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Giovanni Maria
MASTAI-FERRETI,
PIE IX
(Sebigallia, 13 mai 1792
- Rome, 7 février 1878)
Italien.
Religieux.
par Marc Nadaux
Quelques dates :
1819, ordonné prêtre.
1827, nommé archevêque de Spolète.
1840, élevé à la dignité de cardinal.
1846,
élu par le conclave, prend alors le nom de Pie IX.
1848,
accorde une constitution dans les Etats de l'Eglise.
1849, quitte Rome sous un déguisement et se
réfugie à Gaète.
1854, proclame le dogme de l’Immaculée Conception dans la
bulle Ineffabilis Deus.
1859, les États du pape sont annexés par le Royaume voisin
de Piémont-Sardaigne.
1864, Syllabus errorum.
1870, Rome, la cité du pape, est la nouvelle capitale du
royaume d’Italie.
la constitution Pastor
aeternus proclame le dogme de l’infaillibilité
pontificale en matières de foi et de morale.
1875, s’oppose par l’encyclique Quod nunquam
au Kulturkampf , le " combat pour la civilisation " initié
par le chancelier Bismarck en Allemagne.
2000, béatifié.
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Giovanni Maria
Mastai-Ferretti est né à Sebigallia en Italie le 13 mai 1792. Après
avoir effectué des études secondaires classiques au collège de Volterra
en Toscane de 1802 à 1809, il fait le choix d’une carrière ecclésiastique.
Giovanni Mastai part alors pour Rome étudier la philosophie et la théologie.
Cette formation est bientôt interrompue par les événements politiques.
Sa santé déficiente, le jeune homme souffre en effet de crises d’épilepsie,
est également à l’époque une source d’inquiétudes. Cependant en
1814, il intègre le séminaire de Rome et achève ainsi sa formation au
canonicat. Le 10 avril 1819, Giovanni Mastai est ordonné prêtre. Il est
âgé de 27 ans.
Le pape Pie VII le remarque et le nomme bientôt à Rome directeur
spirituel de l’asile d’orphelin. Puis, en 1823, Giovanni Mastai est
envoyé au Chili auprès du délégué apostolique, monseigneur Muzi, où
il occupe la charge d’auditeur. De retour dans les États pontificaux en
1825, le nouveau pape Léon XII lui confie la direction de l’hôpital
saint Michel. Il gravit ensuite rapidement les différents échelons de la
hiérarchie ecclésiastique. Le 21 mai 1827, il est nommé archevêque de
Spolète puis évêque d’Imola le 17 février 1832. Le 14 décembre
1840, monseigneur Mastai est élevé à la dignité de cardinal. Enfin le
14 juin 1846, à la mort de Grégoire XVI, il est élu par le conclave qui
s'est réuni à l’âge de 48 ans. Le nouveau chef spirituel de la chrétienté
prend alors le nom de Pie IX.
Pie IX bénéficie à cette époque d’une grande popularité au sein de
la population italienne. En effet, quelques années plus tôt en 1831,
l’archevêque de Spolète s’était interposé entre les patriotes
carbonari et l’armée autrichienne se préparant à réprimer une
insurrection. Les premières années de son pontificat sont d’ailleurs
marquées par des mesures libérales qui s’opposent aux méthodes
brutales de Grégoire XVI et de son secrétaire d’État, le cardinal
Lambruschini. Pie IX octroie ainsi par un décret publié le 16 juillet
1846 une amnistie générale dont il fait bénéficier les exilés et les
prisonniers politiques. Il confie la censure à une commission laïque. Le
nouveau pape rompt également avec les pratiques despotiques de ses prédécesseurs
dans les États pontificaux. En 1847, il établit ainsi une Consulta, un
conseil consultatif composé de laïcs dont le rôle est de lui
transmettre les désirs de la population. S’y s’adjoint auprès de lui
un conseil de cabinet puis une garde civique. Cette période est également
celle de l’entrée dans la modernité pour les États pontificaux. Pie
IX encourage la construction de réseaux ferrés et télégraphiques. Il
autorise la création de sociétés de lecture.
Ce mouvement réformiste qu’il contribue à amorcer par ses choix
personnels lui attire bientôt la sympathie des militants nationalistes de
la mouvance néo–guelfe qui voit en lui le personnage capable enfin de fédérer
les énergies en vue de réaliser l’unité italienne. L’équivoque se
dissipe rapidement. En 1848, le " printemps des peuples "
embrase l’Europe du Congrès de Vienne. Dans les États pontificaux,
l’insurrection populaire déstabilise rapidement le pouvoir temporel du
Saint Siège. Le 8 février, la rue contraint Pie IX à faire la promesse
de l’établissement d’un ministère qui tempérerait le caractère
despotique de son pouvoir temporel. Le 14 mars, Pie IX accorde également
une constitution. Cependant, il se montre réticent à apporter son appui
au mouvement des nationalités. Le 29 avril, le Père de la Chrétienté
proclame solennellement dans une allocution qu’il ne peut déclarer la
guerre à l’Empire autrichien catholique et condamne ainsi l'action
entreprise par Charles-Albert, roi du Piémont. Quelques temps plus tard,
le 15 novembre, le chef du gouvernement du Saint Siège, Pellegrino Rossi
est assassiné. Peu de temps après, la République romaine est proclamée.
