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                                                                                Bonapartistes et Charbonnerie

 

Bonapartistes et Charbonnerie,
les Bourbons sont contestés.



L'agitation bonapartiste à Lyon :
arrêt de justice de la cour prévôtale du Rhône,
7 août 1817.


par Marc Nadaux







Avec le retour au pouvoir des Bourbons, la Terreur blanche s'exerce à l'égard des bonapartistes et des cadres de l'ancien régime honni, notamment dans la vallée du Rhône. Certains émigrent en Europe ou aux États-Unis. Cependant, l'attachement à l'Empire demeure dans les campagnes, mais aussi dans les villes chez une fraction de la bourgeoisie La légende napoléonienne se construit alors autour des vétérans de l'armée impériale. Le bonapartisme cependant, s'il est toujours vivace, ne peut s'exprimer publiquement.

Les militants fêtent ainsi clandestinement le 15 août, jour anniversaire de Napoléon, et se retrouvent dans des sociétés secrètes, dans les loges franc-maçonniques, que la Police du Roi n'a aucun mal à infiltrer. Certains d'entre-eux se distinguent en cultivant le goût du complot, en fomentant des insurrections. A Lyon notamment, soit à proximité de la frontière italienne, l'année 1817 est marquée par l'agitation bonapartiste.








ARRÊT DE LA COUR PRÉVÔTALE DU RHÔNE

Du 7 Août 1817



Par arrêt de la Cour Prévôtale du Rhône, séant à Lyon, rendu par contumace, le 7 Août 1817,


Les nommés Jean-Baptiste Cœur, soldat retraité ; Bertholat, ancien militaire, et Bouvier, dragon retraité natif de Lyon, domiciliés à Saint-Genis-Laval ; Roch Reymond, officier retraité, domicilié à Brignais ; Jean Vernay, cordonnier et ex-garde champêtre, domicilié à Irigny ; Claude Garlon, ancien militaire, domicilié à Civrieux ; Gaspard Fantet, propriétaire et Maire de Millery pendant l'interrègne ; Mathieu Baronnier, aussi propriétaire et adjoint du Maire de Millery à la meme époque, et Thibaudier fils, ex-gendarme, domicilié à Millery ; Antoine-Marie Lepin père, épicier, de Bully ; Jean-Marie Chermet, de Savigny, ancien officier des partisans ; Dyonnet, chapelier à l'Arbresle ; Henri Riboulet, propriétaire, et Pierre-Marie Brancial, aussi propriétaire, domiciliés à St-Germain-sur-l'Arbresle ; Aimé Barret, ancien militaire, demeurant à St-Andéol et maire pendant les cent jours de l'interrègne ; et enfin le nommé Vernet, domicilié à Lyon, au bout de la rue Ferrandiére, n° 20, ancien officier, et en dernier lieu agent de commerce, tous contumax ;

Convaincus d'avoir été les agents directs de l'attentat qui a été commis le 8 Juin dernier dans le département du Rhône, dont le but était de détruire ou de changer le Gouvernement, d'exciter les Français à s'armer contre l'Autorité royale, et de porter la dévastation, le massacre et le pillage dans les lieux où l'insurrection éclaterait, avec les circonstances,

1. Contre Cœur, Bouvier et Bertholat : qu'ils ont été du nombre des chefs de la bande armée levée et organisée à St-Genis-Laval dans la soirée du 8 Juin dernier, et qui, réunie aux bandes de Brignais et d'Irigny, devait se diriger sur Lyon ; qu'ils se sont introduits dans la caserne de la gendarmerie, et y ont enlevé des armes et deux chevaux ; qu'ils ont tiré un coup de pistolet sur le brigadier de la gendarmerie, dont il a été atteint à l'épine du dos.

2. Contre Roch Reymond : qu'il a été chef de la bande armée qu'il a levée à Brignais le 8 Juin, pour se porter à Lyon avec les bandes d'Irigny et de St-Genis-Laval ; qu'il a résisté à l'Autorité avec violence et menaces, et qu'il s'est fait délivrer du vin et des subsistances pour les bandes de Brignais et de St-Genis-Laval, au moment où elles étaient réunies à Brignais.

3. Contre Jean Vernay : qu'il a été chef de la bande armée d'Irigny, laquelle se rendit à St -Genis-Laval pour se réunir aux bandes de Brignais et de St-Genis-Laval ; qu'il a arrêté et emmené de force, et avec violence, Monsieur le Curé d'Irigny, à la tête de sa bande et entre deux fusiliers ; qu'il a retenu ce digne pasteur en charte privée, à St-Genis-Laval et qu'il a tiré un coup de pistolet sur le gendarme Guinand, dont il a été blessé, et qui est mort par suite de sa blessure.

