Une jeunesse
choyée.
C'est le 15 mai
1773, à Coblence, que naît Klémens, Venceslas, Lothaire Metternich (on
l'aura noté : le futur Chancelier d'Autriche n'est pas un autrichien !). Sa mère est la fille du comte de
Kagenneg. Elle a tout juste 17 ans, mais est déjà presque une
célébrité dans la petite ville de Coblence. Son
père est le comte François-Georges de Metternich. Alors qu'il était
âgé de 22 ans, l'Électeur de Trèves l'avait nommé ministre
plénipotentiaire à Vienne. C'est un grand seigneur, possédant une
fortune importante, avec cependant un goût certain pour le faste. Un an
après la naissance de Klemens, il entre au service de l'Empereur, qui le
nomme aussitôt ministre plénipotentiaire auprès des cours électorales
de Trèves et de Cologne. Quatre ans plus tard, il aura le même poste,
mais auprès du Cercle du Bas-Rhin et de Westphalie.
Le jeune Klemens est élevé avec soin par ses parents, au coté de sa sœur
et de son jeune frère. Son père est très attentif à son éducation :
(...)
je suis satisfait aussi de ton style et de ton écriture. Seulement, je te
recommande d'éviter la répétition des mêmes pensées et des mêmes
expressions, et d'autre part je te conseillerai d'écrire en plus gros
caractères. Le temps ne nous porte que trop à rapetisser les lettres, et
comme ton écriture est très menue, tu finiras sûrement par devenir
illisible. Ce serait dommage, car j'espère que Clément écrira des
choses qui mériteront d'être lues.
Cette éducation,
elle est, bien sûre, chrétienne, mais (les idées de Rousseau aidant)
doublée d'une dose de laïcisme. Les deux maîtres de son âme sont donc
un abbé, de son nom Bertrand, et un instituteur, jacobin tolérant,
Frédéric Simon. Le 12
novembre 1788, les deux fils Metternich sont envoyés à l'Université de
Strasbourg, où vont également étudier le futur prince André
Rasoumovski., le général Tolstoï, Czernichev, autant de personnages que
Klemens Metternich croisera plus tard sur son chemin. Metternich
se souviendra plus tard, sans la moindre modestie, avoir été " un
bon enfant, laborieux, fort occupé de ses devoirs et de ses livres
".
Les évènements de 1790 ramènent le jeune Metternich en Allemagne. Non
pas, comme on pourrait le croire, ceux de la France en proie aux
convulsions révolutionnaires, mais l'élection de Léopold II, grand-duc
de Toscane, au trône d'Allemagne. Klemens assiste au couronnement, à
Francfort, le 9 octobre 1790, un spectacle " un des plus grandioses et
des plus magnifiques qu'on pût voir ". Mais il est vrai qu'il a été
choisi par l'Ordre des comtes catholiques de Westphalie pour être leur
Maître des cérémonies. Léopold
ayant nommé le comte Georges Metternich dans la principauté de Liège,
ses fils prennent le chemin de l'Université de Mayence. Leur père leur
écrit :
Je
vous recommande spécialement, à toi et à ton frère, de ne jamais
perdre de vue le but de votre séjour à l'Université : cultivez avec
ardeur les hautes études; sachez mériter l'estime et l'affection de tous
par votre bonne tenue et par votre politesse...
C'est à cette
époque qu'il rencontrera Mirabeau, l'abbé Maury et la future reine de
Prusse (la " Belle Louise "), la princesse Louise de Mecklembourg. Le
17 juin 1791, Clément rejoint son père à Bruxelles. Ce dernier a été
nommé ministre plénipotentiaire près le gouvernement général des
Pays-Bas, où l'Histoire va rattraper le jeune Metternich.
Le 20 avril 1792, la France déclare la guerre " au roi de Bohème et
de Hongrie ", le 20 septembre c'est Valmy suivi, le 6 novembre, de la
défaite autrichienne de Jemmapes. Les Autrichiens doivent évacuer les
Pays-bas. Mayence est bientôt occupé par les " sans-culottes ".
Le comte Metternich doit s'enfuir de Bruxelles et se retirer à Coblence.
Il revient bientôt à Bruxelles, après que les français aient reculés
face aux armées de l'Europe. Klemens, pour sa part, a assisté au siège
et à la prise de Valenciennes, remplissant quelques missions entre
Bruxelles et le front.
Carnot a réorganisé les armées française, et, bientôt, les coalisés
doivent de nouveau subir les défaites. Le 16 octobre 1793, la reine
Marie-Antoinette monte à l'échafaud. Le 26 août 1794, c'est la bataille
de Fleurus, qui décide une seconde fois du sort de la Belgique. C'est
à cette époque que Klemens Metternich fait paraître, de façon anonyme,
une brochure intitulée Sur la nécessité d'armer tout le peuple sur les
frontières française, dans laquelle il écrit notamment :
Pères
de famille et propriétaires, combattez dans les mêmes rangs que les
vaillants défenseurs de votre patrie, de vos princes, de votre
propriété. Devant vous, si vous êtes unis, fuiront les hordes de
brigands ; à vous se joindront les hommes bien pensants de tous les pays.
