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Quo graviora,
lettre apostolique du pape Léon XII, 1826 |
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Quo graviora,
lettre apostolique du pape Léon XII
condamnant les sociétés
secrètes,
la franc-maçonnerie
et la libre-pensée,
13 mars
1826.
par Marc Nadaux
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Successeur de Pie VII
sur le trône
de Saint Pierre, Léon XII apparaît comme "le pape de la Sainte
Alliance". Soucieux de restaurer l'ordre dans les États pontificaux,
il s'inquiète du développement des sociétés secrètes et lutte
activement contre les menées des patriotes carbonari. Cette lettre
encyclique est donc révélatrice de son hostilité au libéralisme. Léon
XII s'inscrit également dans la lignée de ses prédécesseurs du XVIIIème
siècle à qui il se joint pour condamner la franc-maçonnerie
et la libre-pensée. |
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LETTRE APOSTOLIQUE
DE N. S. P. LE PAPE LÉON XII
______
CONDAMNATION
DE LA SOCIÉTÉ DITE DES FRANCS-MAÇONS
ET DES AUTRES SOCIÉTÉS SECRÈTES
LÉON, ÉVÊQUE.
SERVITEUR DES SERVITEURS DE DIEU.
Pour en conserver le perpétuel souvenir.
Plus sont grands les désastres qui menacent le
troupeau de Jésus Christ, notre Dieu et Sauveur, plus doit redoubler,
pour les détourner, la sollicitude des Pontifes Romains auxquels, dans la
personne de saint Pierre, prince des apôtres, ont été conférés le
pouvoir et le soin de conduire ce même troupeau. C'est à eux, en effet,
comme étant placés au poste le plus élevé de l'Église, qu'il
appartient de découvrir de loin les embûches préparées par les ennemis
du nom chrétien pour exterminer l'Église de Jésus Christ (ce à quoi
ils ne parviendront jamais) : c'est à eux qu'il appartient tantôt
de signaler aux fidèles et de démasquer ces embûches, afin qu'ils s'en
gardent, tantôt de les détourner et de les dissiper de leur propre
autorité.
Les Pontifes Romains, Nos prédécesseurs, ayant compris qu'ils avaient
cette grande tâche à remplir, veillèrent toujours comme de bons
pasteurs, et s'efforcèrent, par des exhortations, des enseignements, des
décrets, et en exposant même leur vie pour le bien de leurs brebis, de réprimer
et de détruire entièrement les sectes qui menaçaient l'Église d'une
ruine complète. Le souvenir de cette sollicitude pontificale ne se
retrouve pas seulement dans les anciennes annales ecclésiastiques, on en
retrouve d'éclatantes preuves dans ce qui a été fait de nos jours et du
temps de nos pères par les Pontifes Romains, pour s'opposer aux
associations secrètes des ennemis de Jésus Christ ; car Clément
XII, Notre prédécesseur, ayant vu que la secte dite des Francs-Maçons,
ou appelée d'un autre nom, acquérait chaque jour une nouvelle force, et
ayant appris avec certitude, par de nombreuses preuves, que cette secte était
non seulement suspecte mais ouvertement ennemie de l'Église catholique,
la condamna par une excellente constitution qui commence par ces mots :
In eminenti publiée le 28 avril 1738.
Cette Bulle ne parut pas suffisante à Notre prédécesseur d'heureuse mémoire,
Benoît XIV, car le bruit s'était répandu que Clément XII étant mort,
la peine d'excommunication portée par sa Bulle était sans effet, puisque
cette Bulle n'avait pas été expressément confirmée par son successeur.
Sans doute il était absurde de prétendre que les Bulles des anciens
Pontifes dussent tomber en désuétude si elles n'étaient pas approuvées
expressément par leurs successeurs, et il était évident que Benoît XIV
avait ratifié la Bulle publiée par Clément XII. Cependant, pour ôter
aux sectaires jusqu'au moindre prétexte, Benoît XIV publia une nouvelle
Bulle commençant ainsi : Providas, et datée du 18 mars 1751 ;
dans cette Bulle, il rapporta et confirma textuellement et de la manière
la plus expresse celle de son prédécesseur.
Plût à Dieu que ceux qui avaient le pouvoir en main eussent su apprécier
ces décrets autant que l'exigeait le salut de la religion et de l'État !