Craignant dès lors pour sa sécurité, Pie IX quitte Rome sous un déguisement,
le 24 novembre. Il se réfugie à Gaète, une ville voisine située dans
le Royaume de Naples. De nombreux cardinaux le rejoignent alors dans son
exil tandis qu’à Rome, le 9 février 1849, le souverain pontife est déchu
de son pouvoir temporel.
Pie IX fait appel aux puissances étrangères. L’intervention d’un
corps expéditionnaire français débarqué le 25 avril à Civitavecchia
et placé sous le commandement du général Oudinot lui permet de retourner dans ses
États l'année suuvante. Il y mène une répression
impitoyable contre les républicains. Désormais son pouvoir se fait plus
autoritaire. Un nouveau secrétaire d’État, le cardinal Antonelli, est
désigné. Le revue des Jésuites, Civilta cattolica, est bientôt
créée. Elle devient rapidement l’organe officieux du Saint Siège,
donnant le ton de ce revirement vers l’ordre traditionnel.
Le pape Pie IX apparaît désormais comme un prélat réactionnaire
soucieux de préserver l’intégrité de sa puissance temporelle.
Cependant, ce gouvernement millénaire du souverain pontife sur les États
entourant Rome s’effrite au cours des deux décennies suivantes. La
papauté doit en effet compter sur les troupes autrichiennes et françaises
pour maintenir l’ordre dans ses États. En France, le coup d’État du
2 décembre 1851 conduit à la proclamation du Second Empire. A sa tête
l’empereur Napoléon III. Ce dernier rompt avec les traditions
diplomatiques des précédents souverains : il est favorable au
mouvement des nationalités. Napoléon III apporte bientôt son soutien au
roi de Piémont-Sardaigne, Victor–Emmanuel II, dont l’ambition est de
réaliser l’unité italienne en plaçant sous son autorité l’ensemble
des territoires de la péninsule. Le 21 juillet 1858, l’entrevue de
Plombières, par laquelle l’empereur des Français fait la rencontre du
premier ministre piémontais Cavour, scelle bientôt cette alliance.
Le 3 mai 1859, la France déclare la guerre à l’Autriche. Le 4 juillet
1859, la défaite de Magenta contraint les troupes autrichiennes à se
retirer des légations papales. Enfin après la déroute des troupes du
Saint Siège à Castelfidardo le 18 septembre puis à Ancône le 30
septembre, les États du pape sont définitivement annexés par le Royaume
voisin de Piémont-Sardaigne. Quelques années plus tard, la prise de
Rome, le 20 septembre 1870, constitue un aboutissement à l’unification
de la péninsule en faisant de la cité du pape la nouvelle capitale du
royaume d’Italie. Malgré le vote de la loi des Garanties, le 15 mai
1871, qui accorde au Saint Siège un revenu annuel, l’extraterritorialité
de quelques palais et les droits de souveraineté sur sa cité du Vatican,
le pape Pie IX se considère désormais comme prisonnier à l’intérieur
de Rome.
Dans l’Église, l’émotion est grande. En France, la politique
italienne de Napoléon III suscite l’indignation des catholiques pour
qui le pouvoir temporel du pape garantissait son indépendance
spirituelle. Pie IX apparaît alors comme " le pape-martyr ".
Cependant le prestige moral de la papauté et l’autorité spirituelle
qui en découle en sort renforcé. Mettant à profit cette nouvelle aura,
le souverain pontife intervient avec force dans la vie des Églises
nationales. Pie IX dénonce ainsi les persécutions dont font l’objet
les prêtres et les populations catholiques dans la Pologne soumise à la
Russie orthodoxe après l’insurrection de 1863. Il s’oppose bientôt
le 5 février 1875 par l’encyclique Quod nunquam au Kulturkampf ,
le " combat pour la civilisation " initié par le
chancelier Bismarck et qui vise à limiter le pouvoir de l’Église et à
laïciser l’État dans l’Empire allemand. Le pape apporte alors son
appui à l’évêque de Mayence, monseigneur Ketteler. Dans les autres États
européens où les populations sont en majorité de confession
protestante, l’autorité pontificale contribue également au renouveau
catholique. De nombreux évêchés sont créés aux États-Unis d’Amérique.