C'est à vous alors que l'Europe devra son salut et que les générations
futures devront leur repos.
Premier pas
diplomatiques.
Le 27 septembre
1795, Klemens Metternich épouse Éléonore von Kaunitz, la fille unique
du prince Ernest de Kaunitz et de la princesse de OEttingen. Curiosité de
l'Histoire, ce mariage a lieu au château d'Austerlitz, où, dix ans plus
tard, presque jour pour jour, Napoléon remportera sa plus belle victoire.
C'est ce qu'on appelle un mariage de convenance (Klemens est alors encore
épris de Marie-Constance de la Force), qui permet à Metternich de mener
une vie conforme à ses goûts. Éléonore lui donnera sept enfants. Les Metternich s'installent peu
après dans le palais Kaunitz, à Vienne, où Klemens fréquente la Cour,
y rencontrant par exemple le prince de Ligne.
En Europe, les évènements se précipitent. Un jeune général, du nom de
Bonaparte, mène les troupes françaises de victoires en victoire. Le 17
octobre 1797, la paix est signée à Campo-Formio. En novembre de la même
année, des négociations commencent, à Ratstatt. Près de 250 diplomates
et fonctionnaires sont rassemblés là, parmi lesquels le père de Klemens,
nommé pour la circonstance commissaire impérial, aux cotés de Cobenzl
et Lehrbach - les vrais négociateurs. Klemens est officiellement chargé
des intérêts des trente-quatre comtes du collège de Westphalie, et
arrive le 2 décembre. Il ne rencontrera pas ce jour là le futur
Napoléon : Bonaparte a quitté Ratstatt la veille.
Après s'être copieusement ennuyé à Ratstatt (son épouse le rejoignit
pourtant en juillet 1798), Klemens retournera à Vienne le 13 mars 1799,
peu avant que, le 28 avril, les représentants français Bonnier d'Arcq et
Roberjot soient assassinés par les impériaux. La
vie de Cour reprend. Metternich croise Pozzo di Borgo, et rencontre des
émigrés français dans le salon de la comtesse Rombeck. Et
c'est en février 1801 (le traité de Lunéville vient d'être signé) que
Klemens Metternich entre au service de l'Empereur, chargé de représenter
François II à la cour de la Saxe électorale. Le comte Trautmannsdorf a
remplacé la baron Thugut (il laissera bientôt sa place à Cobenzl) à la
tête du ministère des relations extérieures de l'Autriche.
Voilà donc Metternich à Dresde. L'Europe jouissant alors d'une période
de calme politique exceptionnel, Klemens va profiter pleinement de la vie
et le destin va lui faire rencontrer la d'une jeune femme de 18 ans, d'une
beauté rare, la princesse Bagration, épouse du général russe du même
nom. Qu'on se figure un jeune
visage, blanc comme l'albâtre, légèrement coloré de rose, des traits
mignons, une physionomie duce, expressive et pleine de sensibilité, un
regard auquel sa vue basse donnait quelque chose de timide et d'incertain,
une taille moyenne mais parfaitement prise, dans toute se personne une
noblesse orientale unie à la grâce andalouse. Ce
portrait du comte de la Garde-Chambonas fait comprendre que Metternich va
tomber tout de suite follement amoureux de la belle. Il vont vivre un
amour profond, dont naîtra une fille, Marie-Clémentine. Autre rencontre
importante pour Metternich : celle de Frédérique Gentz, au mois de
juillet 1802, prussien né en Silésie, et désireux d'entrer au service
de François II.
Le 2 février 1803, Metternich est nommé à Berlin, où il remplace le
comte de Stadion auprès du roi Frédéric-Guillaume III. Il va y rester
jusqu'en 1806, jouissant (il se plaira à le souligner) d'une rare faveur
de la part du roi et de la reine Louise (" La plus belle femme qu'il
m'est été donné de rencontrer " disait d'elle Mme de Staël). C'est
à Berlin que le comte Metternich apprend l'enlèvement puis l'exécution
du duc d'Enghien et la proclamation de l'empire français. L'année
1804 s'écoula dans une pénible incertitude : ce n'était ni la guerre,
ni la paix. Le ciel était couvert de nuages menaçants, mais la foudre ne
devait éclater qu'en 1805.
A Berlin, le rôle de
Metternich est de gagner la Prusse aux projets d'une alliance austro-russe.
Mais si l'accord de Postdam est signé le 5 novembre 1805, il ne doit pas
vraiment à ses talents diplomatiques. C'est plutôt la violation du
territoire prussien qui en a été le déclic. Le
2 décembre, c'est Austerlitz et, le lendemain, Napoléon couche au
château des Kaunitz, dans le même lit qu'occupa Metternich dix ans plus
tôt. Début avril 1806, Metternich retrouve Vienne, pour y apprendre,
alors qu'il s'attend à être nommé à Saint-Pétersbourg, que le nouveau
ministre des affaires étrangères de François Ier l'a nommé ambassadeur
à Paris. Il a alors 33 ans, et se voit responsable du poste le plus
important que l'Autriche puisse lui donner.
