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Loi de séparation
des Églises et de l'État, 9 décembre 1905. |
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Loi de séparation
des Églises et de l'État,
9 décembre 1905.
par Marc Nadaux
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En 1905, la vie religieuse en France
s'organise toujours suivant les dispositions prises un siècle plus tôt.
En 1801, Bonaparte, alors Premier Consul et le pape Pie VII, signent ainsi
un Concordat bientôt complété
par des Articles organiques qui régissent les relations entre l'État et
l'Église de France. Ces textes concernent également les populations
protestantes tandis que le culte israélite est officiellement autorisé
à partir de 1806.
Malgré le ralliement prôné en 1892 par Léon XIII dans
l’encyclique Inter innumeras sollicitudines (Au milieu des
sollicitudes), les milieux catholiques montrent toujours leur
opposition à la Troisième République. Au début du XXème siècle se
succèdent au pouvoir les ministères anticléricaux. Une nouvelle législation
hostile à l'Église se met en place. Et les relations diplomatiques entre
le Vatican et la France sont bientôt rompues en 1904. Dans l'esprit
des républicains mûrit alors l'idée que son affaiblissement passe par
la séparation des cultes de l'État.
Les débats à la Chambre des députés menés par Aristide Briand
s'ouvrent le 21 mars 1905. Ils aboutissent au vote de la loi par une
majorité de députés (341 pour et 233 contre). Celle-ci garantit le
libre exercice des cultes mais n'en subventionne plus aucun. Elle
proclame donc le principe de la laïcité de l'État. En conséquence les
biens de l'Église doivent désormais être confiées à des associations
cultuelles ce qui nécessite leur inventaire au préalable. Celui-ci a
lieu au début de l'année suivante dans un climat de grande agitation.
Clemenceau, promu ministre de l'Intérieur, est d'ailleurs contraint d'en
suspendre le déroulement.
La séparation des Églises et de l'État amène une dégradation de la
situation financière de l'Église de France. Se met lentement en place le
denier du culte. Celui-ci accroît la dépendance des ecclésiastiques vis
à vis des notables. Cette sécularisation exacerbe également l'anti-républicanisme
de certains milieux catholiques, ce qui accroît notamment l'audience de
l'Action française, le mouvement extrémiste de Charles Maurras. |
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Titre I -
Principes. |
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Titre II -
Attribution des biens - pensions. |
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Titre III - Des
édifices des cultes. |
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Titre IV - Des
associations pour l'exercice des cultes. |
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Titre V -
Police des cultes. |
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Titre VI -
Dispositions générales.
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Le Sénat et la Chambre des Députés ont adopté,
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
TITRE I . PRINCIPES
Article 1er : La République assure la liberté de
conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules
restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public.
Article 2 : La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne
aucun culte. En conséquence, à partir du 1er janvier qui suivra la
promulgation de la présente loi, seront supprimées des budgets de l'État,
des départements et des communes, toutes dépenses relatives à
l'exercice des cultes. Pourront toutefois être inscrites auxdits budgets
les dépenses relatives à des services d'aumônerie et destinées à
assurer le libre exercice des cultes dans les établissements publics tels
que lycées, collèges, écoles, hospices, asiles et prisons.
Les établissements publics du culte sont supprimés, sous réserve des
dispositions énoncées à l'article 3.
TITRE II . ATTRIBUTION
DES BIENS - PENSIONS
Article 3 : Les établissements dont la suppression est
ordonnée par l'article 2 continueront provisoirement de fonctionner,
conformément aux dispositions qui les régissent actuellement, jusqu'à
l'attribution de leurs biens aux associations prévues par le titre IV et
au plus tard jusqu'à l'expiration du délai ci-après.
Dès la promulgation de la présente
loi, il sera procédé par les agents de l'administration des domaines à
l'inventaire descriptif et estimatif :
. 1) Des biens mobiliers et immobiliers desdits établissements;
. 2) Des biens de l'État, de départements et des communes dont les mêmes
établissements ont la jouissance.
Ce double inventaire sera dressé contradictoirement avec les représentants
légaux des établissements ecclésiastiques ou eux dûment appelés par
une notification faite en la forme administrative.
Les agents chargés de l'inventaire auront le droit de se faire
communiquer tous titres et documents utiles à leurs opérations.
