|
A voir et à lire
sur
19e.org,
et ailleurs.
|
|
| |
sur 19e.org |
|
|
|
Vous êtes ici :
Quanta cura,
lettre encyclique du pape Pie IX, 1864
|
|
Quanta cura,
lettre encyclique du pape Pie IX
condamnant l'évolution du
monde moderne,
8 décembre 1864.
par Marc Nadaux
|
|
L'insurrection patriotique qui embrase les
États de l'Église en 1848 décident d'une nouvelle orientation du
pontificat de Pie IX. Celui-ci qui apparaissait comme un prélat gagné
aux idées progressistes abandonne ses velléités de réformes.
L'encyclique Quanta cura, à laquelle s'adjoint le Syllabus errorum, un
catalogue des erreurs du temps, est un des textes émanant du "pape
de la réaction". |
Lettre encyclique de sa sainteté le Pape Pie IX
du 8 décembre 1864.
Quanta cura
À tous nos Vénérables Frères
les Patriarches, Primats, Archevêques et Évêques,
en grâce et communion avec le Siège Apostolique.
Pie IX, Pape.
Vénérables Frères, Salut et Bénédiction
Apostolique.
1 - Avec quel soin et quelle vigilance pastorale
les Pontifes Romains Nos Prédécesseurs, ont rempli la mission à eux
confiée par le Christ Seigneur lui-même en la personne du Bienheureux
Pierre, Prince des Apôtres, et ont ainsi accompli leur devoir de paître
les agneaux et les brebis ! Sans jamais discontinuer, ont
attentivement nourri tout le troupeau du Seigneur des paroles de la foi,
ont imprégné de la doctrine de salut, écarté des pâturages empoisonnés,
voilà ce dont tout le monde est convaincu et assuré, Vous surtout, Vénérables
Frères. Oui vraiment Nos Prédécesseurs se montrèrent les défenseurs
et les vengeurs de l'auguste religion catholique, de la vérité et de la
justice : soucieux, avant tout, du salut des âmes, ils n'ont jamais
rien eu de plus à cœur que de découvrir et de condamner par leurs très
sages Lettres et Constitutions toutes les hérésies et les erreurs qui,
contraires à notre Foi divine, à la doctrine de l'Église Catholique, à
l'honnêteté des mœurs et au salut éternel des hommes, ont fréquemment
soulevé de violentes tempêtes et lamentablement souillé l'Église et la
Cité.
2 - C'est pourquoi Nos mêmes Prédécesseurs ont constamment opposé la
fermeté Apostolique aux machinations criminelles d'hommes iniques, qui
projettent l'écume de leurs désordres comme les vagues d'une mer en
furie et promettent la liberté, eux, les esclaves de la corruption :
ébranler les fondements de la religion catholique et de la société
civile par leurs fausses opinions et les plus pernicieux écrits, faire
disparaître toute trace de vertu et de justice, corrompre les âmes et
les esprits, détourner des justes principes de la morale ceux qui ne sont
pas sur leurs gardes, en particulier la jeunesse inexpérimentée, la dépraver
pitoyablement, l'entraîner dans les pièges de l'erreur, et enfin
l'arracher du sein de l'Église catholique, voilà le sens de tous leurs
efforts.
3 - Vous êtes les premiers à savoir, Vénérables Frères, qu'à peine
avions-Nous été élevé à cette chaire de Pierre, par un secret dessein
de la Providence Divine et sans aucun mérite de Notre part, Nous avons vu
pour la plus grande douleur de Notre âme une tempête vraiment effroyable
soulevée par tant de doctrines perverses. Nous avons vu les maux les plus
accablants, qu'on ne déplorera jamais assez et que tant d'erreurs ont
attirés sur le peuple chrétien. C'est pour remplir les devoirs de Notre
Ministère Apostolique et suivre les traces glorieuses de Nos Prédécesseurs
que Nous avons élevé la voix. En plusieurs Encycliques déjà publiées,
dans les Allocutions prononcées en consistoire et en d'autres Lettres
Apostoliques, Nous avons condamné les principales erreurs de notre bien
triste époque, fait appel à votre haute vigilance épiscopale, averti et
encouragé tous Nos très chers fils de l'Église Catholique à fuir et
redouter la contagion d'une peste si violente. Et en particulier, par
Notre première Encyclique du 9 novembre 1846, à Vous adressée, et les
deux allocutions prononcées en consistoire le 9 décembre 1854 et le 9
juin 1862, nous avons condamné ces monstruosités extraordinaires que
sont les opinions, qui surtout de nos jours, dominent pour le plus grand
dommage des âmes et au détriment de la société civile elle-même. Ces
opinions s'opposent essentiellement, non seulement à l'Église
catholique, à sa doctrine de salut et à ses droits vénérables, mais
encore à l'éternelle loi naturelle gravée par Dieu dans tous les cœurs
et à la droite raison. C'est d'elles que presque toutes les autres
erreurs firent leur origine.