" C'est à
Paris seulement que commença ma vie publique ".
Il arrive dans la
capitale française le 4 août 1806 et rencontre, dès le lendemain, le
prince de Bénévent, Charles de Talleyrand, le ministre des relations
extérieures de Napoléon. Il présente ses lettres de créances à ce
dernier le lendemain.
Je
n'avais encore jamais rencontré Napoléon.... Il se tenait au milieu de
la salle, à ses cotés le ministre des affaires étrangères et six
autres personnes de la cour. Il portait l'uniforme de l'infanterie de la
Garde, et avait son chapeau sur la tête. Ce détail - en tout point
déplacé, car en fait il ne s'agissait pas d'une audience officielle - me
surpris (...) il me vint même à l'esprit que peut-être je devrais aussi
me recouvrir (..)
Napoléon
l'accueille par un : " Vous
êtes bien jeune pour représenter l'une des plus anciennes monarchies
d'Europe ! ". Ce à quoi le nouvel ambassadeur, sans se démonter,
répond : " le même
âge que Votre majesté à Austerlitz ! " Une
réponse qui fera, bien sûr, les délices des salons parisiens. Ce même
6 août 1806, François II déposait la couronne du Saint-Empire
romain-germanique, et prenait le titre de François Ier d'Autriche.
Le nouvel ambassadeur d'Autriche s'installe donc à Paris, alors que la
Prusse, bientôt, va courir à sa perte. Metternich estimera plus tard que
la " levée de boucliers " de 1806 avait constitué de la part
de la Prusse une faute aussi grave que la neutralité. Il écrira même
que " la victoire d'Iéna marqua l'apogée de la puissance de
Napoléon ". Le 26
juillet 1807, Metternich, depuis Paris, expédie à Stadion, les termes
des deux traités signés à Tilsit. L'ambassade
de Metternich va durer seize mois, jusqu'au 26 mai 1809, c'est à dire
cinq jours après la bataille d'Essling et quatorze jours après la prise
de Vienne ! Durant ces seize mois, il va renseigner, comme il se doit, la
cour d'Autriche sur les tenants et aboutissants de la politique
étrangère de la France. Par exemple, le 18 janvier, il mande son
gouvernement (mais il tient l'information de Talleyrand !) :
Les
négociations avec l'Angleterre sont pour ainsi dire rompue. Napoléon a
deux plans en tête : le partage de la Turquie, une expédition en Inde
(..)
Les relations
entre la France et l'Autriche se détériorent rapidement, surtout à
partir de juillet 1808. Des espions français rapportent que cette
dernière accélère ses armements et rassemble ses troupes. Les échanges
épistolaires avec Champagny deviennent de plus en plus durs. Le 15 août,
durant la réception du corps diplomatique, à l'occasion de la fête de
l'empereur, celui-ci s'en prend à Metternich : " Alors, Monsieur
l'Ambassadeur, l'Autriche arme ? ". Le 25, il reçoit l'ambassadeur
autrichien en audience extraordinaire. Napoléon s'exprime, durant près
de deux heures, sur sa politique, sur les relations entre les deux cours
de Vienne et de Paris. Quelques jours plus tard, Metternich informe
Stadion :
On
estime, d'après nos préparatifs, que la guerre ne pourra avoir lieu
rapidement (...)
Du 27 septembre
au 18 octobre 1808, c'est l'entrevue d'Erfurt. Malgré les conseils de son
ambassadeur, l'empereur d'Autriche n'y participe pas. Trois semaines plus
tard, Napoléon, qui a, croit-il, les mains libres, s'engage en Espagne.
Fin janvier 1809, il en revient à brides abattues et, le 28, a sa fameuse
altercation avec Talleyrand. Le lendemain, ce dernier est chez Metternich,
offrant ses services à l'Autriche, ce dont l'ambassadeur informe
aussitôt son ministre :
Les
dés en sont jetés. X (Talleyrand) a devant moi mis bas le masque. Il
m'est apparu décidé à ne pas attendre la fin de la partie; il m'a
expliqué que le moment était venu ; il considère de son devoir d'avoir
des relations avec l'Autriche. Il m'a dit qu'il avait repoussé les offres
de Cobenzl, mais qu'il était prêt désormais à les accepter. Maintenant
je suis libre et nous représentons la même cause... Je parle d'autant
plus librement avec vous, que je suppose que vous souhaitez avoir mes
services. Il m'a représenté qu'il avait besoin de quelques centaines de
milliers de francs, car Napoléon l'avait ruiné pour recevoir les princes
espagnols et parce qu'il venait d'acheter une maison.