Article 4 : Dans le délai d'un an après la promulgation de la présente
loi, les biens mobiliers et immobiliers des menses, fabriques, conseils
presbytéraux, consistoires et autres établissements publics du culte
seront, avec toutes les charges et obligations qui les grèvent et avec
leur affectation spéciale, transférés par les représentants légaux de
ces établissements aux associations qui, en se conformant aux règles
d'organisation générale du culte dont elles se proposent d'assurer
l'exercice, se seront légalement formées, suivant les prescriptions de
l'article 19, pour l'exercice de ce culte dans les anciennes
circonscriptions desdits établissements.
Article 5 : Ceux des biens désignés à l'article
précédent qui proviennent de l'État et qui ne sont pas grevés d'une
fondation pieuse créée postérieurement à la loi du 18 Germinal an X
feront retour à l'État.
Les attributions de biens ne pourront être faites par les établissements
ecclésiastiques qu'un mois après la promulgation du règlement
d'administration publique prévu à l'article 43. faute de quoi la nullité
pourra en être demandée devant le tribunal civil par toute partie intéressée
ou par le ministère public.
En cas d'aliénation par l'association
cultuelle de valeurs mobilières ou d'immeubles faisant partie du
patrimoine de l'établissement public dissous, le montant du produit de la
vente devra être employé en titres de rente nominatifs ou dans les
conditions prévues au paragraphe 2 de l'article 22.
L'acquéreur des biens aliénés sera
personnellement responsable de la régularité de cet emploi.
Les biens revendiqués par l'État, les
départements ou les communes ne pourront être aliénés, transformés ni
modifiés jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la revendication par les
tribunaux compétents.
Article 6 : Les associations attributaires des biens des établissements
ecclésiastiques supprimés seront tenues des dettes de ces établissements
ainsi que de leurs emprunts sous réserve des dispositions du troisième
paragraphe du présent article; tant qu'elles ne seront pas libérées de
ce passif, elles auront droit à la jouissance des biens productifs de
revenus qui doivent faire retour à l'État en vertu de l'article 5.
Le revenu global desdits biens reste
affecté au payement du reliquat des dettes régulières et légales de l'établissement
public supprimé, lorsqu'il ne se sera formé aucune association cultuelle
apte à recueillir le patrimoine de cet établissement.
Les annuités des emprunts contractés
pour dépenses relatives aux édifices religieux seront supportées par
les associations en proportion du temps pendant lequel elles auront
l'usage de ces édifices par application des dispositions du Titre III.
Dans le cas où l'État, les départements
ou les communes rentreront en possession de ceux des édifices dont ils
sont propriétaires, ils seront responsables des dettes régulièrement
contractées et afférentes auxdits édifices.
Article 7 : Les biens mobiliers ou immobiliers grevés d'une affectation
charitable ou de toute autre affectation charitable ou de toute autre
affectation étrangère à l'exercice du culte seront attribués, par les
représentants légaux des établissements ecclésiastiques, aux services
ou établissements publics ou d'utilité publique, dont la destination est
conforme à celle desdits biens. Cette attribution devra être approuvée
par le préfet du département où siège l'établissement ecclésiastique.
En cas de non-approbation, il sera statué par décret en Conseil d'État.
Toute action en reprise ou en revendication devra être exercée
dans un délai de six mois à partir du jour où l'arrêté préfectoral
ou le décret approuvant l'attribution aura été inséré au Journal
Officiel. L'action ne pourra être intentée qu'en raison de donations ou
de legs et seulement par les auteurs et leurs héritiers en ligne directe.
Article 8 : Faute par un établissement ecclésiastique d'avoir, dans le délai
fixé par l'article 4, procédé aux attributions ci-dessus prescrites, il
y sera pourvu par décret.
A l'expiration dudit délai, les biens
à attribuer seront, jusqu'à leur attribution, placés sous séquestre.
Dans le cas où les biens attribués en
vertu de l'article 4 et du paragraphe 1er du présent article seront, soit
dès l'origine, soit dans la suite, réclamés par plusieurs associations
formées pour l'exercice du même culte, l'attribution qui en aura été
faite par les représentants de l'établissement ou par décret pourra être
contestée devant le Conseil d'État statuant au contentieux, le quel
prononcera en tenant compte de toutes les circonstances de fait.