4. Contre Claude Garlon : qu'il a été chef de la bande armée qu'il a levée et organisée à Charnay le 8 Juin ; qu'il a fait désarmer et maltraiter le garde-champêtre de la commune de Charnay qui s'opposait à ses desseins ; qu'il a fait enfoncer la porte du domicile de ce garde, et l'a livré au pillage ; qu'il a fait arrêter le maire de Charnay, qu'il l'a retenu prisonnier et emmené de force à la suite de sa bande.

5. Contre Gaspard Fantet et Mathieu Baronnier : qu'ils ont été chefs de la bande armée qui s'est formée à Millery dans la nuit du 8 au 9 Juin ; qu'ils ont voulu se faire reconnaître maire et adjoint, comme ayant exercé ces fonctions pendant les cent jours de l'interrègne, et se faire délivrer par le maire actuel les archives de la mairie ; qu'ils ont usé de menaces et de violences pour se faire remettre, à onze heures du soir, les clés de l'église et du clocher afin de sonner le tocsin ; qu'ils ont retenu prisonniers pendant toute la nuit, deux membres du conseil municipal et le garde-champêtre ; qu'ils ont attaqué le Maire, l'Adjoint et quelques individus réunis à eux, et qu'ils ont engagé pendant toute la nuit un combat avec eux, à l'occasion duquel il a été tiré quatre vingt coups de feu de part et d'autre.

6. Contre Thibaudier fils, ex-gendarme : qu'il a eu un commandement dans la bande armée de Millery et a participé aux excès qu'elle commit.

7. Contre Antoine-Marie Lepin père, Dyonnet et Pierre-Marie Brancial : qu'ils ont été chefs des bandes armées levées à Bully et à St-Germain-sur-l'Arbresle ; qu'ils ont publié et affiché à Bully une proclàmation annonçant le changement du Gouvernement et le retour effectué de l'usurpateur ; qu'ils ont
fourni des armes et des cocardes tricolores aux rebelles ; qu'ils ont dirigé ces rebelles, 
   1. au domicile du sieur Palmier, adjoint du Maire de St-Germain, où ils ont volé pour une somme de 891 fr. 50 cent., tant en argent, bijoux, qu'effets et denrées, y compris 7 fr. 50 cent. en argent, et la valeur d'un mouchoir et d'un couteau volés à la bergère du sieur Palmier ; 
   2. au domicile de M. Philippe, curé de Chessy, où ils ont volé, tant à lui qu'à Paul Sonnerie son neveu, ou brisé des meubles et effets
pour une valeur de 650 fr.

8.Contre Henri Riboulet : qu'il a été l'un des chefs de la bande armée de St-Germain, et qu'il a participé au pillage commis chez le sieur Palmier de St-Germain, et chez M. le curé de Chessy.

9. Contre Aimé Barret : qu'il a été chef de la bande armée qui se forma à St-Andéol, le 9 Juin, et qu'il a fourni et distribué des armes et des cocardes aux rebelles sous ses ordres.

10. Contre le nommé Jean-Marie Chermet, ancien officier des partisans qu'il a été chef de la bande armée qu'il a levée et organisée à Savigny, et qu'il a fait fouler aux pieds les armes de France.

11. Contre le nommé Vernet : qu'il a été l'un des membres du Comité formé à Lyon, pour combiner l'attentat qui a été commis, et pour rechercher et choisir dans les diverses communes du département du Rhône, les chefs des bandes armées qui ont été levées et organisées, lequel a donné des instructions et des ordres qui ont été exécutés, notamment par Valençot, Tavernier, Garlon, Oudin, etc...


Ont été condamnés à la peine de mort, en exécution des articles 87, 88 et 91 du Code pénal :

Les nommés Chambon, cordonnier de St-Genis-Laval ; Jean Favre, maçon ; Fleury Gilbertier dit Chilliet, cultivateur, Jean Poutier, fils ainé, cultivateur et ex-militaire, domiciliés à Irignv : Louis Guillot. domestique du sieur Alattante, à Charnay ; François Perret, de Savigny ; Pacaud dit Clapet, cultivateur, de St-Germain sur l'Arbresle ; Pierre Fillon, militaire retraité, et Perrachon fils aîné, soldat de l'ex-garde, domiciliés à St -Andéol, et le nommé Delique, de Vaise, faubourg de Lyon, tous contumax, convaincus d'avoir à l'occasion dudit attentat et ayant fait partie des bandes armées levées et organisées, soit par leurs avis, leurs discours et leurs cris, soit par des faits et des actions très caractérisées de leur part, provoqué directement au renversement de l'Autorité royale et du Gouvernement ;