Le 9 avril, sans
déclaration de guerre, l'Autriche porte ses troupes en avant : "
c'est la guerre ! " déclare le 12 Napoléon à Cambacérès et à
Clarke. Pourtant, Metternich a, dans ses nombreuses dépêches á Stadion
déclaré que la France ne veut plus la guerre, sauf son empereur. Metternich
demeure jusqu'au 26 mai à paris, c'est à dire cinq jours après la
bataille d'Essling ! Autour de lui on murmure, parfois à haute voix, que
cette nouvelle guerre avec l'Autriche peut-être regardée " comme la
conséquence des rapports qu'il avait faits à sa cour ". Le 5 juin,
il est enfin à Vienne. Deux jours plus tard, le gouverneur Andreossy lui
intime l'ordre de quitter la ville. Le 17 juin, il est conduit aux
avant-postes français. Enfin, le 3 juillet, deux jours avant la bataille
de Wagram, il rejoint l'empereur François à Wolkersdorf. C'est là qu'il
apprend, le 8, qu'il est nommé ministre des affaires étrangères à la
place de Stadion, qui vient de démissionner, poste qu'il ne prendra, bien
sûr, qu'à la fin de la campagne en cours (entre temps, Metternich
accompagne l'empereur en Hongrie et assure l'intérim du ministère).
Fin novembre (la paix de Schönbrunn a été signée le 14 octobre - sans
Metternich, puisque c'est Jean de Liechtenstein qui a défendu la cause
autrichienne - et Napoléon a quitté Vienne le 16) Metternich s'installe
à la Chancellerie d'où, les 38 années qui vont venir, il va gouverner
l'Autriche et l'Europe. La
tâche qui attend Metternich n'est pas mince, et ses objectifs ambitieux :
il n'entend pas moins que de rendre à l'Autriche sa confiance interne,
son prestige extérieur, tenter d'obtenir du vainqueur des adoucissements
au dur traité de Vienne, enfin empêcher le resserrement des liens entre
la France et la Russie.
" Il vaut
mieux qu'une archiduchesse soit f...e, que la monarchie ",
(prince de Ligne).
La première
grande " affaire " va être, on le sait, d'ordre matrimonial :
ayant appris, dès la fin de novembre, que Napoléon a pris la décision
de divorcer, il sera le grand ordonnateur de cette " alliance de
famille " par laquelle il entend rapprocher les deux pays. Dès le 28
novembre 1809, il s'ouvre de ce projet (" c'est une idée de moi
") au comte de Laborde, alors à Vienne, lequel est chargé d'en
informer Paris, où, à cette date, les discussions tournent toujours
autour d'un " mariage russe ". Le 16 décembre, le Sénat
entérine le divorce et le lendemain, Napoléon charge Maret de
"faire des ouvertures" à l'ambassadeur d'Autriche à Paris, le
prince de Schwarzenberg. On connaît la suite.
En
déposant entre vos mains, Monsieur mon Frère, le sort de ma fille
chérie, je fournis à votre Majesté la preuve la plus forte de confiance
et d'estime que je puisse lui donner. Il est des moments où la plus
sainte des affections l'emporte sur toute autre considération qui lui est
étrangère. Que votre Majesté impériale ne trouve ici que l'expression
des sentiments d'un père que dix-huit années d'une douce habitude
attachent à un enfant que la Providence a douée de toutes les qualités
qui constituent le bonheur d'un intérieur. (François Ier à Napoléon -
6 mars 1810)
Et Metternich
d'écrire à son épouse (elle réside alors depuis près d'un an à
Paris, où Napoléon la fait traiter avec les mêmes égards que
Schwarzenberg) :
Il
serait difficile... de se faire une idée de l'extrême popularité de la
chose. Si j'étais le sauveur du monde, je ne pourrais recevoir ni plus de
félicitations ni plus de véritables hommages sur la part que l'on est
sûr que je dois y avoir prise.
Metternich
décide de se rendre à Paris, où, selon Champagny, " L'Empereur le
verra avec plaisir " étant entendu que " M. de Metternich fait
ce voyage pour son agrément, ses affaires ou les affaires de sa Cour,
mais nullement avec la prétention d'accompagner madame l'Archiduchesse.
" Qu'à cela ne tienne : Metternich arrivera à Compiègne un jour
après Marie-Louise... A Paris, où il loge chez le maréchal Ney (lequel
guerroie en Espagne), Napoléon lui accordera de nombreuses entrevues. Le 30 septembre, il prend congé de
l'empereur, à Fontainebleau, emportant avec lui, outre le cordon de la
Légion d'Honneur, la levée du séquestre sur ses biens et ceux de
Schwarzenberg (dont ils jouissaient dans les États de la Confédération,
avant la guerre), un traité de commerce (qui sera rapidement dénoncé)
et, surtout, l'abrogation de l'article secret du traité de Vienne,
relatif à la limitation à 150.000 hommes des troupes de l'Autriche. Et
le 12 octobre 1810, le ministre Metternich est de nouveau à la tête de
son ministère.
