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Alexandre-Auguste LEDRU, dit

LEDRU-ROLLIN 

(Paris, 2 février 1807 -
Fontenay-les-Roses, 31 décembre 1874)


Français.

Homme politique.



par Marc Nadaux


 

     Quelques dates :

1839, élu député dans le collège du Mans-campagne.
1843, fonde le journal La Réforme.
1847, Du Paupérisme dans les campagnes.
        
un des principaux organisateurs de la Campagne des banquets.
1848, nommé ministre de l'Intérieur
du Gouvernement provisoire.
      
candidat des républicains démocrates à la présidence de la République.
1849, exil, après la manifestation du 13 juin.
1871, élu à l’Assemblée nationale.

 






Alexandre-Auguste Ledru naît à Paris le 2 février 1807. Il est issu d’une famille aisée de la bourgeoisie. Son père est médecin tandis que son grand-père s’était fait connaître au siècle précédent sous le pseudonyme de Comus, le prestidigitateur. Ces talents d’amuseur ont d’ailleurs permis à celui-ci d’amasser une fortune appréciable et de faire l’acquisition d’une propriété à Fontenay-les-Roses. Alexandre Ledru effectue ses études au collège Charlemagne en tant que pensionnaire, souffrant auprès de ses camarades d’une obésité précoce. Il entame ensuite son droit, étant reçu licencié puis docteur.

Afin de se distinguer de son père, l’étudiant adjoint à son patronyme le nom de Rollin, issu de ses ancêtres maternelles, se faisant désormais appeler Ledru-Rollin. Inscrit au barreau de Paris, le jeune avocat est rapidement remarqué par son éloquence, plaidant notamment avec conviction lors des nombreux procès de presse qui émaillent l’actualité dans les premières années de la Monarchie de Juillet. Ledru-Rollin se charge également de la défense de Marc Caussidière, un des dirigeants du soulèvement de la ville de Lyon, au mois d’avril 1834. Quelques temps plus tard, le magistrat publie d’ailleurs un mémoire sur les massacres de la rue Transnonain à Paris.



Cette notoriété au sein des milieux de l’opposition républicaine lui permet d’entrer en politique. Candidat malheureux aux élections législatives du 2 mars 1839, Ledru-Rollin est élu député dans le collège du Mans-campagne, au mois de juillet 1841. Bénéficiant à cette occasion du soutien financier du maire de la ville, Trouvé-Chauvel, il succède à Garnier-pagès récemment décédé. Depuis de nombreuses années, Ledru-Rollin est un adversaire déclaré du régime issu des Trois Glorieuses. A la Chambre ainsi que dans son journal La Réforme, fondé en 1843, il combat le pouvoir de Louis-Philippe d’Orléans. Ledru-Rollin s’oppose ainsi avec violence à la loi sur les fortifications de Paris du 1er février 1841, ainsi qu’à celle qui organise la régence, promulguée le 13 août 1842 peu après la mort accidentelle du duc d'Orléans. En 1843, l’avocat fait l’achat d’une charge à la Cour de Cassation pour la somme colossale de 330.000 Frs, délaissant celle-ci en 1846 pour se consacrer uniquement à sa carrière politique. L’année suivante voit la publication d’un opuscule intitulé Du Paupérisme dans les campagnes qui met en évidence les difficultés des populations rurales à la suite de la crise économique.

Ledru-Rollin est un des principaux organisateurs de la Campagne des banquets qui brave l'interdiction du droit de réunion. Celle-ci prend une ampleur considérable. Soixante-dix banquets sont organisés à travers la France, réunissant plus de 22.000 souscripteurs issus notamment de la bourgeoisie libérale. Le premier banquet a lieu à Paris le 18 juillet 1847 mais des tensions apparaissent bientôt tandis que le discours se radicalise. Odilon Barrot et Prosper Duvergier de Hauranne, des réformistes modérés, sont bientôt dépassés par les représentants de la gauche républicaine. A Lille, le 7 novembre 1847, Ledru-Rollin, fidèle à ses convictions, réclame devant 900 convives l'instauration du suffrage universel, réitérant ainsi une argumentation déjà professée l’année précédente dans son retentissant Appel aux travailleurs. Plus tard, le 9 décembre suivant, à Chalon-sur-Saône, le député radical porte un toast à " l’unité de la Révolution française, à l’indivisibilité de la Constituante, de la Législative, de la Convention " qui tranche avec ceux portés quelques mois plus tôt " au roi des Français " !



C'est d'ailleurs l'interdiction par le gouvernement du banquet organisé dans le XIIème arrondissement de la capitale qui est le point de départ de l'insurrection à Paris. Le 24 février 1848, le palais des Tuileries est pris d'assaut, Louis-Philippe Ier doit abdiquer. Un gouvernement provisoire se forme qui se prononce peu après en faveur de la République. Nommé ministre de l'Intérieur, Ledru-Rollin est également élu parmi les cinq membres de la Commission exécutive grâce au soutien d’Alphonse de Lamartine. Dans ces nouvelles fonctions, il s’illustre bientôt par son jacobinisme.