La demande sera introduite devant le
Conseil d'État, dans le délai d'un an à partir de la date du décret ou
à partir de la notification, à l'autorité préfectorale, par les représentants
légaux des établissements publics du culte, de l'attribution effectuée
par eux. Cette notification devra être faite dans le délai d'un mois.
L'attribution pourra être ultérieurement
contestée en cas de scission dans l'association nantie, de création
d'association nouvelle par suite d'une modification dans le territoire de
la circonscription ecclésiastique et dans le cas où l'association
attributaire n'est plus en mesure de remplir son objet.
Article 9 : A défaut de toute association pour recueillir les biens d'un
établissement public du culte, ces biens seront attribués par décret
aux établissements communaux d'assistance ou de bienfaisance situés dans
les limites territoriales de la circonscription ecclésiastique intéressée.
En cas de dissolution d'une
association, les biens qui lui auront été dévolus en exécution des
articles 4 et 8 seront attribués par décret rendu en Conseil d'État,
soit à des associations analogues dans la même circonscription ou, à
leur défaut, dans les circonscriptions les plus voisines, soit aux établissements
visés au paragraphe 1er du présent article.
Toute action en reprise ou en
revendication devra être exercée dans un délai de six mois à partir du
jour où le décret aura été inséré au Journal Officiel. L'action ne
pourra être intentée qu'en raison de donations ou de legs et seulement
par les auteurs et leurs héritiers en ligne directe.
Article 10 : Les attributions prévues par les articles précédents ne
donnent lieu à aucune perception au profit du Trésor.
Article 11 : Les ministres des cultes qui, lors de la promulgation de la
présente loi, seront âgés de plus de soixante ans révolus et qui
auront, pendant trente ans au moins, rempli des fonctions ecclésiastiques
rémunérées par l'État, recevront une pension annuelle et viagère égale
aux trois quarts de leur traitement.
Ceux qui seront âgés de plus de
quarante-cinq ans et qui auront, pendant vingt ans au moins, rempli des
fonctions ecclésiastiques rémunérées par l'État, recevront une
pension annuelle et viagère égale à la moitié de leur traitement.
Les pensions allouées par les deux
paragraphes précédents ne pourront pas dépasser 1.500 fr.
En cas de décès des titulaires, ces
pensions seront réversibles, jusqu'à concurrence de la moitié de leur
montant, au profit de la veuve et des orphelins mineurs laissés par le défunt
et, jusqu'à concurrence du quart, au profit de la veuve sans orphelins
mineurs. A la majorité des orphelins, leur pension s'éteindra de plein
droit.
Les ministres des cultes actuellement
salariés par l'État, qui ne seront pas dans les conditions ci-dessus,
recevront, pendant quatre ans à partir de la suppression du budget des
cultes, une allocation égale à la totalité de leur traitement pour la
première année, aux deux tiers pour la deuxième, à la moitié pour la
troisième, au tiers pour la quatrième.
Toutefois, dans les communes de moins
de 1,000 habitants et pour les ministres des cultes qui continueront à y
remplir leurs fonctions, la durée de chacune des quatre périodes
ci-dessus indiquées sera doublée.
Les départements et les communes pourront, sous les mêmes conditions que
l'État, accorder aux ministres des cultes actuellement salariés par eux
des pensions ou des allocations établies sur la même base et pour une égale
durée.
Réserve est faite des droits acquis en
matière de pension par application de la législation antérieure, ainsi
que des secours accordés, soit aux anciens ministres des différents
cultes, soit à leur famille.
Les pensions prévues aux deux premiers
paragraphes du présent article ne pourront se cumuler avec toute autre
pension ou tout autre traitement alloué, à titre quelconque, par l'État,
les départements ou les communes.
La loi du 27 juin 1885, relative au
personnel des facultés de théologie catholique supprimées, est
applicable aux professeurs, chargés de cours, maîtres de conférences et
étudiants des facultés de théologie protestante.
Les pensions et allocations prévues
ci-dessus sont incessibles et insaisissables dans les mêmes conditions
que les pensions civiles. Elles cesseront de plein droit en cas de
condamnation à une peine afflictive ou infamante ou en cas de
condamnation pour l'un des délits prévus aux articles 34 et 35 de la présente
loi.
Le droit à l'obtention ou à la
jouissance d'une pension ou allocation sera suspendu par les circonstances
qui font perdre la qualité de Français, durant la privation de cette
qualité.