Plût à Dieu qu'ils eussent été convaincus qu'ils devaient voir dans
les Pontifes Romains, successeurs de saint Pierre, non seulement les
pasteurs et les chefs de l'Église catholique, mais encore les plus fermes
appuis des gouvernements et les sentinelles les plus vigilantes pour découvrir
les périls de la société ! Plût à Dieu qu'ils eussent employé
leur puissance à combattre et à détruire les sectes dont le Siège
Apostolique leur avait découvert la perfidie ! Ils y auraient réussi
dès lors ; mais, soit que ces sectaires aient eu l'adresse de cacher
leurs complots, soit que, par une négligence ou une imprudence coupable,
on eût présenté la chose comme peu importante et devant être négligée,
les Francs-Maçons ont donné naissance à des réunions plus
dangereuses encore et plus audacieuses.
On doit placer à leur tête celle des Carbonari, qui paraîtrait
les renfermer toutes dans son sein, et qui est la plus considérable en
Italie et dans quelques autres pays. Divisée en différentes branches et
sous des noms divers, elle a osé entreprendre de combattre la religion
catholique et de lutter contre l'autorité légitime. Ce fut pour délivrer
l'Italie et les autres pays, et spécialement les États du Souverain
Pontife, de ce fléau qui avait été apporté par des étrangers dans le
temps où l'autorité pontificale était entravée par l'invasion, que Pie
VII, Notre prédécesseur d'heureuse mémoire, publia une Bulle, le 13
septembre 1821, commençant par ces mots : Ecclesiam a Jesu
Christo. Elle condamne la secte dite des Carbonari sous les
peines les plus graves, sous quelque dénomination et dans quelque pays
qu'elle existe.
Il y avait peu de temps que cette Bulle avait été publiée par Pie VII,
lorsque Nous avons été appelé, malgré la faiblesse de nos mérites, à
lui succéder au Saint Siège. Nous Nous sommes aussitôt appliqué à
examiner l'état, le nombre et la force de ces associations secrètes et
Nous avons reconnu facilement que leur audace s'était accrue par les
nouvelles sectes qui s'y sont rattachées. Celle qu'on désigne sous le
nom d'Universitaire a surtout fixé notre attention ; elle a
établi son siège dans plusieurs universités, où des jeunes gens, au
lieu d'être instruits, sont pervertis par quelques maîtres, initiés à
des mystères qu'on pourrait appeler des mystères d'iniquité, et formés
à tous les crimes.
De là vient que si longtemps après que le flambeau de la révolte a été
allumé pour la première fois en Europe par les sociétés secrètes, et
qu'il a été porté au loin par ses agents, après les éclatantes
victoires remportées par les plus puissants princes et qui Nous faisaient
espérer la répression de ces sociétés ; cependant, leurs
coupables efforts n'ont pas encore cessé : car, dans les mêmes
contrées où les anciennes tempêtes paraissaient apaisées, n'a-t-on pas
à craindre de nouveaux troubles et de nouvelles séditions que ces sociétés
trament sans cesse ? N'y redoute-t-on pas les poignards impies dont
ils frappent en secret ceux qu'ils ont désignés à la mort ?
Combien de luttes terribles l'autorité n'a-t-elle pas eu à soutenir
malgré elle, pour maintenir la tranquillité publique ?
On doit encore attribuer à ces associations les affreuses calamités qui
désolent de toute part l'Église, et que Nous ne pouvons rappeler sans
une profonde douleur : on attaque avec audace ses dogmes et ses préceptes
les plus sacrés ; on cherche à avilir son autorité, et la paix
dont elle aurait le droit de jouir est non seulement troublée, mais on
pourrait dire qu'elle est détruite.
On ne doit pas s'imaginer que Nous attribuions faussement et par calomnie
à ces associations secrètes tous les maux et d'autres que Nous ne
signalons pas. Les ouvrages que leurs membres ont osé publier sur la
religion et sur la chose publique, leur mépris pour l'autorité, leur
haine pour la souveraineté, leurs attaques contre la divinité de Jésus-Christ
et l'existence même d'un Dieu, le matérialisme qu'ils professent, leurs
codes et leurs statuts, qui démontrent leurs projets et leurs vues,
prouvent ce que Nous avons rapporté de leurs efforts pour renverser les
princes légitimes et pour ébranler les fondements de l'Église ; et
ce qui est également certain, c'est que ces différentes associations,
quoique portant diverses dénominations, sont alliées entre elles par
leurs infâmes projets.
D'après cet exposé, Nous pensons qu'il est de Notre devoir de condamner
de nouveau ces associations secrètes, pour qu'aucune d'elles ne puisse prétendre
qu'elle n'est pas comprise dans Notre sentence apostolique et se servir de
ce prétexte pour induire en erreur des hommes faciles à tromper.