A Vienne, le Cabinet " fermente " (selon l'expression de notre
ambassadeur Otto). Metternich n'a en effet loin de n'avoir que des amis,
qui s'en prennent même à sa vie privée (on lui donnera la paternité du
denier enfant de la princesse de Bagration), dans un pays où la situation
économique est loin d'être réjouissante. Et les appuis qu'il pourraient
trouver du coté de la famille impériale sont tempérés par l'espèce de
retrait dans laquelle celle-ci se confine, du fait de la santé de plus en
plus alarmante de l'impératrice. En
1811, Metternich cherche, de son propre aveu, à éviter les catastrophes
et à maintenir la paix, ce en quoi la naissance du roi de Rome l'aide
quelque peu. Mais les nuages
s'amoncellent à l'est et Metternich va, pour ce qui est de la Russie, se
tromper largement. " La
Russie est perdue; son armée n'est pas à la hauteur d'une tâche
pareille; ses finances sont insuffisantes ", écrit-il
encore au mois de mai 1812.
Pourtant, fort de ses succès contre les Turcs, le tsar Alexandre, dès le
milieu de 1811, a renforcé ses armements. Napoléon envoie des troupes
dans le duché de Varsovie et fait retrancher Danzig. Le 17 décembre, il
fait demander à Vienne un corps de 40 à 50.000 hommes et 6.000 chevaux.
En échange, il promet la Moldavie, la Wallachie, la Serbie et l'Illyrie. Le 14 mars 1812, Metternich signe le
traité franco-autrichien de coopération militaire (le corps de réserve
autrichien est finalement de 30.000 hommes) et, deux mois plus tard, il
est à Dresde, avec ses souverains et une poignée de serviteurs, où
Napoléon, entouré d'une suite de 50 personnes et de 150 serviteurs,
reçoit les têtes couronnées d'Europe.
Metternich rencontrera plusieurs fois Napoléon, qui s'expliquera sur ses
intentions :
J'ouvrirai
la campagne par le passage du Niémen. Elle se terminera à Smolensk et à
Minsk; je m'arrêterai là. Je fortifierai ces deux places, puis, à Wilna
(où mon quartier général se tiendra pendant le prochain hiver) je
m'occuperai de l'organisation de la Lithuanie, qui brûle d'être enfin
libérée de la Russie. Nous verrons qui des deux cotés se lassera le
premier : moi, de laisser mes troupes vivre aux frais de la Russie, où
bien Alexandre, de nourrir mon armée aux frais de son pays. Peut-être
passerais-je le plus fort de l'hiver à Paris...
Le 28 mai, les
festivités terminées, Napoléon peut se consacrer à une nouvelle
campagne ! Le 22 juin, il déclare la guerre à la Russie. La Grande
Armée franchit, peu après, le Niémen. Elle sera de retour six mois
après, dans l'état que l'on sait !
Le "
représentant de l'Europe entière ".
Lorsque la
Prusse, le 16 mars 1813, la guerre à la France, Metternich doit faire
face à un sévère dilemme et choisir entre trois politiques : la
fidélité à l'alliance française, l'alliance avec la Russie, la Prusse;
une neutralité avec en arrière plan un rôle de médiation, qui aurait,
accessoirement, flatté son amour propre. A tout le moins, son soucis est
de voir l'Autriche, toujours très affaiblie, devenir le théâtre d'une
nouvelle guerre, qu'elle soit l'alliée de la France ou de la Russie ! Au début, ce sera donc une sorte de
neutralité armée (le 30 janvier 1813, les russes signent un
cessez-le-feu avec Schwarzenberg). Mais bientôt, Metternich s'éloignera
de l'idée de l'alliance avec la France, et, après l'échec d'une
médiation qu'il essaye sans relâche de mener à bien, durant les cinq
premiers mois de 1813 (qui voit les victoires de Napoléon à Lützen et
Bautzen) en viendra à la co-belligérance avec la Russie et la Prusse. En juin (le 16, pendant le fatal
armistice de Peuschwitz) il rencontre le tsar et lui affirme : " Nous
sauverons l'Europe ".
Et c'est, le 26 juin 1813, à Dresde, la célèbre entrevue avec
Napoléon, au palais Marcolini, qui se déroule sans témoins et dont il
ne reste que deux témoignages : celui du baron Fain (in Manuscrit de
1813) et celui que Metternich adressa à son souverain, et dont il
s'inspire dans ses Mémoires. Metternich
reste quelques jours à Dresde (il s'agit toujours de faire jouer à
l'Autriche son rôle de médiateur), et en part, le 30, avec l'acceptation
par l'empereur de la médiation armée de l'Autriche, d'une conférence
des puissances belligérantes à Prague, d'une prolongation jusqu'au 10
août de l'armistice (de son propre chef), ce dont il informe François le
1er juillet.