Les demandes de pension devront être,
sous peine de forclusion, formées dans le délai d'un an après la
promulgation de la présente loi.
TITRE III . DES ÉDIFICES
DES CULTES
Article 12 : Les édifices qui ont été mis à la
disposition et qui, en vertu de la loi du 18 germinal an X, servent à
l'exercice public des cultes ou au logement de leurs ministres (cathédrales,
églises, chapelles, temples, synagogues, archevêchés, évêché,
presbytères, séminaires), ainsi que leurs dépendances immobilières et
les objets mobiliers qui les garnissaient au moment où lesdits édifices
ont été remis aux cultes, sont et demeurent propriété de l'État, des
départements et des communes.
Pour ces édifices, comme pour ceux
postérieurs à la loi du 18 germinal an X, dont l'État, les départements
et les communes seraient propriétaires, y compris les facultés de théologie
protestante, il sera procédé conformément aux dispositions des articles
suivants.
Article 13 : Les édifices servant à l'exercice public du culte, ainsi
que les objets mobiliers les garnissant, seront laissés gratuitement à
la disposition des établissements publics du culte, puis des associations
appelées à les remplacer auxquelles les biens de ces établissements
auront été attribués par application des dispositions du titre II.
La cessation de cette jouissance, et,
s'il y a lieu, son transfert seront prononcés par décret, sauf recours
au Conseil d'Etat statuant au contentieux :
1) Si l'association bénéficiaire est dissoute;
2) Si, en dehors des cas de force majeure, le culte cesse d'être célébré
pendant plus de six mois consécutifs;
3) Si la conservation de l'édifice ou celle des objets mobiliers classés
en vertu de la loi de 1887 et de l'article 16 de la présente loi est
compromise par insuffisance d'entretien, et après mise en demeure dûment
notifiée du conseil municipal ou, à son défaut, du préfet;
4) Si l'association cesse de remplir son objet ou si les édifices sont détournés
de leur destination;
5) Si elle ne satisfait pas soit aux obligations de l'article 6 ou du
dernier paragraphe du présent article, soit aux prescriptions relatives
aux monuments historiques.
La désaffectation de ces immeubles
pourra, dans les cas ci-dessus prévus, être prononcée par décret rendu
en Conseil d'État. En dehors de ces cas, elle ne pourra l'être que par
une loi.
Les immeubles autrefois affectés aux
cultes et dans lesquels les cérémonies du culte n'auront pas été célébrées
pendant le délai d'un an antérieurement à la présente loi, ainsi que
ceux qui ne seront pas réclamés par une association cultuelle dans le délai
de deux ans après sa promulgation, pourront être désaffectés par décret.
Il en sera de même pour les édifices
dont la désaffection aura été demandée antérieurement au 1er juin
1905.
Les établissements publics du culte,
puis les associations bénéficiaires seront tenus des réparations de
toute nature, ainsi que des frais d'assurance et autres charges afférentes
aux édifices et aux meubles les garnissant.
Article 14 : Les archevêchés, évêchés, les presbytères et leurs dépendances,
les grands séminaires et facultés de théologie protestante seront laissés
gratuitement à la disposition des établissements publics du culte, puis
des associations prévues à l'article 13, savoir: les archevêchés et évêchés
pendant une période de deux années; les presbytères dans les communes où
résidera le ministre du culte, les grands séminaires et facultés de théologie
protestante pendant cinq années à partir de la promulgation de la présente
loi.
Les établissements et associations
sont soumis, en ce qui concerne ces édifices, aux obligations prévues
par le dernier paragraphe de l'article 13. Toutefois ils ne seront pas
tenus des grosses réparations.
La cessation de la jouissance des établissements
et associations sera prononcée dans les conditions et selon les formes déterminées
par l'article 13. Les dispositions des paragraphes 3 et 5 du même article
sont applicables aux édifices visés par le paragraphe 1er du présent
article.
La distraction des parties superflues
des presbytères laissés à la disposition des associations cultuelles
pourra, pendant le délai prévu au paragraphe 1er, être prononcée pour
un service public par décret rendu en Conseil d'État.
A l'expiration des délais de
jouissance gratuite, la libre disposition des édifices sera rendue à l'État,
aux départements ou aux communes.