4 - Cependant, bien que nous n'ayons pas négligé de proscrire et de réprouver
fréquemment les plus graves de ces erreurs, la cause de l'Église
catholique et le salut des âmes que Dieu nous a confié, et le bien de la
société humaine elle-même, réclament impérieusement que Nous lancions
un nouvel appel à votre sollicitude pastorale pour terrasser d'autres idées
fausses qui découlent de source de ces mêmes erreurs. Ces opinions
trompeuses et perverses sont d'autant plus détestables qu'elles visent
principalement à entraver et renverser cette puissance de salut que l'Église
catholique, en vertu de la mission et du mandat reçu de son divin Auteur,
doit exercer librement jusqu'à la consommation des siècles, non moins à
l'égard des individus que des nations, des peuples et de leurs chefs.
Elles cherchent à faire disparaître cette mutuelle alliance et cette
concorde entre le Sacerdoce et l'Empire, qui s'est toujours avérée
propice et salutaire à la Religion et à la société (1).
5 - Et de fait, vous le savez parfaitement, Vénérables Frères, il s'en
trouve beaucoup aujourd'hui pour appliquer à la société civile le
principe impie et absurde du " naturalisme ", comme
ils l'appellent, et pour oser enseigner que " le meilleur régime
politique et le progrès de la vie civile exigent absolument que la société
humaine soit constituée et gouvernée sans plus tenir compte de la
Religion que si elle n'existait pas, ou du moins sans faire aucune différence
entre la vraie et les fausses religions ". Et contre la doctrine
de la Sainte Écriture, de l'Église et des saints Pères, ils affirment
sans hésitation que : " la meilleure condition de la société
est celle où on ne reconnaît pas au pouvoir le devoir de réprimer par
des peines légales les violations de la loi catholique, si ce n'est dans
la mesure où la tranquillité publique le demande ". À partir
de cette idée tout à fait fausse du gouvernement des sociétés, ils ne
craignent pas de soutenir cette opinion erronée, funeste au maximum pour
l'Église catholique et le salut des âmes, que Notre Prédécesseur Grégoire
XVI, d'heureuse mémoire, qualifiait de " délire "
(2) : " La liberté de conscience et des cultes est un
droit propre à chaque homme. Ce droit doit être proclamé et garanti par
la loi dans toute société bien organisée. Les citoyens ont droit à
l'entière liberté de manifester hautement et publiquement leurs opinions
quelles qu'elles soient, par les moyens de la parole, de l'imprimé ou
tout autre méthode sans que l'autorité civile ni ecclésiastique puisse
lui imposer une limite ". Or, en donnant pour certitudes des
opinions hasardeuses, ils ne pensent ni ne se rendent compte qu'ils prêchent
" la liberté de perdition " (3), et que " s'il
est permis à toutes les convictions humaines de décider de tout
librement, il n'en manquera jamais pour oser résister à la vérité et
faire confiance au verbiage d'une sagesse toute humaine. On sait cependant
combien la foi et la sagesse chrétienne doivent éviter cette vanité si
dommageable, selon l'enseignement même de Notre Seigneur Jésus-Christ "
(4).
6 - Là où la religion a été mise à l'écart de la société civile,
la doctrine et l'autorité de la révélation divine répudiées, la pure
notion même de la justice et du droit humain s'obscurcit et se perd, et
la force matérielle prend la place de la véritable justice et du droit légitime.