Ledru-Rollin se charge ainsi de la réorganisation de l’administration, nommant des Commissaires généraux qui, dans les départements, remplacent à présent les Préfets et autres Sous-Préfets de la monarchie destituée. S'appuyant sur le souvenir des Représentants en mission de la Convention montagnarde, le ministre de l’Intérieur leur confère des pouvoirs illimités ; ceci afin de consolider la République, les Commissaires généraux devant faire en sorte que les populations se rallient au nouveau régime. Il leur fixe ainsi pour tache de préparer les élections et, au besoin, de les orienter. A Paris cependant, on craint à juste titre la réaction de la Province soumise à l'influence des notables.

Bientôt, on s'émeut également au sein du Gouvernement provisoire de la liberté que s'octroie Ledru-Rollin, chez les modérés notamment. Au delà de Paris, la bourgeoisie s'inquiète des mesures prises par certains Commissaires, Louis Charles Delescluze à Lille ou Étienne Arago à Lyon notamment. Les élections à l'Assemblée constituante organisées les 23 et 24 avril 1848 portent au pouvoir une majorité conservatrice, dominée par Adolphe Thiers et les membres du parti de l'Ordre. A cette occasion, Ledru-Rollin se prononce pour l’invalidation du mandat de Louis-Napoléon Bonaparte. Il est également élu le 10 mai à la Commission du pouvoir exécutif. Avec les Journées de juin, la nomination du général Cavaignac à la tête de l’exécutif entraîne son éviction. La Seconde République a alors changé d'âme.

Après l’adoption d’une constitution, Ledru-Rollin est le candidat des républicains démocrates à la présidence de la République. Le 10 décembre 1848, les élections au suffrage universel donnent 5.400.000 voix à Louis-Napoléon Bonaparte. Ledru-Rollin n’obtient l’assentiment que de 370.119 Français... Dans les mois qui suivent néanmoins, il devient le chef de l’opposition radicale, s’attachant à organiser à Paris et en Province le parti des républicains-socialistes, les " démocs-socs ". Le tribun est élu le 13 mai 1849 dans cinq départements à l’Assemblée législative. Le 12 juin suivant, Ledru-Rollin dépose à l'Assemblée une motion d'accusation contre le président Bonaparte et ses ministres, qui viennent de donner l'ordre d'attaquer Rome. Le lendemain, il est aussi un des principaux organisateurs d’une manifestation des députés de gauche qui protestent contre l’expédition militaire dirigée contre la jeune république. Celle-ci est réprimée dans le sang et Ledru-Rollin, menacé d’emprisonnement, doit s’expatrier. Le 7 juillet, il gagne la Belgique aux cotés d'Etienne Arago, précédant ainsi dans l’exil nombre d’anciens Montagnards, de républicains.



Réfugié à Londres, il apprend bientôt la nouvelle du coup d’État du 2 décembre 1851 et le rétablissement de l’Empire. Celui-ci installe au pouvoir Napoléon III et l’opposant à demeurer outre-Manche. Ledru-Rollin s’occupe à rédiger un curieux De la Décadence de l’Angleterre publié en 1850. En 1857 et à la suite d’un obscur attentat contre la personne de l’Empereur, il est condamné par contumace à la déportation. Depuis Londres, Ledru-Rollin intervient de temps à autres dans la vie politique du Second Empire, appelant à l’abstention lors des élections législatives des 30 et 31 mai 1863 afin de dénoncer le système des candidatures officielles. Ledru-Rollin entretient également une correspondance avec d’autres révolutionnaires européens qui se sont illustrés pendant le Printemps des Peuples, parmi lesquels l’italien Giuseppe Mazzini, le hongrois Lajos Kossuth ou l’allemand Arnold Ruge. Ensemble, ils fondent en 1868 le Comité de la République universelle.

Ledru-Rollin est de retour à Paris en 1869 grâce à l’intervention d’Émile Ollivier, à présent chef de gouvernement en ces temps nouveaux où l'Empire devient " libéral ". Il assiste ainsi à la défaite de Sedan face aux armées prussiennes puis à la proclamation de la République le 4 septembre 1870. Ledru-Rollin est élu à l’Assemblée nationale le 8 février 1871 dans trois départements mais démissionne peu après sans avoir siégé, se sentant trop isolé au milieu d’une écrasante majorité conservatrice et monarchiste. Réélu néanmoins le 1er mars 1874 pour un nouveau mandat cette fois-ci dans le Vaucluse, Ledru-Rollin décède le 31 décembre de la même année à Fontenay-les-Roses. Le 24 février 1878, un tombeau est inauguré sur sa tombe à l’occasion du trentième anniversaire des Journées de Février. A cette occasion, Victor Hugo prononce un éloge funèbre de l’orateur républicain. Ses Discours politiques et écrits divers sont publiés l’année suivante.