Les indemnités de logement incombant
actuellement aux communes, à défaut de presbytère, par application de
l'article 136 de la loi du 5 avril 1884, resteront à leur charge pendant
le délai de cinq ans. Elles cesseront de plein droit en cas de
dissolution de l'association.
Article 15 : Dans les départements de la Savoie, de la Haute-Savoie et
des Alpes-Maritimes, la jouissance des édifices antérieurs à la loi du
18 germinal an X, servant à l'exercice des cultes ou au logement de leurs
ministres, sera attribuée par les communes sur le territoire desquelles
ils se trouvent, aux associations cultuelles, dans les conditions indiquées
par les articles 12 et suivants de la présente loi. En dehors de ces
obligations, les communes pourront disposer librement de la propriété de
ces édifices.
Dans ces mêmes départements, les cimetières
resteront la propriété des communes.
Article 16 : Il sera procédé à un classement complémentaire des édifices
servant à l'exercice public du culte (cathédrales, églises, chapelles,
temples, synagogue, archevêchés, évêchés, presbytères, séminaires),
dans lequel devront être compris tous ceux de ces édifices représentant,
dans leur ensemble ou dans leurs parties, une valeur artistique ou
historique.
Les objets mobiliers ou les immeubles
par destination mentionnés à l'article 13, qui n'auraient pas encore été
inscrits sur la liste de classement dressée en vertu de la loi du 30 mars
1887, sont, par l'effet de la présente loi, ajoutés à ladite liste. Il
sera procédé par le ministre de l'instruction publique et des
beaux-arts, dans le délai de trois ans, au classement définitif de ceux
de ces objets dont la conservation présenterait, au point de vue de
l'histoire ou de l'art, un intérêt suffisant. A l'expiration de ce délai,
les autres objets seront déclassés de plein droit.
En outre, les immeubles et les objets
mobiliers, attribués en vertu de la présente loi aux associations,
pourront être classés dans les mêmes conditions que s'ils appartenaient
à des établissements publics.
Il n'est pas dérogé, pour le surplus,
aux dispositions de la loi du 30 mars 1887.
Les archives ecclésiastiques et
bibliothèques existant dans les archevêchés, évêchés, grands séminaires,
paroisses, succursales et leurs dépendances, seront inventoriées et
celles qui seront reconnues propriété de l'État lui seront restituées.
Article 17 : Les immeubles par destination classés en vertu de la loi du
30 mars 1887 ou de la présente loi sont inaliénables et
imprescriptibles.
Dans le cas où la vente ou l'échange
d'un objet classé serait autorisée par le ministre de l'instruction
publique et des beaux-arts, un droit de préemption est accordé: 1) aux
associations cultuelles; 2) aux communes; 3) aux départements; 4) aux musées
et sociétés d'art et d'archéologie; 5) à l'État. Le prix sera fixé
par trois experts que désigneront le vendeur, l'acquéreur et le président
du tribunal civil.
Si aucun des acquéreurs visés
ci-dessus ne fait usage du droit de préemption, la vente sera libre; mais
il est interdit à l'acheteur d'un objet classé de le transporter hors de
France.
Nul travail de réparation,
restauration ou entretien à faire aux monuments ou objets mobiliers classés
ne peut être commencé sans l'autorisation du ministre des beaux-arts, ni
exécuté hors de la surveillance de son administration, sous peine,
contre les propriétaires, occupants ou détenteurs qui auraient ordonné
ces travaux, d'une amende de seize à quinze cents francs (16 à 1.500
fr.).
Toute infraction aux dispositions
ci-dessus ainsi qu'à celles de l'article 16 de la présente loi et des
articles 4, 10, 11 12 et 13 de la loi du 30 mars 1887 sera punie d'une
amende de cent à dix mille francs (100 à 10.000 fr.) et d'un
emprisonnement de six jours à trois mois, ou de l'une de ces deux peines
seulement.
La visite des édifices et l'exposition
des objets mobiliers classés seront publiques; elles ne pourront donner
lieu à aucune taxe ni redevance.
TITRE IV . DES
ASSOCIATIONS POUR L'EXERCICE DES CULTES
Article 18 : Les associations formées pour subvenir aux
frais, à l'entretien et à l'exercice public d'un culte devront être
constituées conformément aux articles 5 et suivants du titre 1er de la
loi du 1er juillet 1901. Elles seront, en outre, soumises aux
prescriptions de la présente loi.