D'où l'on voit clairement pourquoi certains, reléguant au dernier rang
les plus sûrs principes de la saine raison, sans en tenir compte, osent
proclamer que : " La volonté du peuple qui se manifeste
par ce qu'on dit être l'opinion publique, ou autrement, constitue la loi
suprême dégagée de tout droit divin et humain, et que dans l'ordre
politique des faits accomplis, par cela même qu'ils sont accomplis, ont
force de droit. "
7 - Mais qui ne voit et ne sent parfaitement qu'une société dégagée
des liens de la religion et de la vraie justice, ne peut plus se proposer
aucun autre but que d'amasser et d'accumuler des richesses, ni suivre
d'autre loi dans ses actes que l'indomptable désir de l'âme d'être
esclave de ses propres passions et intérêts ? C'est pourquoi les
hommes de cette espèce poursuivent d'une haine si cruelle les Familles
Religieuses, en dépit des services rendus au prix des plus grands efforts
à la religion chrétienne, à la société civile et à la culture ;
ils déblatèrent contre elle en disant qu'elles n'ont aucune raison légitime
d'exister, et c'est ainsi qu'ils applaudissent aux divagations des hérétiques.
Or, comme l'enseignait en toute sagesse Notre Prédécesseur Pie VI
d'heureuse mémoire : " l'abolition des réguliers blesse
le droit de professer publiquement les conseils évangéliques, blesse un
mode de vie recommandé dans l'Église comme conforme à la doctrine des
Apôtres, blesse la mémoire de ces illustres fondateurs que nous vénérons
sur les autels, et qui n'ont établi ces ordres que sous l'inspiration de
Dieu " (Lettre au Cardinal de la Rochefoucault, 10 mars 1791).
8 - Et ils déclarent même dans leur impiété qu'il faut ôter aux
citoyens et à l'Église la faculté " de fournir valablement
des aumônes publiques par charité chrétienne ", et abolir la
loi " qui à des jours déterminés défend les œuvres serviles
pour vaquer au culte divin " sous le prétexte si fallacieux que
" la faculté et la loi ci-dessus évoquées sont contraires aux
principes de la bonne économie politique ".
9 - Et non contents de mettre la religion à l'écart de la société, ils
veulent même l'écarter de la vie privée des familles. En effet,
enseignant et professant la si funeste erreur du Communisme et du
Socialisme, ils affirment que : " La société domestique
ou la famille emprunte au seul droit civil toute sa raison d'être ;
et qu'en conséquence c'est de la loi civile seule que découlent et dépendent
tous les droits des parents sur les enfants, et d'abord le droit
d'instruction et d'éducation. " Par ces opinions impies et ces
machinations, ces hommes de mensonge veulent surtout aboutir à ce que la
doctrine et le pouvoir de l'Église catholique qui apportent le salut,
soient entièrement éliminés de l'instruction et de l'éducation de la
jeunesse, et que l'âme tendre et malléable des jeunes soit infectée et
déformée pitoyablement par toutes sortes d'erreurs perverses et par le
vice. Oui, tous ceux qui ont mis leurs efforts à bouleverser l'ordre sacré
et l'ordre public, à renverser l'ordre juste de la société, et à anéantir
tous les droits divins et humains, ont toujours fait tendre leurs desseins
criminels, leurs désirs et leurs œuvres principalement à tromper et à
dépraver la jeunesse qui ne s'y attend pas, comme Nous l'avons indiqué
plus haut ; et ils ont mis tout leur espoir dans la corruption de
cette jeunesse.
10 - Voilà pourquoi jamais ils ne cessent d'infliger toutes sortes de
vexations indicibles à l'un et l'autre clergé d'où rejaillirent tant
d'immenses bienfaits sur l'ordre religieux, civil et culturel, comme
l'attestent avec éclat les plus sûrs monuments de l'histoire ; voilà
pourquoi ils déclarent que ce clergé même, en tant qu'ennemi du véritable
et utile progrès de la science et de la civilisation, doit être écarté
de toute charge et de tout rôle dans l'instruction et l'éducation de la
jeunesse.
