dirigé par Talleyrand, Gouvion-Saint-Cyr signe l’ordre de donner Napoléon aux Anglais… avant de mettre en place, la mort dans l’âme, le licenciement de l’armée prévue par l’ordonnance royale du 16 juillet 1815 et ordonnée par les Alliés. Rappelé, cette fois-ci au ministère des Colonies sous le gouvernement de Richelieu au mois de juin 1817, c’est après ce court intermède qu’il entreprend la réorganisation de l’armée, une fois revenu à la Guerre.

Dans le domaine militaire également la Restauration se veut être un retour à l'ordre ancien. Ainsi, l'article 12 de la Charte de 1814 précise que " la conscription est abolie". Les Bourbons tirent par là même un trait sur un des legs de la Révolution, celui du soldat-citoyen. Trois années cependant suffiront pour que l'on revienne sur cette mesure, appréciée pourtant des populations. Il revient en effet au maréchal Gouvion Saint-Cyr de rédiger une nouvelle loi organisant le recrutement de l'armée. Celle-ci est promulguée le 10 mars 1818, une date ô combien importante pour les générations de jeunes gens qui vont se succéder dans le siècle sous l'uniforme. Car s'il est conscient de la supériorité d'une armée de métier, de soldats vétérans rompus aux maniements des armes et autres manœuvres de campagne - " L'Armée se recrute par des engagements volontaires ", affirme l'article 1er de la présente - , Gouvion Saint-Cyr rétablit bel et bien la conscription.

Le système est basé sur le principe de l'égalité, l'égalité de tous devant la chance. Car chaque jeune gens tire au sort. Un bon numéro décide de l'exemption, tandis qu'un mauvais numéro signifie que le jeune homme en question, à moins de justifier d'une situation particulière, doit effectuer un service militaire de six années. La loi cependant envisage un éventuel remplacement, une procédure instituée et codifiée, une possibilité fréquemment utilisée par les fils de famille. Car la loi fixe à 240.000 hommes le contingent nécessaire, soit moins de 40.000 jeunes Français appelés chaque année par ordonnance royale. Compte-tenu des engagements volontaires en effet, du budget attribué aux armée également, point n'est besoin de recruter toute une classe d'âge. D'ailleurs le futur conscrit doit bien souvent attendre que l'on fasse appel à lui. Soumis pendant ce délai à un statut particulier, il ne peut se marier et doit rester disponible. Ceci est une source de perpétuelle récrimination.



Fatigué par de longs mois d’intense activité au ministère, à défendre son budget, de nouvelles lois, de nouvelles institutions, Gouvion Saint-Cyr quitte Paris et la rue Saint Dominique et part prendre les eaux à Néris-les Bains, dans l’Allier, à la mi-juin 1819, offrant même pendant l’été sa démission au roi Louis XVIII, qui la refuse. Son départ du ministère arrivera pourtant quelques mois plus tard, le 19 novembre, avec la chute du cabinet Richelieu. Retiré dans sa propriété de Reverseaux, acheté en 1807, il s’attache désormais à faire valoir ses terres, plus d’un millier d’hectares réunis au cours des deux décennies passées et mis en culture. Le maréchal s’occupe également de son fils, prénommé Laurent, âgé à présent de six ans.

Comme nombre d’anciens dignitaires de l’Empire, le maréchal se met à écrire ses mémoires. Dès 1821, il publie son Journal des opérations de l’armée de Catalogne en 1818 et 1819. Celui-ci est suivi des Mémoires sur les campagnes des armées du Rhin et de Moselle de 1792 jusqu’à la paix de Campo Formio, éditées en 1829. Quand aux quatre volumes de ses Mémoires pour servir à l’histoire militaire sous le Directoire, le Consulat et l’Empire, qui paraissent en 1831, ils demeureront inachevés. Le 17 mars 1830 en effet, le maréchal Laurent Gouvion Saint-Cyr décède à Hyères, dans le Var, des suites « d’une attaque d’apoplexie », survenue quelques jours auparavant. Des funérailles nationales sont célébrées en son honneur et après une cérémonie funèbre en l’Hotel royal des Invalides, il est enterré au cimetière du Père Lachaise.