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La mort de Napoléon III |
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La mort de Napoléon III,
Le Figaro,
11 janvier 1873.
par Marc Nadaux
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Après la capitulation de Sedan face aux
armées allemandes puis la proclamation de la République, Napoléon III
est emmené en captivité en Allemagne le 5 septembre 1870. Il demeure
ainsi au château de Wilhelmshohe, près de Kassel, jusqu'en mars
1871. Commence alors son exil en Angleterre. L'Empereur déchu décède
quelques mois plus tard, le 9 janvier 1873, dans sa résidence de Camden
Place à Chislehurst dans le Kent. |
Nous avons reçu hier matin et hier dans la journée des dépêches
qui, quoi qu'on en dit ailleurs, faisaient pressentir l'événement dont
la confirmation se trouve dans le télégramme suivant que nous adresse
celui de nos collaborateurs que nous avons envoyé à Chislehurst.
Cette dépêche, datée de Londres, jeudi, 5 heures 50
minutes du soir, s'exprime ainsi :
" La nuit avait été assez bonne pour qu'on jugeât
qu'il n'était plus nécessaire de donner suite à une consultation qui
avait été projetée.
Les médecins avaient tout espoir qu'une troisième opération
pourrait être faite aujourd'hui à midi.
Ce matin, le pouls était régulier à 80 pulsations. Depuis
la veille, le malade était sous l'influence d'un narcotique et n'éprouvait
aucune souffrance ; mais il avait à peine sa connaissance.
A dix heures, le docteur Thompson s'aperçut que le pouls
faiblissait rapidement. Quelques gouttes d'eau-de-vie administrées au
malade le ranimèrent pour un instant ; puis une nouvelle faiblesse se
manifesta.
A dix heures quarante-cinq minutes, l'empereur Napoléon
poussa deux soupirs et expira, ayant auprès de lui l'Impératrice, les médecins,
MM. le comte Davillier-Regnault, de Saint-Jean d'Angely, le duc de Basane
et Clary.
Avant d'expirer, l'Empereur parut reconnaître l'Impératrice,
au moment où il embrassa à deux reprises le prince impérial qui venait
d'arriver de Woolwich.
Trois quart d'heure après l'événement, des télégrammes
furent expédiés au prince Napoléon, à M. Rouher, au général Fleury.
Rien n'a été décidé quant à l'embaumement du corps,
avant l'arrivée de la reine Victoria qui, à une heure de l'après-midi,
a envoyé une dépêche à l'Impératrice, et ce soir mettra un de ses
aides de camp à sa disposition.
C'est M. l'abbé Godard, curé de Chislehurst, qui a
administré le mourant à 10 heures 30 minutes.
Le corps de l'Empereur est gardé par l'abbé Godard et deux
sœurs de charité.
On ne reçoit absolument personne dans la demeure du défunt.
J'ai pu être admis cependant avec M. le comte de La
Chapelle.
Au moment où je quitte Chislehurst, la duchesse de Cambridge
arrive et est immédiatement reçue par l'Impératrice.
Les aides de camp veilleront à tour de rôle le corps du défunt
Empereur."
Nous laisserons la politique absolument de côté pour juger
cet événement, considérable en lui-même, à quelque point de vue qu'on
se place.
Napoléon III a gouverné la France pendant vingt-deux ans,
et a été acclamé trois fois par elle ; nous ne pouvons l'oublier.
Nous rougirions d'être obligés de rappeler que,
depuis la chute de l'Empire, pas une amère critique n'est sortie de notre
plume contre un régime que nous avons soutenu dans ses principes
conservateurs contre l'armée des conspirateurs, et que dont nous avons déploré
les fautes qui nous ont conduits au bord de l'abîme où d'autres nous ont
précipités.
Nous ne pouvons aujourd'hui, devant cette mort, avoir
d'autres sentiments que ceux commandés par de hautes convenances.
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