11 - Mais il en est d'autres qui, renouvelant
les chimères extravagantes et tant de fois condamnées des novateurs, ont
l'insigne impudence de soumettre à la discrétion de l'autorité civile
l'autorité suprême attribuée par le Christ Notre Seigneur à l'Église
et à ce Siège Apostolique, et de dénier à cette même Église et à ce
Siège tous droits en ce qui regarde les affaires extérieures. Car ils
n'ont aucunement honte d'affirmer que : " Les lois de l'Église
n'obligent pas en conscience, à moins qu'elles ne soient promulguées par
le pouvoir civil. - Les actes et les décrets des Pontifes Romains
concernant la religion et l'Église ont besoin de la sanction et de
l'approbation, ou au moins du consentement du pouvoir civil. - Les
constitutions apostoliques qui condamnent les sociétés secrètes - qu'on
y exige ou non le serment de garder le secret - et qui frappent d'anathème
leurs adeptes et leurs défenseurs ne peuvent entrer en vigueur dans les
pays où le gouvernement civil tolère ces sortes d'associations. -
L'excommunication portée par le Concile de Trente et les Pontifes Romains
contre ceux qui envahissent et usurpent les droits et possessions de l'Église,
repose sur une confusion de l'ordre spirituel avec l'ordre civil et
politique, et n'a pour but qu'un bien de ce monde. - L'Église ne doit
rien décréter qui puisse lier la conscience des fidèles relativement à
l'usage des biens temporels. Le droit ecclésiastique n'a pas compétence
pour châtier de peines temporelles les violateurs de ses lois. - Il est
conforme aux principes de la sacrée théologie et du droit public
d'attribuer au gouvernement civil et de revendiquer pour lui la propriété
des biens qui sont en possession de l'Église, des Familles Religieuses et
autres associations pieuses ".
12 - Ils ne rougissent pas non plus de professer ouvertement et
publiquement les formules et les principes hérétiques, d'où sortent
tant d'opinions perverses et d'erreurs. Car ils répètent que " le
pouvoir ecclésiastique n'est pas, de droit divin, distinct et indépendant
du pouvoir civil, et qu'une telle distinction et indépendance ne peut être
conservée sans que l'Église envahisse et usurpe les droits essentiels du
pouvoir civil ".
13 - Et Nous ne pouvons passer sous silence l'audace de ceux qui, ne
supportant pas la saine doctrine, prétendent que : " Quant
à ces jugements et à ces décrets du Siège Apostolique dont l'objet
regarde manifestement le bien général de l'Église, ses droits et sa
discipline, on peut, du moment qu'ils ne touchent pas aux dogmes relatifs
à la foi et aux mœurs, leur refuser l'assentiment et l'obéissance, sans
péché et sans cesser en rien de professer le catholicisme. "
À quel point cela est contraire au dogme catholique sur le plein pouvoir,
divinement conféré par le Christ Notre Seigneur lui-même au Pontife
Romain, de paître, de régir et de gouverner l'Église universelle, il
n'est personne qui ne le voie et qui ne le comprenne clairement et
distinctement.
14 - Au milieu donc d'une telle perversité
d'opinions corrompues, Nous souvenant de Notre charge Apostolique, dans
notre plus vive sollicitude pour notre très sainte religion, pour la
saine doctrine, et pour le salut des âmes à Nous confiées par Dieu, et
pour le bien de la société humaine elle-même, Nous avons jugé bon d'élever
à nouveau Notre Voix Apostolique. En conséquence, toutes et chacune des
opinions déréglées et des doctrines rappelées en détail dans ces
Lettres, Nous les réprouvons, proscrivons et condamnons de Notre Autorité
Apostolique ; et Nous voulons et ordonnons que tous les fils de l'Église
catholique les tiennent absolument pour réprouvées, proscrites et
condamnées.
15 - Et, en outre, vous savez très bien, Vénérables Frères, que de nos
jours ceux qui haïssent toute vérité et toute justice, les ennemis
acharnés de notre religion, au moyen de livres empoisonnés, de brochures
et de journaux répandus par toute la terre, trompent les peuples, mentent
perfidement, et diffusent toutes sortes d'autres doctrines impies. Vous
n'ignorez pas non plus que, même à cette époque où nous sommes, on en
trouve qui, mus et stimulés par l'esprit de Satan, en sont arrivés à
cette impiété de nier Notre Seigneur et Maître Jésus-Christ, et ne
craignent pas d'attaquer sa Divinité avec une insolence criminelle. Mais
ici Nous ne pouvons, Vénérables Frères, que vous honorer à bon droit
des plus grands éloges, vous qui n'avez jamais manqué, avec tout votre zèle,
d'élever votre voix épiscopale contre tant d'impiété.
16 - C'est pourquoi, par Nos présentes Lettres, Nous nous adressons une
fois de plus avec beaucoup d'affection à vous qui, appelés à partager
Nos soucis, êtes au milieu des calamités qui nous touchent si virement.