Article 19 : Ces associations devront avoir exclusivement pour objet
l'exercice d'un culte et être composées au moins :
. Dans les communes de moins de 1,000 habitants, de sept personnes;
. Dans les communes de 1,000 à 20,000 habitants, de quinze personnes;
. Dans les communes dont le nombre des habitants est supérieur à 20,000,
de vingt-cinq personnes majeures, domiciliées ou résidant dans la
circonscription religieuse.
Chacun de leurs membres pourra s'en
retirer en tout temps, après payement des cotisations échues et de
celles de l'année courante, nonobstant toute clause contraire.
Nonobstant toute clause contraire des
statuts, les actes de gestion financière et d'administration légale des
biens accomplis par les directeurs ou administrateurs seront, chaque année
au moins, présentés au contrôle de l'assemblée générale des membres
de l'association et soumis à son approbation.
Les associations pourront recevoir, en
outre des cotisations prévues par l'article 6 de la loi du 1er juillet
1901, le produit des quêtes et collectes pour les frais du culte,
percevoir des rétributions: pour les cérémonies et services religieux même
par fondation; pour la location des bancs et sièges; pour la fourniture
des objets destinés au service des funérailles dans les édifices
religieux et à la décoration de ces édifices.
Elles pourront verser, sans donner lieu
à perception de droits, le surplus de leurs recettes à d'autres
associations constituées pour le même objet.
Elles ne pourront, sous quelque forme
que ce soit, recevoir des subventions de l'État, des départements ou des
communes. Ne sont pas considérées comme subventions les somme allouées
pour réparations aux monuments classés.
Article 20 : Ces associations peuvent, dans les formes déterminées par
l'article 7 du décret du 16 août 1901, constituer des unions ayant une
administration ou une direction centrale; ces unions seront réglées par
l'article 18 et par les cinq derniers paragraphes de l'article 19 de la présente
loi.
Article 21 : Les associations et les unions tiennent un état de leurs
recettes et de leurs dépenses; elles dressent chaque année le compte
financier de l'année écoulée et l'état inventorié de leurs biens,
meubles et immeubles.
Le contrôle financier est exercé sur
les associations et sur les unions par l'administration de
l'enregistrement et par l'inspection générale des finances.
Article 22 : Les associations et unions peuvent employer leurs ressources
disponibles à la constitution d'un fonds de réserve suffisant pour
assurer les frais et l'entretien du culte et ne pouvant en aucun cas
recevoir une autre destination: le montant de cette réserve ne pourra
jamais dépasser une somme égale, pour les unions et associations ayant
plus de cinq mille francs (5,000 francs) de revenu, à trois fois et, pour
les autres associations, à six fois la moyenne annuelle des sommes dépensées
par chacune d'elles pour les frais du culte pendant les cinq derniers
exercices.
Indépendamment de cette réserve, qui
devra être placée en valeurs nominatives, elles pourront constituer une
réserve spéciale dont les fonds devront être déposés, en argent ou en
titres nominatifs, à la caisse des dépôts et consignations pour être
exclusivement affectés, y compris les intérêts, à l'achat, à la
construction, à la décoration ou à la réparation d'immeubles ou
meubles destinés aux besoins de l'association ou de l'union.
Article 23 : Seront punis d'une amende de seize francs
(16 fr.) à deux cent francs (200 francs) et, en cas de récidive, d'une
amende double les directeurs ou administrateurs d'une association ou d'une
union qui auront contrevenu aux articles 18, 19, 20, 21 et 22.
Les tribunaux pourront, dans le cas
d'infraction au paragraphe 1er de l'article 22, condamner l'association ou
l'union à verser l'excédent constaté aux établissements communaux
d'assistance ou de bienfaisance.
Ils pourront, en outre, dans tous les
cas prévus au paragraphe 1er du présent article, prononcer la
dissolution de l'association ou de l'union.
Article 24 : Les édifices affectés à l'exercice du
culte appartenant à l'État, aux départements ou aux communes
continueront à être exemptés de l'impôt foncier et de l'impôt des
portes et fenêtres.
Les édifices servant au logement des
ministres des cultes, les séminaires, les facultés de théologie
protestante qui appartiennent à l'État, aux départements ou aux
communes, les biens qui sont la propriété des associations et unions
sont soumis aux mêmes impôts que ceux des particuliers.