" Ce
Congrès de Prague va être en fait " une farce ", une " comédie
" : Prague est pour le
public et tout ce qui se passe hors de Prague est la chose " (Lettre
de Metternich à son père) et,
tout naturellement, il avorte. L'Autriche, alors " entre dans
l'action " afin de mener à bien "la sainte entreprise". En
octobre, c'est, à Leipzig, la bataille des Nations, pour laquelle
Metternich aura le mérite, selon les mots de Gentz "d'avoir
désigné Schwarzenberg pour le commandement suprême et de l'avoir
soutenu contre tous les mécontents et tous les détracteurs." Pour la nouvelle campagne, c'est à
Metternich que l'on demande d'arbitrer le conflit existant parmi les
militaires sur le choix du plan des opérations ! De cette campagne, il
écrira :
Sa
campagne (de Napoléon, bien sûr) de 1814 fut sans contredit celle dans
laquelle, avec des moyens fort réduits, il déploya le plus de talents
militaires.
Mais il
n'assistera pas au congrès de Châtillon et, après l'entrée des Alliés
dans Paris (qu'il sauve, d'accord avec Alexandre, de la destruction
prussienne) il reste, du 19 mars jusqu'au 10 avril à Dijon, suivant en
cela son souverain, peu enclin à entrer dans la capitale d'une France
encore dirigée par son beau-fils ! Mais le 4 mai, lorsque Louis XVIII
entre dans Paris, il est à une fenêtre de la rue Montmartre, pour voir
passer le cortège. Le 31 mai, les parisiens apprennent, au son des salves
de canons, que la paix est revenue. Metternich peut, après un séjour en
Angleterre au mois de juin, comme invité personnel du Régent (et où il
doit, bien malgré lui, accepter que le Congrès de Vienne s'ouvrira le
1er octobre) retourner à Vienne.
Le Congrès de
Vienne
L'accueil que lui
fait la capitale autrichienne, le 18 juillet 1814, est triomphal, on lui
promet que " l'histoire le montrerait à la postérité comme le
modèle des grands hommes ". Dans les mois qui vont suivre, le
Congrès va tout autant servir sa renommée que nuire à sa réputation.
Il s'entoure d'hommes de talent : Wessenberg, Binder, Hudelist, Pilat et,
surtout, Gentz, prussien de naissance mais autrichien d'adoption, tout
autant secrétaire privé que secrétaire général du Congrès. Durant
les mois qui suivent, au milieu des festivités multiples (dont il ne faut
pas minimiser l'importance diplomatique), les camps se forment (France,
Autriche, Angleterre d'un coté, Russie et Prusse de l'autre), les hommes
s'affrontent. Et l'hostilité patente entre Metternich et Alexandre sera
" la clé des évènements du Congrès ". D'autant que les deux
hommes s'affrontent sur le plan sentimental, ayant la malencontreuse idée
de s'éprendre des mêmes femmes, qu'il s'agisse de la princesse Bagration
ou de la duchesse de Sagan. Mais, malgré les pressions d'Alexandre
auprès de François, ce dernier gardera sa confiance à Metternich.
L'intermède du retour de l'île d'Elbe réconciliera les deux hommes et,
le 9 juin 1815, le traité de Vienne sera officiellement signé et
paraphé par les huit puissances participantes. Metternich
restera, au coté de Talleyrand, l'un des deux hommes du Congrès. Avec
lui, il a été un " architecte d'une construction européenne, basée
sur la sécurité de chacun, la paix de tous, la tranquillité intérieure
des États ". L'Histoire retiendra de cet épisode, tant de fois
considéré avec un oeil amusé, qu'il fut à l'origine de ce qu'on
appelle encore : le " Système Metternich ", expression
peut-être, sans doute même, trompeuse, puisqu'il ne s'agissait pas d'un
système, et que Metternich lui-même en désavoua la paternité.
Le cocher de
l'Europe
Metternich va
désormais concentrer ses efforts sur le maintien de la paix et des acquis
des traités de 1815. Il va être le gardien jaloux de l'esprit
monarchique et le pourfendeur des idéaux libéraux, républicains et
nationalistes inspirés par la Révolution. En septembre 1815, à contrecœur,
il fait entrer l'Autriche dans la Sainte Alliance, au coté de la Russie
et de la Prusse (tout en qualifiant cet accord " d'au bas mot
inutile ", voire de " rien sonore "). Il
va bientôt recevoir le sobriquet de " Cocher de l'Europe ", car
il est partout, de tous les Congrès qui sont organisés pour régler les
questions qui n'ont pu l'être à Vienne ainsi que les conflits
émergeants. Ce seront :
. Aix
la Chapelle (1818) auquel les souverains d'Autriche, de Prusse et de
Russie assistent personnellement, où l'attention doit normalement se
porter sur la normalisation des relations avec la France. Mais Metternich
en profite pour mettre l'accent sur les dangers pouvant venir de toute
agitation démagogique, à cette époque principalement concentrée en
Allemagne (cf. la célèbre rassemblement de la Wartburg, en octobre
1817), ce qui n'est pas sans l'inquiéter. Les puissances, sous son
impulsion, affirment leur solidarité dans la répression des idéaux
révolutionnaires.
