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Charles TELLIER
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Charles TELLIER
(Amiens,
19
juin 1828 - Paris,
1913)
Français.
Physicien.
par Marc Nadaux
Quelques dates :
1856, création d’une machine
frigorifique à circulation de gaz ammoniac.
1868, une « armoire à conservation » est installée sur un
navire anglais en partance vers l’Argentine, le City of
Rio de Janeiro.
1876, un petit navire à vapeur, Le Frigorifique, dont
les cales sont aménagées en chambre froide fait la traversée
de l'Atlantique.
1908, à la Sorbonne, le " Père du Froid " est honoré lors
d'un Congrès international.
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Le
19 juin 1828, naît à Amiens, dans le département de la Somme, Charles
Tellier. Il est le fils d’un industriel normand, fondateur et directeur
d’une importante filature située à Condé-sur-Noireau. Le jeune homme
se destine à prendre un jour sa succession, mais la manufacture, fragilisée
par la crise économique qui sévit en 1847, doit fermer sous la Seconde République.
Tout ceci remet en cause l’avenir professionnel, comme la sécurité matérielle
de Charles Tellier. Loin de le décourager, l’événement le pousse à
suivre une toute autre voie, celle de la recherche en laboratoire, à des
fins industrielles. Charles Tellier se préoccupe tout d’abord de
l’ammoniaque, puis de la mise au point d’un engrais. Sous le Second
Empire, à l’heure des grands travaux parisiens et de la réalisation
d’un réseau d’égouts, il s’intéresse à l’utilisation
domestique de l’air comprimé. Au baron Haussmann, devenu préfet de la
Seine, au printemps 1853, il présente ainsi un projet de canalisations
souterraines permettant de distribuer dans les foyers parisiens une force
motrice. Celui-ci n’est pas retenu par la haute administration, mais le
haut fonctionnaire conseille néanmoins à Charles Tellier de se préoccuper
du problème de la fabrication du froid.
Ses mérites lorsqu’il
s’agit de conserver des denrées alimentaires sont connus depuis
longtemps. Cependant, seule la glace, recueillie pendant l’hiver à la
surface des étangs et des lacs gelés, puis conservée dans les
profondeurs du sol dans des caves aménagées - les glacières -, est
utilisée. L’isolation de la terre permet en effet de garder pendant très
longtemps – jusqu’à deux années - ces blocs remontés à la surface
aux moments des chaleurs de l’été. En 1845, l’Anglais Michael Faraday obtient artificiellement une température de – 11°
C., avant que ne soit utilisée en France la technique de la liquéfaction
de l’acide carbonique. En 1856, Charles Tellier se met à l’œuvre. En
réutilisant ses travaux antérieurs, il obtient des résultats probants
deux années plus tard, avec la création d’une machine frigorifique à
circulation de gaz ammoniac. C’est tout simplement la première du genre !
Il faut attendre cependant 1865 pour que soit mise au point un autre
appareil, cette fois-ci à compression mécanique, aussitôt installé
dans les usines du maître-chocolatier Meunier.
A l’époque
cependant, les travaux de Louis Pasteur sur la fermentation et la
conservation des produits alimentaires sont rendus publics. Ceci donne à Charles
Tellier l’idée d’utiliser son invention
à d’autres fins. Grâce à la réfrigération et à la dessiccation, il
pense ainsi pouvoir stopper le développement des germes et la décomposition
des matières organiques. A l’heure des grands voyages transatlantiques,
son ambition est maintenant d’assurer à l’Europe un approvisionnement
régulier en denrée alimentaire. Au printemps 1868, à l’initiative de Charles
Tellier, une « armoire à conservation » est installée sur un
navire anglais en partance vers l’Argentine, le City of Rio de
Janeiro. Après vingt-trois jours de traversée, la viande américaine
parvient à bon port en Europe et dans un état qui permet sa
consommation. L’événement est de taille, mais la guerre
franco-prussienne vient interrompre la mise en œuvre de ses projets.
Ce n’est qu’en 1874 que l’Académie des Sciences dépêche auprès
de l’inventeur une commission chargée d’examiner les résultats de
ses travaux. Après huit mois passés à Auteuil, celle-ci conclut au succès
complet de Charles Tellier. Ce dernier cherche alors à donner davantage
de publicité à sa réalisation par une démonstration publique. Il équipe
ainsi à ses frais un petit navire à vapeur, rebaptisé Le
Frigorifique, dont les cales sont aménagées en chambre froide grâce
à l’installation de machines frigorifiques fonctionnant à l’éther méthylique.
Celui-ci quitte le port de Rouen, le 30 septembre 1876, avec à son bord
toute une cargaison de viandes. A la suite d’une avarie cependant, Le
Frigorifique doit faire escale à Lisbonne et ce n’est qu’après
cent cinq jours de traversée qu’il parvient à Buenos Aires, le 23 décembre
suivant. Les denrées alimentaires venues de France sont intactes !
Avec celles-ci, un banquet est organisé peu après à bord du navire,
auquel sont conviées les autorités locales. Charles Tellier triomphe.
En France cependant, la Grande Dépression fait peser sur l’agriculture
française et les campagnes une menace. Analysant plus tard à la Chambre
des députés les causes de cette crise, le ministre Jules Méline en
attribuera la responsabilités " à l’entrée en ligne sur les
marchés d’Europe de peuple jeunes " grâce " au développement
des moyens de communication ". Touché par la baisse des revenus
de la terre, le puissant lobby agrarien combat dès lors les initiatives
de l’inventeur français. Celui-ci doit de plus faire face aux
imperfections de son système de réfrigération, son coût prohibitif
notamment, le délai important pris par les temps de chargement et de déchargement
à quai également. Dans un premier temps, on songe en effet faciliter la
circulation de l’air et convenablement réfrigérer la viande en isolant
chaque carcasse dans une chambre particulière. Aussi Le Frigorifique,
dont la rentabilité s’avère douteuse, est bientôt vendue aux enchères.
Dans les décennies qui suivent, de nombreux perfectionnements sont apportés
au système inventé par Charles Tellier, en Angleterre notamment. Au
tournant du siècle, plus de trois cent navires « réfrigérés »
sont ainsi présents dans les ports outre-Manche. En France, le « Père
du Froid » attendra 1908 pour que son œuvre soit enfin unanimement
reconnue. Cette année-là en effet, au mois d’octobre, dans le grand
amphithéâtre de la Sorbonne, un Congrès international est réuni afin
de saluer Charles Tellier et ses réalisations. Ce dernier s’était
pourtant employer à présenter au public, toujours avec un soucis pédagogique,
les mérites de son invention dans de multiples ouvrages : Le
Frigorifique, L’Ammoniaque dans l’industrie, La Glace
dans les campements militaires, Le Froid appliqué à la production
de la bière…
Charles
Tellier décède à Paris en 1913 dans le dénuement le plus complet,
tandis que de nos jours, le froid réfrigéré a définitivement révolutionné
la vie quotidienne, ainsi que les habitudes de consommation.
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