Les associations et unions ne sont en
aucun cas assujetties à la taxe d'abonnement ni à celle imposée aux
cercles par l'article 33 de la loi du 8 août 1890, pas plus qu'à l'impôt
de 4 p.100 sur le revenu établi par les lois du 28 décembre 1880 et du
29 décembre 1884.
TITRE V . POLICE
DES CULTES
Article 25 : Les réunions pour la célébration d'un
culte tenues dans les locaux appartenant à une association cultuelle ou
mis à sa disposition sont publiques. Elles sont dispensées des formalités
de l'article 8 de la loi du 30 juin 1881, mais restent placées sous la
surveillance des autorités dans l'intérêt de l'ordre public. Elles ne
peuvent avoir lieu qu'après une déclaration faite dans les formes de
l'article 2 de la même loi et indiquant le local dans lequel elles seront
tenues. Une seule déclaration suffit pour l'ensemble des réunions
permanentes, périodiques ou accidentelles qui auront lieu dans l'année.
Article 26 : Il est interdit de tenir des réunions politiques dans les
locaux servant habituellement à l'exercice d'un culte.
Article 27 : Les cérémonies, processions et autres manifestations extérieures
d'un culte continueront à être réglées en conformité des articles 95
et 97 de la loi municipale du 5 avril 1884.
Les sonneries de cloches seront réglées
par arrêté municipal et, en cas de désaccord entre le maire et le président
ou directeur de l'association cultuelle, par arrêté préfectoral.
Le règlement d'administration publique
prévu par l'article 43 de la présente loi déterminera les conditions et
les cas dans lesquels les sonneries civiles pourront avoir lieu.
Article 28 : Il est interdit, à l'avenir, d'élever ou d'apposer aucun
signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque
emplacement public que ce soit, à l'exception des édifices servant au
culte, des terrains de sépulture dans les cimetières, des monuments funéraires,
ainsi que des musées ou expositions.
Article 29 : Les contraventions aux articles précédents sont punies des
peines de simple police.
Sont passibles de ces peines, dans le
cas des articles 25, 26 et 27, ceux qui ont organisé la réunion ou
manifestation, ceux qui y ont participé en qualité de ministres du culte
et, dans le cas des articles 25 et 26, ceux qui ont fourni le local.
Article 30 : Conformément aux dispositions de l'article 2 de la loi du 28
mars 1882, l'enseignement religieux ne peut être donné aux enfants âgés
de six à treize ans, inscrits dans les écoles publiques, qu'en dehors
des heures de classe.
Il sera fait application aux ministres
des cultes qui enfreindraient ces prescriptions, des dispositions de
l'article 14 de la loi précitée.
Article 31 : Sont punis d'une amende de seize francs (16 fr.) à deux
cents francs (200 fr.) et d'un emprisonnement de six jours à deux mois ou
de l'une de ces deux peines seulement ceux qui, soit par voies de fait,
violences ou menaces contre un individu, soit en lui faisant craindre de
perdre son emploi ou d'exposer à un dommage sa personne, sa famille ou sa
fortune, l'auront déterminé à exercer ou à s'abstenir d'exercer un
culte, à faire partie ou à cesser de faire partie d'une association
cultuelle, à contribuer ou à s'abstenir de contribuer aux frais d'un
culte.
Article 32 : Seront punis des mêmes peines ceux qui auront empêché,
retardé ou interrompu les exercices d'un culte par des troubles ou désordres
causés dans le local servant à ces exercices.
Article 33 : Les dispositions des deux articles précédents ne
s'appliquent qu'aux troubles, outrages ou voies de fait, dont la nature ou
les circonstances ne donneront pas lieu à de plus fortes peines d'après
les dispositions du code pénal.
Article 34 : Tout ministre d'un culte qui, dans les lieux ou s'exerce ce
culte, aura publiquement par des discours prononcés, des lectures faites,
des écrits distribués ou des affiches apposées, outragé ou diffamé un
citoyen chargé d'un service public sera puni d'une amende de cinq cents
francs à trois mille francs (500 à 3.000 fr.) et d'un emprisonnement de
un mois à un an, ou de l'une de ces deux peines seulement.
La vérité du fait diffamatoire, mais seulement s'il est
relatif aux fonctions, pourra être établie devant le tribunal
correctionnel dans les formes prévues par l'article 52 de la loi du 29
juillet 1881. Les prescriptions édictées par l'article 65 de la même
loi s'appliquent aux délits du présent article et de l'article qui suit.