Ont été condamnés à la peine de la déportation, en exécution de l'article Ier de la loi du 9 Novembre 1815 :

Les nommés Jacques Dumont et Joseph Michallon, de Brignais, contumax, convaincus d'avoir fait partie de la bande armée qui fut levée et organisée dans ce bourg le 8 Juin, et d'avoir, à cette occasion, commis un crime de rébellion envers l'autorité administrative ;


Ont été condamnés aux travaux forcés pendant cinq ans :

Enfin les nommés Accarie, de Savigny, Claude Giraud, manoeuvre, et Vincent Massande, de Bully, contumax, convaincus d'avoir, à l'occasion dudit attentat, et ayant fait partie de la bande armée qui fut levée et organisée à Bully le 8 Juin, commis des actes séditieux, soit en invoquant le nom de l'usurpateur et d'un individu de sa famille, soit en enlevant et dégradant le drapeau blanc et foulant aux pieds les armes de France ;


Ont été condamnés par voie de police correctionnelle :

Savoir : le nommé Accarie à un emprisonnement de cinq ans ; 
Claude Giraud et Vincent Massande à un emprisonnement de trois ans ; 
et chacun à 50 fr. d'amende.

Et ont été aussi condamnés tous les trois à demeurer, après l'expiration de leur peine, pendant cinq ans sous la surveillance de la haute police, et sous un cautionnement de bonne conduite, de 500 fr. chacun ; le tout en exécution des articles 5, 7, 10 et 12 de la loi du 3 Novembre 1815.


Il a été ordonné, à l'égard des individus ci-dessus, condamnés à la peine capitale et aux travaux forcés à temps, qu'à la diligence du Procureur du Roi, extrait du présent Arrêt, pour ce qui les concerne, serait dans les trois jours, affiché par l'exécuteur des jugements criminels à un poteau qui serait planté au milieu de l'une des places publiques de la ville chef-lieu de l'arrondissement où le crime a été commis, en exécution de l'article 472 du Code d'instruction criminelle.

I1 a été enfin ordonné que les biens de tous les condamnés ci-dessus seraient, à partir de l'exécution du présent Arrêt, considérés et régis comme biens d'absents ; à l'effet de quoi, extrait dudit Arrêt serait adressé par le Procureur du Roi au directeur des domaines et droits d'enregistrement du domicile des condamnés, en exécution de l'article 471 du même code.

Par le même Arrêt la Cour Prévôtale prononçant sur les restitutions civiles,

A condamné solidairement Lepin père, Chermet, Dyonnet, Riboulet et Brancial, chefs de bandes qui ont pillé la maison du sieur Palmier, adjoint du Maire de St-Germain, et le domicile de M. Georges Philippe, curé de Chessy, à payer savoir : au sieur Palmier : 1° la somme de 880 fr. 50 cent., à laquelle la Cour a arbitré la valeur de l'argent en espèces, effets et subsistances enlevés de son domicile, y compris 10 fr. 50 cent., pour les objets enlevés à la bergère du sieur Palmier, consistant en un mouchoir et un couteau, et en 7 fr. 50 cent. en espèces ; 2° la somme de 200 fr. pour les dommages-intérêts qui lui sont attribués par l'article 51 du Code pénal ; et à M. Georges Philippe, curé de Chessy, 1° la somme de 625 fr., à laquelle la Cour a fixé la valeur des meubles et effets volés ou brisés dans son domicile, et l'argent en espèces, enlevés soit à lui, soit à son neveu ; 2° 161 fr. pour les dommages-intérêts que la loi lui attribue.

La Cour les a encore condamnés solidairement avec Claude Giraud, à restituer au Curé de la commune de Bully, la somme de 26 fr. que ledit Claude Giraud appuyé de la bande, s'est fait compter par violence et sans cause légitime et celle de 6 fr. 50 cent., pour dommages-intérêts.

Enfin, la Cour, sur la demande de la veuve Guinand, a déclaré commun et exécutoire contre Coeur, Bertholat de St-Genis ; Roch Raymond de Brignais, et contre Vernay, Favre, Poutier et Gilbertier, dit Chilliet d'Irigny ; l'Arrêt de la Cour du 17 Juillet dernier, qui adjuge à cette veuve la somme de 3 000 francs à titre de dommages-intérêts, à raison de la privation des secours qu'elle avait droit d'attendre de Guimand son fils, gendarme mort par suite du coup de feu qu'il reçut à St-Genis de la part des rebelles ; en conséquence, la Cour les a condamnés solidairement à payer à la veuve Guinand ladite somme de 3 000 fr..



Pour extrait certifié conforme,

Sury, Greffier


Vu par Nous, Procureur du Roi,

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