En Angleterre, la hiérarchie épiscopale est rétablie le 29 septembre
1850 avec l’érection de l’archidiocèse de Westminster, aux Pays-Bas
le 4 mars 1853 avec l’érection de l’archidiocèse d’Utrecht.
De nombreux concordats sont également signés par le Saint Siège avec
des États européens catholiques comme l’Espagne en 1851 et le Portugal
en 1857 ou d’Amérique du Sud comme le Costa Rica et le Guatemala en
1852, le Nicaragua en 1861, le Venezuela et l’Équateur en 1862 … Si
les relations qu’entretient la papauté avec l’Autriche de
l’empereur François–Joseph se détériorent, Pie IX jouit en France
du soutien de prélats influents, tel l’évêque de Poitiers monseigneur
Pie ; son ami Louis Veuillot et le journal L’Univers dont il
est le directeur se faisant le porte parole de l’ultramontanisme.
Avec le pontificat de Pie IX s’affirme donc l’autorité spirituelle du
pape au sein de l’Église. En France par exemple, sous la volonté du
souverain pontife relayée par dom Guéranger, la liturgie romaine
s’impose peu à peu. liturgie romaine s’impose peu à peu. Le concile
œcuménique du Vatican – le premier depuis le seizième siècle - qui
se réunit sur la requête de Pie IX de 1869 à 1871 sanctionne cette évolution.
En effet, le 18 juillet 1870, la constitution Pastor aeternus
proclame le dogme de l’infaillibilité pontificale en matières de foi
et de morale. Le pape acquiert désormais une prééminence absolue sur le
concile et les épiscopats nationaux. Pie IX, en omettant d’inviter les
représentant des États, travaille également à libérer le Saint
Siège de sa dépendance à l’égard des gouvernements. En France, il
doit pourtant faire face chez les catholiques à l’hostilité du courant
libéral et gallican. Celui – ci est porté par monseigneur Dupanloup,
évêque d’Orléans, et Charles de Montalembert qui mettent tous deux en
doute l’opportunité d’une telle décision. Ceux – ci s’inclinent
bientôt cependant.
Cette période est également celle d’un renouveau des formes de dévotion.
Le culte marial prend une nouvelle ampleur. Le 8 décembre 1854, Pie
IX proclame le dogme de l’Immaculée Conception dans la bulle Ineffabilis
Deus. Il donne ainsi une portée universelle à une ancienne tradition
selon laquelle Marie n’a jamais connu le mal. En France, la dévotion à
la Vierge remplace peu à peu le culte des saints chez les populations
rurales ce qui permet ainsi au clergé d’imposer des pratiques plus
d’orthodoxes. Les apparitions de la Salette en 1846 puis de Lourdes en
1858 sont à l’origine d’un développement des pèlerinages qui
accompagnent ce mouvement. En 1875, Pie IX invite également tous les fidèles
à consacrer leur vie au Sacré Cœur, le cœur charnel de Jésus symbole
de l’amour de Dieu pour les hommes. Cette dévotion fait dès lors
l’objet d’un nouvel intérêt. La construction d’une basilique
monumentale à Montmartre dans la capitale parisienne commencée la même
année en est le symbole le plus frappant.
Cependant le pontificat de Pie IX correspond également à une crispation
de la papauté devant l’évolution des sociétés européennes et des idées
du temps. L’industrialisation qui s’accélère au cours du siècle
voit se développer en Europe occidentale une classe ouvrière déracinée.
Celle – ci, ouverte au socialisme et à l’internationalisme marxiste,
s’éloigne des choses de la religion. La diffusion des travaux de
Charles Darwin sur l’origine des espèces et ceux d'Ernest Renan sur les
origines du christianisme, certaines de leurs affirmations remettent en
cause les interprétations traditionnelles de la Bible admises par l’Église.
L’idéologie scientiste et positiviste qui s’insinue chez les élites
bourgeoises est également synonyme de détachement. Pie IX entend répondre
à cette montée du laïcisme et bientôt de l’anticléricalisme. Dans
l’encyclique Quanta cura publiée le 8 décembre 1864, il affirme
sa volonté de condamner l’évolution du monde moderne. Lui est en effet
adjoint le Syllabus errorum, un catalogue de quatre-vingt
propositions jugées inacceptables parmi lesquelles figurent le
socialisme, le libéralisme, le rationalisme, la franc – maçonnerie…
Pie IX, le " pape martyr " fait également figure aux
yeux de ses contemporains de " pape de la réaction ".
Quelques années après avoir célébré son jubilé, le pape Pie IX
décède à Rome le 7 février 1878. Le processus de béatification commencé le 11
février 1907 abouti le 3 septembre 2000. Il reconnaît ainsi
l’importance de l’action de Pie IX et de son pontificat, le plus long
dans l’histoire de l’Église
depuis celui de saint Pierre …
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