La lettre d'infos


A voir et à lire
sur
19e.org,
et ailleurs.

S'abonner à la lettre d'infos
 

 L'actualité
sur 19e.org

 
 

 A voir sur le Web

     Vous êtes ici :   Accueil   Biographies   L    >   Edmond LEBŒUF                         Contact

 

Edmond LEBOEUF 

(Paris, 5 décembre 1809 - Bailleul, 7 juin 1888)


Français.

Militaire.



par
Brice Leboeuf & Eric Labayle


 

     Quelques dates :

1830, à l’École Polytechnique, participe à l’insurrection qui entraîne l’abdication de Charles X.
1838, nommé officier d’ordonnance du maréchal Valée, gouverneur général de l’Algérie .
1854, nommé général de brigade.
1859, prend le commandement de l’artillerie de l’armée d’Italie.
         nommé aide de camp de l’Empereur.
1867, décoré de la Médaille Militaire.
1869, devient ministre de la Guerre.
1870, maréchal de France et sénateur.
         "Nous sommes prêts, archi-prêts".
         major général de l’armée du Rhin.
1873, assiste aux funérailles de Napoélon III, l’empereur déchu, en Angleterre, à Chislehurst.

 






Edmond Lebœuf est né à Paris le 5 décembre 1809. Son père, Jean-Claude Lebœuf, est alors employé à la grande chancellerie de la Légion d’honneur, où il est chef de bureau dans le service de la comptabilité. Sans doute influencé par l’environnement professionnel de son père et par la légende napoléonienne, le jeune homme se destine très tôt à la carrière des armes et professe un bonapartisme qui, pour n’être pas virulent, n’en est pas moins sincère. Le 1er octobre 1828, il entre à l’École Polytechnique. Il y est encore élève lorsqu’en juillet 1830 a lieu la révolution des Trois Glorieuses. Comme beaucoup d'autres de ses camarades, il descend alors dans la rue et participe à l’insurrection qui entraîne l’abdication de Charles X. Quelques jours plus tard, le 6 août, alors que les clameurs révolutionnaires viennent juste de se taire, il quitte Polytechnique et rejoint l’École d’Application de l’Artillerie, à Metz, où termine sa formation comme sous-lieutenant-élève. Il en sort deux ans plus tard, le 6 août 1832, avec le rang de major de sa promotion. 

Nommé lieutenant en premier le 1er février 1833, il est affecté à la 12ème batterie du 1er régiment d’artillerie, régiment qu’il ne quittera qu’en 1837 avec le grade de capitaine en second, pour rejoindre l’Afrique du Nord. Sitôt arrivé en Algérie, il est affecté à l’état-major de l’artillerie des troupes qui assiègent Constantine. Comme pour beaucoup d’officiers de sa génération, le séjour africain est un véritable tremplin pour la carrière du capitaine Lebœuf. Le 23 février 1838, il est ainsi nommé officier d’ordonnance du maréchal Valée, alors gouverneur général de l’Algérie et grand nom de l’artillerie française. Le 14 mai 1839, il est blessé lors du combat de Djidjeli. 

Revenu en France en 1841 et nommé au grade de capitaine, il transite par le 2ème d’artillerie, avant de retrouver le 1er régiment en avril de cette même année. Le 15 septembre 1846, il est nommé chef d’escadron et muté au 6ème d’artillerie, affectation qui est toujours la sienne, lorsque se déclenche la révolution de février 1848. Le 29 avril, il reçoit le commandement en second de l’École Polytechnique, puis entre à l’état-major particulier de l’artillerie, ce qui constitue une reconnaissance de ses qualités de technicien de l’arme. Cette même année, le 16 mai, il épouse Marie Dauché qui lui donnera une fille l’année suivante. Le chef d’escadron - puis lieutenant-colonel, le 8 avril 1850 - Lebœuf est désormais un officier en vue. Le 16 octobre 1850, il est muté au 8ème d’artillerie. 

A l’inverse de certains, l’avènement de l’Empire ne bouleverse pas le déroulement de sa carrière et son bonapartisme ne semble pas avoir constitué un facteur d’avancement rapide. Il est promu colonel, le 10 mai 1852, et reçoit le commandement du 14ème d’artillerie, ce qui fait de lui l’un des maréchaux (ou futurs maréchaux) du Second Empire les moins avancés en grade à cette époque, tous les autres ayant déjà obtenu leurs étoiles, voire le bâton du maréchalat. La guerre de Crimée marque cependant une étape importante dans sa carrière. Alternant les emplois à l’état-major de l’artillerie de l’armée d’Orient et les commandements de troupe, le 14ème d’artillerie à cheval notamment, à partir du 10 mai 1852, il est nommé général de brigade, le 24 novembre 1854 et termine cette campagne à la tête de l’artillerie du 2ème Corps de l’armée d’Orient. Une fois la paix revenue, le général Lebœuf accède à un poste enviable et prestigieux, en recevant le commandement de l’artillerie de la Garde impériale, le 12 janvier 1856.