Ainsi, après avoir pris l'avis de Nos Vénérables Frères les Cardinaux
de la sainte Église Romaine, de Notre propre mouvement, de Notre science
certaine et après de mûres réflexions, Nous défendons pour toujours et
sous les peines infligées dans les Bulles de Nos prédécesseurs insérées
dans la présente et que Nous confirmons, Nous défendons, disons-Nous,
toutes associations secrètes, tant celles qui sont formées maintenant
que celles qui, sous quelque nom que ce soit, pourront se former à
l'avenir, et celles qui concevraient contre l'Église et toute autorité légitime
les projets que Nous venons de signaler.
C'est pourquoi Nous ordonnons à tous et à chaque chrétien, quels que
soient leur état, leur rang, leur dignité ou leur profession, laïques
ou prêtres, réguliers ou séculiers, sans qu'il soit nécessaire de les
nommer ici en particulier, et, en vertu de la sainte obéissance, de ne
jamais se permettre, sous quelque prétexte que ce soit, d'entrer dans les
susdites sociétés, de les propager, de les favoriser ou de les recevoir
ou cacher dans sa demeure ou autre part, de se faire initier à ces sociétés
dans quelque grade que ce soit, de souffrir qu'elles se rassemblent ou de
leur donner des conseils ou des secours ouvertement ou en secret,
directement ou indirectement, ou bien d'engager d'autres, de les séduire,
de les porter ou de les persuader à se faire recevoir ou initier dans ces
sociétés, dans quelque grade que ce soit, ou d'assister à leurs réunions,
ou de les aider ou favoriser de quelque manière que ce soit ; au
contraire, qu'ils se tiennent soigneusement éloignés de ces sociétés,
de leurs associations, réunions ou assemblées, sous peine
d'excommunication dans laquelle ceux qui auront contrevenu à cette défense
tomberont par le fait même, sans qu'ils puissent jamais en être relevés
que par Nous ou Nos successeurs, si ce n'est en danger de mort.
Nous ordonnons en outre à tous et à chacun, sous peine de
l'excommunication réservée à Nous et à Nos successeurs, de déclarer
à l'évêque et aux autres personnes que cela concerne, dès qu'ils en
auront connaissance, si quelqu'un appartient à ces sociétés ou s'est
rendu coupable de quelques-uns des délits susmentionnés.
Nous condamnons surtout et Nous déclarons nul le serment impie et
coupable par lequel ceux qui entrent dans ces associations s'engagent à
ne révéler à personne ce qui regarde ces sectes, et à frapper de mort
les membres de ces associations qui feraient des révélations à des supérieurs
ecclésiastiques ou laïques. N'est-ce pas, en effet, un crime que de
regarder comme un lien obligatoire, un serment, c'est-à-dire un acte qui
doit se faire en toute justice, et où l'on s'engage à commettre un
assassinat, et à mépriser l'autorité de ceux qui, étant chargés du
pouvoir ecclésiastique ou civil, doivent connaître tout ce qui est
important pour la religion et la société, et ce qui peut porter atteinte
à leur tranquillité ? N'est-ce pas indigne et inique de prendre
Dieu à témoin de pareils attentats ? Les Pères du Concile de
Latran ont dit avec beaucoup de sagesse (can. 3) " qu'il ne faut
pas considérer comme serment, mais plutôt comme parjure tout ce qui a été
promis au détriment de l'Église et contre les règles de la tradition. "
Peut-on tolérer l'audace ou plutôt la démence de ces hommes qui,
disant, non seulement en secret, mais hautement, qu'il n'y a point de
Dieu, et le publiant dans leurs écrits, osent cependant exiger en son nom
un serment de ceux qu'ils admettent dans leur secte ?
Voilà ce que Nous avons arrêté pour réprimer et condamner toutes les
sectes odieuses et criminelles. Maintenant, Vénérables Frères,
Patriarches, Primats, Archevêques et Évêques, Nous demandons, ou plutôt
Nous implorons votre secours ; donnez tous vos soins au troupeau que
le Saint-Esprit vous a confié en vous nommant évêques de son Église.
