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                                                   Léon Gambetta, le " Discours de Grenoble ", 1872

 

Idées.



Léon Gambetta, le " Discours de Grenoble ",
26 septembre 1872.




par Marc Nadaux


 





Si la République, troisième du nom est proclamée en 1870, son installation demeure conditionnée par l'adhésion du personnel politique en place. Hors, celui-ci, pour ce qui est de l'Assemblée nationale notamment, à l'issue des élections législatives, est à majorité monarchiste. En 1872, pourtant, Adolphe Thiers, le " chef du Pouvoir Exécutif de la République Française ", se rallie officiellement à la République.

Au cours de ces année, Léon Gambetta apparaît comme le véritable " commis voyageur " du nouveau régime. Car tel est le surnom qu’on lui décerne. Parcourant les provinces françaises, prononçant de très nombreux discours (onze volumes seront publiés à partir de 1881), le député comprend rapidement la nécessité de gagner les masses rurales à sa cause, en donnant de la " gueuse " une image rassurante d’ordre et de stabilité.

A Grenoble, le 26 septembre 1872, l’orateur proclame ainsi l’avènement de ces " couches nouvelles ", ces classes moyennes appelées à jouer désormais un rôle politique.








Léon Gambetta, le " Discours de Grenoble ",
26 septembre 1872.



LÉON GAMBETTA,
candidat radical.


Cahier de mes électeurs.


Citoyens,

 

Au nom du suffrage universel, base de toute organisation politique et sociale, nous donnons mandat à notre député d'affirmer les principes de la démocratie radicale et de revendiquer énergiquement :

L'application la plus radicale du suffrage universel tant pour l'élection des Maires et Conseillers municipaux, sans distinction de localité, que pour l'élection des députés ;

La répartition des circonscriptions effectuée sur le nombre réel des électeurs de droit et non sur le nombre des électeurs inscrits ;

La liberté individuelle désormais placée sous l'égide des lois, et non soumise au bon plaisir et à l'arbitraire administratif ;

L'abrogation de la loi de sûreté générale ;

La suppression de l'article 75 de la Constitution de l'an VIII, et la responsabilité directe de tous les fonctionnaires ;

Les délits politiques de tout ordre déférés au jury ;

La liberté de la presse dans toute sa plénitude, débarrassée du timbre et du cautionnement ;

La suppression des brevets d'imprimerie et de librairie ; La liberté de réunion sans entraves et sans pièges, avec la faculté de discuter toute matière religieuse, philosophique, politique et sociale ;

L'abrogation de l'article 291 du Code pénal ;

La liberté d'association pleine et entière ;

La suppression du budget des Cultes et la séparation des Églises et de l'État ;

L'instruction primaire laïque, gratuite et obligatoire avec concours entre les intelligences d'élite pour l'admission aux cours supérieurs, également gratuits ;

La suppression des octrois, la suppression des gros traitements et des cumuls, et la modification de notre système d'impôts ;

La nomination de tous les fonctionnaires publics par l'élection ;

La suppression des armées permanentes, cause de ruine pour les finances et les affaires de la nation, source de haine entre les peuples et de défiance à l'intérieur ;

L'abolition des privilèges et monopoles, que nous définissons par ces mots : Primes à l'oisiveté ;

Les réformes économiques, qui touchent au problème social dont la solution, quoique subordonnée à la transformation politique, doit être constamment étudiée et recherchée au nom du principe de Justice et d'Égalité sociale. Ce principe, généralisé et appliqué, peut seul, en effet, faire disparaître l'antagonisme social et réaliser complètement notre formule

 

LIBERTÉ, ÉGALITÉ, FRATERNITÉ


Le Comité électoral de Belleville.


Le Président
Cartigny

Le Secrétaire
A. Tourneur


Léon Gambetta.