Notre consolation, Notre joie et Notre encouragement les plus grands :
par la qualité de votre esprit religieux et de votre piété et aussi par
cet amour, cette foi et cette déférence admirable avec lesquels, attachés
à Nous et à ce Siège Apostolique dans la plus grande unité d'esprit,
vous travaillez à remplir avec empressement et application votre très
grave ministère épiscopal. Car Nous attendons de votre remarquable zèle
pastoral que, prenant le glaive de l'esprit, qui est la parole de Dieu, et
fortifiés dans la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ, vous ayez la
volonté de veiller chaque jour davantage avec une attention redoublée à
ce que les fidèles confiés à vos soins " s'abstiennent des
herbes nuisibles que Jésus-Christ ne cultive pas, parce qu'elles n'ont
pas été plantées par son Père " (5). Et ne cessez jamais
d'inculquer à ces mêmes fidèles que tout vrai bonheur découle pour les
hommes de notre sainte religion, de sa doctrine et de sa pratique, et
qu'" heureux est le peuple dont Dieu est le Seigneur "
(6). Enseignez que " l'autorité repose sur le fondement de la
Foi Catholique " (7) et qu'" il n'y a rien de plus
mortel, rien qui nous précipite autant dans le malheur, nous expose
autant à tous les dangers, que de penser qu'il nous peut suffire d'avoir
reçu le libre arbitre en naissant ; sans avoir à rien demander de
plus à Dieu ; c'est-à-dire, qu'oubliant notre Créateur, nous
renions son pouvoir sur nous pour manifester notre liberté "
(8). N'omettez pas non plus d'enseigner que " le pouvoir de
gouverner est conféré non pour le seul gouvernement de ce monde, mais
avant tout pour la protection de l'Église " (9) et que " rien
ne peut être plus profitable et plus glorieux aux chefs d'États et aux
Rois que ce que Notre Prédécesseur saint Félix, rempli de sagesse et de
courage, écrivait à l'empereur Zénon : " Qu'ils laissent
l'Église catholique se gouverner par ses propres lois, et ne permettent
à personne de mettre obstacle à sa liberté... Il est certain qu'il leur
est avantageux de s'appliquer, quand il s'agit de la cause de Dieu, et
suivant l'ordre qu'Il a établi, à subordonner et non à préférer la
volonté royale à celle des prêtres du Christ " "
(10).
17 - C'est toujours, Vénérables Frères, mais c'est maintenant plus que
jamais, au milieu de telles calamités de l'Église et de la société
civile, en présence d'une si vaste conspiration d'adversaires et d'un tel
amas d'erreurs contre le catholicisme et le Siège Apostolique, qu'il est
absolument nécessaire de nous adresser avec confiance au Trône de la grâce
pour obtenir miséricorde et trouver la grâce d'une protection opportune.
À cette fin, Nous avons jugé bon de stimuler la piété de tous les fidèles
pour qu'en union avec Nous, et avec vous, ils ne cessent de prier et
supplier par les prières les plus ferventes et les plus humbles, le Père
très clément des lumières et des miséricordes ; qu'ils se réfugient
toujours dans la plénitude de la foi auprès de notre Seigneur Jésus-Christ,
qui nous a rachetés à Dieu en son sang ; qu'ils demandent avec une
perpétuelle instance à son très doux Cœur, victime de sa très ardente
charité envers nous, d'attirer tout à lui par les liens de son amour, et
de faire que tous les hommes, enflammés de son très saint amour,
marchent dignement selon son Cœur, agréables à Dieu en tout, portant
des fruits en toutes sortes de bonnes œuvres. Et, comme les prières des
hommes sont indubitablement plus agréables à Dieu quand elles lui
parviennent avec des cœurs purs de toute corruption, Nous avons pensé à
ouvrir avec une libéralité apostolique aux fidèles chrétiens les célèbres
trésors de l'Église dont la distribution Nous est confiée, afin que ces
mêmes fidèles excités plus vivement à la vraie piété, et purifiés
des taches de leurs péchés par le Sacrement de Pénitence, répandent
avec plus de confiance leurs prières à Dieu et obtiennent sa miséricorde
et sa grâce.