. Karlsbad
(1819). Au début de l'année, le 23 mars, l'écrivain et conseiller
d'état allemand, August von Kotzebue, a été assassiné par l'étudiant
Ludwig Sand. Metternich fait alors prendre, le 31 août, par le conseil
des ministres réunis dans cette ville, des mesures pour mettre un terme
aux troubles politiques se développant en Allemagne. La plupart des
publications sont soumises à la censure; des représentants du
gouvernement sont installés dans les universités, pour mieux les
contrôler; dans plusieurs États, les constitutions qui prévoient la
réunion de Diètes conformément à l'ancien usage sont suspendues; dans
d'autres elles sont purement et simplement annulées.
. Troppau
(octobre 1820). Metternich fait adopter le principe de l'intervention
armée des grandes puissances contre les mouvements
" révolutionnaires ", notamment dans le royaume des Deux-Siciles,
mais également en Espagne et au Portugal. Angleterre et France s'opposent
à cette décision.
. Laibach
(1821). En dépit de l'opposition de l'Angleterre et de la Russie,
Metternich, fait valoir sa proposition d'intervenir en Italie, en proie
alors à de sévères troubles. Cette position lui attire la haine du
peuple italien.
. Vérone
(1822). Cette année là, qui voit par ailleurs la fin de la
Sainte-Alliance, il anéantit les mouvements libéraux à Naples et en
Italie du Nord, ce qui lui vaut l'antipathie de nombreux milieux, malgré
sa bonne gestion du royaume lombardo-vénitien.
Dans toutes ces occasions, Metternich démontre son habileté
diplomatique. Mais ce sera la question grecque, où Metternich se montrant
un allié ferme de la Turquie, s'opposant en ceci à la Russie. En fait,
s'il se désintéresse des Balkans, c'est préfère voir l'Empire Ottoman
conserver son intégrité qu'avoir le chaos nationaliste aux portes de
l'Empire qui risquerait de profiter à la Russie. Il refusa ainsi de
soutenir les insurgés grecs en 1821 tout en recherchant le soutien de
l'Angleterre contre les velléités interventionnistes russes. La crise
s'achèvera en 1829 par le traité d'Andrinople où la Grèce obtint son
indépendance.
En 1821, Metternich avait été nommé par l'empereur François Ier,
Chancelier d'État, le premier depuis Kaunitz à occuper cette fonction.
Le voilà donc à la tête à la fois de la politique intérieure et
extérieure. A ce poste, il va mener de toutes ses forces une lutte sans
merci contre les mouvements nationaux, libéraux et démocratiques, et
contre les idées portées par le " joséphisme ". Quatre
ans plus tard, en 1825, son épouse Éléonore von Kaunitz, meurt de
phtisie (la " maladie viennoise ") comme ses deux filles et son
fils. Il se remarie deux années plus tard avec Antoinette de Laykam, une
jeune femme de modeste origine, de trente trois ans plus jeune que lui.
Elle décède un an plus tard, après avoir eut juste le temps de lui
donner un fils, Richard, futur ambassadeur d'Autriche auprès de Napoléon
III.
En 1830, il ne soutient que
" du bout des lèvres " le roi des Pays-Bas Guillaume 1er contre
l'insurrection belge de . La prudence anglaise et la retenue française
(Louis-Philippe ne voulait pas annexer la Belgique) permettent d'éviter
l'intervention russo-prussienne. Après
que la France et l'Angleterre aient pris leurs distances, la Prusse, la
Russie et l'Autriche forment l'alliance des " Trois Aigles ", qui
réduira à néant le soulèvement de Cracovie, en 1846. En
1831, il s'inquiète du soulèvement polonais et fait adopter par la
diète de Francfort, siège de la Confédération Germanique, plusieurs
mesures dépossédant les diètes locales d'initiatives fiscales et
politiques leur permettant de s'émanciper de Vienne. En 1834, il obtint
même le renforcement de la censure dans chaque état de la
Confédération. Enfin, en
1833, Metternich s'oppose fermement à l'entrée de l'Autriche dans
l'Union douanière créée, sous l'influence de la Prusse, après les États
de la Confédération germanique.