Des loups dévorants se précipiteront sur vous et n'épargneront pas vos
brebis. Soyez sans crainte, et ne regardez pas votre vie comme plus précieuse
que vous-mêmes. Soyez convaincus que la constance de vos troupeaux dans
la religion et dans le bien dépend surtout de vous ; car, quoique
nous vivions dans des jours mauvais et où plusieurs ne supportent pas la
saine doctrine, cependant beaucoup de fidèles respectent encore leurs
pasteurs, et les regardent avec raison comme les ministres de Jésus-Christ
et les dispensateurs de ses mystères. Servez-vous donc, pour l'avantage
de votre troupeau, de cette autorité que Dieu vous a donnée sur leurs âmes
par une grâce signalée. Découvrez-leur les ruses des sectaires et les
moyens qu'ils doivent employer pour s'en préserver. Inspirez-leur de
l'horreur pour ceux qui professent une doctrine perverse, qui tournent en
dérision les mystères de notre religion et les préceptes si purs de Jésus-Christ,
et qui attaquent la puissance légitime. Enfin, pour Nous servir des
paroles de Notre prédécesseur Clément XIII, dans sa Lettre encyclique A
quo die à tous les Patriarches, Primats, Archevêques et Évêques de
l'Église catholique, en date du 14 septembre 1758 :
" Pénétrons-nous, je vous en conjure, de la force de l'Esprit
du Seigneur, de l'intelligence et du courage qui en sont le fruit, afin de
ne pas ressembler à ces chiens qui ne peuvent aboyer, laissant nos
troupeaux exposés à la rapacité des bêtes des champs. Que rien ne nous
arrête dans le devoir où nous sommes de souffrir toutes sortes de
combats pour l'amour de Dieu et le salut des âmes. Ayons sans cesse
devant les yeux celui qui fut aussi, pendant sa vie, en butte à la
contradiction des pécheurs ; car si nous nous laissons ébranler par
l'audace des méchants, c'en est fait de la force de l'épiscopat, de
l'autorité sublime et divine de l'Église. Il ne faut plus songer à être
chrétiens si nous en sommes venus au point de trembler devant les menaces
ou les embûches de nos ennemis. "
Princes catholiques, Nos très chers fils en Jésus Christ, pour qui Nous
avons une affection particulière, Nous vous demandons avec instance de
venir à Notre secours. Nous vous rappellerons ces paroles que Léon le
Grand, notre prédécesseur et dont Nous portons le nom, quoique indigne
de lui être comparé, adressait à l'empereur Léon : " Vous
devez sans cesse vous rappeler que la puissance royale ne vous a pas
seulement été conférée pour gouverner le monde, mais encore et
principalement pour prêter main forte à l'Église, en comprimant les méchants
avec courage, en protégeant les bonnes lois, en rétablissant l'ordre
dans toutes les choses où il a été troublé ". Les
circonstances actuelles sont telles que vous avez à réprimer ces sociétés
secrètes, non seulement pour défendre la religion catholique, mais
encore pour votre propre sûreté et pour celle de vos sujets. La cause de
la religion est aujourd'hui tellement liée à celle de la société,
qu'on ne peut plus les séparer ; car ceux qui font partie de ces
associations ne sont pas moins ennemis de votre puissance que de la
religion. Ils attaquent l'une et l'autre et désirent également les voir
renversées ; et s'ils le pouvaient, ils ne laisseraient subsister ni
la religion ni l'autorité royale.
Telle est la perfidie de ces hommes astucieux, que, lorsqu'ils forment des
vœux secrets pour renverser votre puissance, ils feignent de vouloir l'étendre.
Ils essaient de persuader que Notre pouvoir et celui des évêques doit être
restreint et affaibli par les princes, et qu'il faut transférer à
ceux-ci les droits, tant de cette Chaire apostolique et de cette Église
principale, que des évêques appelés à partager Notre sollicitude.
Ce n'est pas la haine seule de la religion qui anime leur zèle, mais
l'espoir que les peuples soumis à votre empire, en voyant renverser les
bornes posées dans les choses saintes par Jésus-Christ et son Église,
seront amenés facilement par cet exemple à changer ou à détruire aussi
la forme du gouvernement.
Vous aussi, Fils chéris, qui professez la religion catholique, Nous vous
adressons particulièrement Nos prières et Nos exhortations. Évitez avec
soin ceux qui appellent la lumière ténèbres et les ténèbres lumière.
En effet, quel avantage auriez-vous à vous lier avec des hommes qui ne
tiennent aucun compte ni de Dieu ni des puissances, qui leur déclarent la
guerre par des intrigues et des assemblées secrètes, et qui, tout en
publiant tout haut qu'ils ne veulent que le bien de l'Église et de la
société, prouvent par toutes leurs actions qu'ils cherchent à porter le
trouble partout et à tout renverser ? Ces hommes sont semblables à
ceux à qui l'apôtre saint Jean ordonne de ne pas donner l'hospitalité,
et qu'il ne veut pas qu'on salue (IIe Épître, v. 10) ;
ce sont les mêmes que nos pères appelaient les premiers nés du démon.