18 - En conséquence, par les présentes Lettres, en vertu de notre
Autorité Apostolique, à tous et chacun des fidèles des deux sexes dans
l'univers catholique, Nous accordons une Indulgence plénière en forme de
Jubilé, à gagner durant toute l'année à venir 1865 et non au delà,
dans l'espace d'un mois à désigner par vous, Vénérables Frères, et
les autres Ordinaires légitimes des lieux, en la même manière et forme
exactement que Nous l'avons accordée, au commencement de Notre suprême
Pontificat, par Nos Lettres Apostoliques en forme de Bref du 20 novembre
1846, envoyée à tout votre Ordre épiscopal de l'univers, et commençant
par ces mots : " Arcano Divinae Providentiae consilio "
et avec tous les mêmes pouvoirs accordés par Nous dans ces Lettres. Nous
voulons cependant que toutes les prescriptions contenues dans les susdites
lettres soient observées, et que soient maintenues toutes les exceptions
que Nous avons mentionnées. Nous accordons cela nonobstant toutes
dispositions contraires, même celles qui seraient dignes d'une mention et
d'une dérogation spéciales et individuelles. Et pour écarter tout doute
et toute difficulté, Nous vous avons fait parvenir un exemplaire de ces
Lettres.
19 - Prions, Vénérables Frères, " du fond du cœur et de
toute notre âme la miséricorde de Dieu, parce qu'il a lui-même ajouté :
Je n'éloignerai pas d'eux ma miséricorde. Demandons et nous recevrons,
et si nous attendons et que nous tardions à recevoir à cause de la
gravité de nos offenses, frappons ; car à celui qui frappe on
ouvrira, pourvu que nous frappions à la porte avec nos prières, nos gémissements
et nos larmes, avec lesquels il faut insister et persévérer, et pourvu
que notre prière soit unanime... que chacun prie Dieu non seulement pour
lui-même mais pour tous ses frères, comme le Seigneur nous a enseigné
à prier " (11). Et pour que Dieu exauce plus facilement Nos prières
et Nos vœux, les vôtres et ceux de tous les fidèles, faisons participer
en toute confiance auprès de lui l'Immaculée et très sainte Mère de
Dieu, la Vierge Marie qui a détruit toutes les hérésies dans le monde
entier, et qui, Notre Mère très aimante à tous, " est toute
suave... et pleine de miséricorde... se montre exorable à tous, très clémente
à tous, compatit aux misères de tous avec la plus large affection "
(12). Comme Reine, debout à la droite de Son Fils Unique, notre Seigneur
Jésus-Christ, toute enveloppée dans un vêtement d'or, il n'y a rien
qu'Elle ne puisse obtenir de Lui.
Demandons aussi les suffrages du Bienheureux Pierre, Prince des Apôtres,
de son Coapôtre Paul, et de tous les Saints du Ciel qui devenus amis de
Dieu, sont parvenus au royaume céleste, possèdent la couronne et la
palme, et sûrs de leur immortalité, sont soucieux de notre salut.
20 - Enfin, demandant pour vous à Dieu de toute Notre âme l'abondance de
tous les dons célestes, Nous donnons du fond du cœur et avec amour, en
gage de Notre particulière affection, la Bénédiction Apostolique à
vous-mêmes, Vénérables Frères, et à tous les fidèles clercs et laïcs
confiés à vos soins.
Donné à Rome, près Saint-Pierre, le 8 décembre de l'année 1864, dixième
depuis la Définition Dogmatique de l'Immaculée Conception de la Vierge
Marie Mère de Dieu. Et de Notre Pontificat la dix-neuvième.
(1) Grégoire XVI, Encyclique Mirari Vos du 15 août
1832.
(2) Grégoire XVI. Encyclique Mirari Vos du 15 août 1832.
(3) Saint Augustin, Lettre 105.
(4) Saint Léon, Lettre 164.
(5) Saint Ignace, martyr, à Philadelphe.
(6) Psaume 143.
(7) Saint Célestin, Lettre 22 au Synode d'Éphèse.
(8) Saint Innocent I, Lettre 29 au Concile Épiscopal de Carthage.
(9) Saint Léon, Lettre 156.
(10) Pie VII, encyclique Diu satis, 15 mai 1800.
(11) Saint Cyprien, Lettre 11.
(12) Saint Bernard, Sermon sur les douze prérogatives de la
Bienheureuse Vierge Marie d'après l'Apocalypse.
PIE IX, PAPE
|