La chute
Mais après 1835
(avènement de Ferdinand Ier après la mort de François Ier), la
direction des affaires, après l'empereur lui-même (ses déficiences
mentales et physiques ne lui permettent d'ailleurs pas de s'occuper
directement des affaires de l'État), est, suivant les dernières
volontés de l'empereur défunt, mis dans les mains d'un conseil de
régence, où, sous la présidence de principe de l'empereur, siègent
l'archiduc Louis (l'oncle de l'empereur, qu'il représente), l'archiduc
François-Joseph (le frère cadet de Ferdinand), le chancelier Metternich
et le ministre d'État Kolowrat-Liebsteinsky. Metternich perd alors peu à
peu son influence, face à ce dernier. Il ne peut se faire à l'idée d'un
état conduit par un conseil des ministres, et se consacre uniquement, à
partir de 1836, à la politique extérieure et son influence sur les
affaires intérieures devient de moins en moins importante. De plus en
plus, son opposant Kolowrat apparaît comme un libéral, tandis que
Metternich revêt l'image de la réaction. Beaucoup continuent à envier
sa position. Les aristocrates voient toujours en lui un étranger
(certains font remarquer que ceux-ci eurent souvent la préférence :
Gentz, Müller, Schlegel, Jarke). On voit en Kolowrat, d'un autre coté,
l'homme capable d'octroyer, ou, au moins, de préparer, une constitution. C'est
l'époque du Vormärz (" avant-mars ", période qui va de 1830
à 1848).
A mesure que le temps passe,
le " système Metternich " est tenu responsable de tout ce qui
déplait, et son auteur haï et attaqué, mais il y a de l'injustice dans
tout ceci. Il écrira plus tard :
Pour
moi, le mot liberté n'est pas un point de départ, mais un but vers
lequel il faut tendre. La liberté ne peut s'appuyer que sur l'ordre. Sans
ordre comme base les aspirations de liberté se transforment en tyrannie.
De tout temps, et dans toutes les situations, je fus un homme d'ordre,
mais mes efforts furent toujours pour une vraie, non une prétendue
liberté.
Le 13 mars 1848,
les journées de Vienne le surprennent complètement. Pourtant, lorsque
tout avait commencé, on ne s'en était pris ni à lui, ni à la
monarchie. Des réformes, voilà tout ce que demandait les
" agitateurs " ! Le chancelier est resté intransigeant. Alors, la
foule pressée sur la Ballhausplatz, bloque la Herrengasse. L'archiduc
Albert, le commandant militaire de la Basse-Autriche, est insulté,
reçoit des pierres. Ordre est donné de dégager la rue. Il y a des
morts. On va bientôt se battre partout dans Vienne et dans les faubourgs.
Les usines sont prises d'assaut, des bâtiments administratifs sont
incendiés. Le pouvoir plie. Le pouvoir cède : l'archiduc Louis convoque
Metternich à la Hofburg. Il y arrive à six heures et demi du matin.
L'archiduc lui fait savoir que les " délégations " souhaitent
qu'il s'en aille. L'empereur lui-même fait savoir : " Avertissez la
population que je suis d'accord sur tous les points ". Metternich
se soumet : il donne sa démission à l'empereur. Dans sa lettre, il admet
qu'une nouvelle ère a commencé et que l'Ancien Monde est incapable de
s'opposer victorieusement à l'assaut des temps nouveaux.
Il doit fuir, en toute hâte,
dans une calèche ordinaire, accompagné de sa femme et du baron Hügel.
La cour a refusé d'assurer sa protection, de lui versé l'argent qu'on
lui doit (c'est Rotschild qui lui avancera l'argent nécessaire, à 5% !)
D'abord jusqu'au château de Feldsberg (propriété des Liechstenstein),
en Moravie, où il arrive à cinq heures du matin. De là, on continue,
par le train, vers Prague Quelques jours après, sous le nom de monsieur
et madame Matteux (le nom de Metternich est tout autant hait en Allemagne
qu'en Autriche !) par la Bohême, la Saxe, le Hanovre et la Hollande, ils
se rendent en Angleterre, où ils arrivent le 20 avril, puis, l'année
suivante, en Belgique. Metternich reviendra en Autriche en 1851, après
trois ans d'exil, à la demande du nouvel empereur François-Joseph (à
qui il avait, lorsqu'il était adolescent, enseigné l'art de gouverner
les hommes et de conduire les affaires de l'État). Ce sera un voyage
triomphal, partout il sera reçu avec les plus grands égards. La
dernière partie se fait en bateau, sur le Danube. Le 24 mars, le prince
et la princesse Metternich arrivent à Nussdorf. Les bords du Danube sont
noirs de monde. Metternich retrouve bientôt sa demeure du Rennweg.
Il va désormais se comporter comme un simple citoyen dans son palais de
Vienne, vivant de ses souvenirs (il écrit ses Mémoires). On vient, de
temps en temps, le voir (ce sera le cas du prince Louis, responsable en
partie de sa démission en 1848), lui demander des conseils.
François-Joseph lui fait l'honneur de le recevoir de temps en temps. Il
avait épousé, en 1831, sa troisième femme, Mélanie de Zichy-Ferraris.
Elle lui donnera trois enfants et l'accompagnera jusqu'à sa mort, le 3
mars 1854. C'est elle à qui il dicta une grande partie de ses Mémoires.
Il lui survivra encore cinq années et s'éteindra, le 11 juin 1859, à
l'âge de 86 ans. Pour son quatre-vingtième anniversaire, l'empereur
François-Joseph lui même s'était déplacé. Son
corps repose à Plasy (République tchèque, à 25 km de Pilsen), dans
l'église Saint Wenceslas.