Gardez-vous donc de leurs séductions et des discours flatteurs qu'ils
emploieront pour vous faire entrer dans les associations dont ils font
partie. Soyez convaincus que personne ne peut être lié à ces sociétés
sans se rendre coupable d'un péché grave : fermez l'oreille aux
paroles de ceux qui, pour vous attirer dans leurs assemblées, vous
affirmeront qu'il ne se commet rien de contraire à la raison et à la
religion, et qu'on n'y voit et n'y entend rien que de pur, de droit et
d'honnête. D'abord ce serment coupable dont Nous avons parlé, et qu'on
prête même dans les grades inférieurs, suffit pour que vous compreniez
qu'il est défendu d'entrer dans ces premiers grades et d'y rester ;
ensuite, quoique l'on n'ait pas coutume de confier ce qu'il y a de plus
compromettant et de plus criminel à ceux qui ne sont pas parvenus à des
grades éminents, il est cependant manifeste que la force et l'audace de
ces sociétés pernicieuses s'accroissent en raison du nombre et de
l'accord de ceux qui en font partie. Ainsi ceux qui n'ont pas passé les
rangs inférieurs doivent être considérés comme les complices du même
crime, et cette sentence de l'apôtre (Épître aux Romains, ch. 1)
tombe sur eux : " Ceux qui font ces choses sont dignes de
mort, et non seulement ceux qui les font, mais même ceux qui s'associent
à ceux qui s'en rendent coupables ".
Enfin, Nous Nous adressons avec affection à ceux qui, malgré les lumières
qu'ils avaient reçues, et la part qu'ils avaient eue au don céleste et
aux grâces de l'Esprit-Saint, ont eu le malheur de se laisser séduire et
d'entrer dans ces associations, soit dans les rangs inférieurs, soit dans
les degrés plus élevés. Nous qui tenons la place de Celui qui a déclaré
qu'il n'était pas venu appeler les justes mais les pêcheurs, et qui
s'est comparé au pasteur qui, abandonnant le reste de son troupeau,
cherche avec inquiétude la brebis qu'il a perdue, Nous les pressons et
Nous les prions de revenir à Jésus Christ. Sans doute ils ont commis un
grand crime, cependant ils ne doivent point désespérer de la miséricorde
et de la clémence de Dieu et de son Fils Jésus Christ ; qu'ils
rentrent dans les voies du Seigneur, il ne les repoussera pas ; mais
semblable au père de l'enfant prodigue, il ouvrira ses bras pour les
recevoir avec tendresse. Pour faire tout ce qui est en Notre pouvoir et
pour leur rendre plus facile le chemin de la pénitence, Nous suspendons
pendant l'espace d'un an après la publication de ces Lettres apostoliques
dans le pays qu'ils habitent, l'obligation de dénoncer leurs frères, et
Nous déclarons qu'ils peuvent être relevés de ces censures, même en ne
dénonçant pas leurs complices, par tout confesseur approuvé par les
Ordinaires des lieux qu'ils habitent.
Nous usons également de la même indulgence à l'égard de ceux qui
demeurent à Rome. Si quelqu'un (ce qu'à Dieu ne plaise !) était
assez endurci pour ne pas abandonner ces sociétés dans le temps que Nous
avons prescrit, il sera tenu de dénoncer ses complices, et il sera sous
le poids des censures s'il revient à résipiscence après cette époque ;
il ne pourra obtenir l'absolution qu'après avoir dénoncé ses complices,
ou au moins juré de les dénoncer le plus tôt possible. Cette absolution
ne pourra être donnée que par Nous, Nos successeurs ou ceux qui auront
obtenu du Saint-Siège la faculté de relever de ces censures.
Nous voulons que les exemplaires imprimés du présent Bref apostolique,
lorsqu'ils seront signés de la main d'un notaire public et munis du sceau
d'un dignitaire de l'Église, obtiennent la même foi que l'original.
Que personne ne se permette d'enfreindre ou de contredire Notre présente
déclaration, condamnation, ordre, défense, invocation, réquisition, décret
et volonté. Si, néanmoins, quelqu'un se le permettait, qu'il sache qu'il
s'attire par là la colère du Dieu tout-puissant et des saints apôtres
Pierre et Paul.
Donné à Rome, près Saint-Pierre, l'année de l'Incarnation de
Notre-Seigneur 1825, le 3 des ides de Mars (13 mars), de notre Pontificat
l'an II.
(Cette bulle est daté suivant
l'ancien usage de la chancellerie romaine, qui commençait les années de
l'Incarnation au 25 mars ; ainsi sa date répond au 13 mars de l'année
1826.)
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