Article 35 : Si un discours prononcé ou un écrit affiché ou distribué
publiquement dans les lieux ou s'exerce le culte, contient une provocation
directe à résister à l'exécution des lois ou aux actes légaux de
l'autorité publique, ou s'il tend à soulever ou à armer une partie des
citoyens contre les autres, le ministre du culte qui s'en sera rendu
coupable sera puni d'un emprisonnement de trois mois à deux ans, sans préjudice
des peines de la complicité, dans le cas où la provocation aurait été
suivie d'une sédition, révolte ou guerre civile.
Article 36 : Dans le cas de condamnation par les tribunaux de simple
police ou de police correctionnelle en application des articles 25 et 26,
34 et 35, l'association constituée pour l'exercice du culte dans
l'immeuble où l'infraction a été commise sera civilement responsable.
TITRE VI . DISPOSITIONS GÉNÉRALES
Article 37 : L'article 463 du Code pénal et la loi du
26 mars 1891 sont applicables à tous les cas dans lesquels la présente
loi édicte des pénalités.
Article 38 : Les congrégations religieuses demeurent soumises aux lois
des 1er juillet 1901, 4 décembre 1902 et 7 juillet 1904.
Article 39 : Les jeunes gens, qui ont obtenu à titre d'élèves ecclésiastiques
la dispense prévue par l'article 23 de la loi du 15 juillet 1889,
continueront à en bénéficier conformément à l'article 99 de la loi du
21 mars 1905, à la condition qu'à l'âge de vingt-six ans ils soient
pourvus d'un emploi de ministre du culte rétribué par une association
cultuelle et sous réserve des justifications qui seront fixées par un règlement
d'administration publique.
Article 40 : Pendant huit années à partir de la
promulgation de la présente loi, les ministres du culte seront inéligibles
au conseil municipal dans les communes où ils exerceront leur ministère
ecclésiastique.
Article 41 : Les sommes rendues disponibles chaque année par la
suppression du budget des cultes seront réparties entre les communes au
prorata du contingent de la contribution foncière des propriétés non bâties
qui leur aura été assigné pendant l'exercice qui précèdera la
promulgation de la présente loi.
Article 42 : Les dispositions légales relatives aux jours actuellement fériés
sont maintenues.
Article 43 : Un règlement d'administration publique rendu dans les trois
mois qui suivront la promulgation de la présente loi déterminera les
mesures propres à assurer son application.
Des règlements d'administration
publique détermineront les conditions dans lesquelles la présente loi
sera applicable à l'Algérie et aux colonies.
Article 44 : Sont et demeurent abrogées toutes les dispositions relatives
à l'organisation publique des cultes antérieurement reconnus par l'État,
ainsi que toutes dispositions contraires à la présente loi, et
notamment:
1) La loi du 18 germinal an X, portant que la
convention passée le 26 messidor an IX entre le Pape et le Gouvernement
Français, ensemble les articles organiques de ladite convention et des
cultes protestants, seront exécutés comme des lois de la République;
2) Le décret du 26 mars 1852 et la loi du 1er août 1879 sur les cultes
protestants;
3) Les décrets du 17 mars 1808, la loi du 8 février 1831 et l'ordonnance
du 25 mai 1844 sur le culte israélite;
4) Les décrets des 22 décembre 1812 et 19 mars 1859;
5) Les articles 201 à 208, 260 à 264, 294 du code pénal;
6) Les articles 100 et 101, les paragraphes 11 et 12 de l'article 136 et
l'article 167 de la loi du 5 avril 1884;
7) Le décret du 30 décembre 1809 et l'article 78 de la loi du 26 janvier
1892.
La présente loi, délibérée et adoptée par le Sénat et par la Chambre
des Députés, sera exécutée comme loi de l'État.
Fait à Paris, le 9 décembre 1905.
Émile LOUBET.
Par le Président de la République:
Le président du conseil,
ministre des affaires étrangères,
ROUVIER.
Le ministre de l'instruction civique,
des beaux-arts et des cultes,
BIENVENU MARTIN.
Le ministre de l'intérieur,
F.DUBIEF.
Le ministre des finances,
P.MERLOU.
Le ministre des colonies,
CLEMENTEL.
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