L’été suivant, l'officier général participe à l’ambassade extraordinaire du duc de Morny en Russie, à l’occasion du couronnement du tzar Alexandre II. Il devient général de division, le 31 décembre 1857, puis fait son entrée au Comité de l’artillerie en janvier 1858. Au cours des mois qui suivent, Lebœuf occupe alors divers postes d’inspecteur, dont celui du train, des parcs et ouvriers d’artillerie (dont la Garde). Le 23 avril 1859 enfin, il prend le commandement de l’artillerie de l’armée d’Italie. Son action pendant cette campagne lui vaut d’attirer à nouveau l’attention de ses supérieurs. Ainsi, après la bataille de Magenta, le maréchal Regnaud de Saint-Jean d’Angély écrit-il à son sujet : " Bien que le général ne soit pas sous mon commandement, je manquerais à un devoir si je ne signalais pas l’énergique assistance que cet officier général m'a prêtée en dirigeant le feu de mon artillerie pendant le plus chaud de l’action. Son zèle l’amenait au milieu de nous : c’est un officier qu’on est sûr de rencontrer partout où se présente le danger ". L'Empereur Napoléon III lui-même s’intéresse désormais à cet officier brave, fidèle et de grande valeur, dont il s’attache les services dès le retour de la campagne. Le 27 novembre 1859, le général Lebœuf est nommé aide de camp de l’Empereur. Il cumule cette fonction jusqu’en août 1869 avec diverses inspections, tout siégeant au Comité de l’artillerie, dont il prend la présidence le 1er janvier 1864. Le 22 août 1866, c’est lui qui a l’honneur de recevoir officiellement la Vénétie de l’Empereur d’Autriche, pour la remettre au roi d’Italie, Victor-Emmanuel II. Le 21 décembre de la même année, le général Leboeuf est nommé grand-croix de l’ordre de la Légion d’Honneur et, le 28 décembre 1867, honneur suprême, il est décoré de la Médaille Militaire. 

Nommé président du Conseil Général de l’Orne, le 7 août 1869, il devient ministre de la Guerre le 21 août suivant. Cette nomination ne doit rien au hasard. C’est son prédécesseur, le maréchal Niel, malade, lui-même qui l’a recommandé à l’Empereur pour recevoir ce portefeuille. C’est que le général Lebœuf jouit alors d’une solide réputation, tant par ses qualités d’artilleur et de militaire que par son action au feu. De tous les généraux pressentis, il semble de loin le plus capable pour prendre en mains les destinées de l’armée française et poursuivre les réformes amorcées par Niel. Élevé aux dignités de maréchal de France et de sénateur le 24 mars 1870, Edmond Lebœuf est alors au sommet de sa carrière. Il en est pourtant également au crépuscule. La déclaration de guerre à la Prusse, le 19 juillet 1870, lui vaut de passer à la postérité pour une citation qui, à la lumière des événements de " l' "année terrible ", ne manque pas d’ironie. A la question de savoir si l’armée française était prête pour la guerre, il aurait en effet répondu qu’il ne lui manquait pas un bouton de guêtre (" Nous sommes prêts, archi-prêts ; quand la guerre devrait durer un an, il ne nous manquera pas un bouton de guêtre "). Il n’en faut pas plus pour que l’imagerie populaire réduise toute son action et toute sa carrière à cette phrase malencontreuse - si tant est qu’elle ait été véritablement prononcée…-. Le jugement est aussi rapide qu’injuste, mais l’ampleur de la catastrophe n’incite pas à la nuance… Dans le même ordre d’idée, Lebœuf se verra attribuer après la défaite le sobriquet de " glorieux hanneton ", pour sa soi-disant imprévoyance dans la préparation de la guerre et son optimisme exagéré (" L’armée prussienne n’existe pas. Je la nie ! ", aurait-il déclaré). Mais peut-on préparer une armée au pire en moins d’une année ? 

Le 20 juillet 1870, le maréchal Lebœuf part en campagne, comme major général de l’armée du Rhin, sans perdre pour autant son portefeuille à la Guerre. Le 9 août pourtant, après les premiers revers militaires, son gouvernement présidé par Émile Ollivier est renversé et il est démis de ses fonctions ministérielles. Le 15 août suivent, il reçoit alors le commandement du 3ème Corps, avec lequel il participe aux batailles de Rezonville, le 16 août, de Saint-Privat, le 18 août et de Noisseville, le 31 août 1870. Partout, le maréchal Lebœuf se fait remarquer pour son énergie et son courage. Mais cela ne suffit pas et l’armée du maréchal Bazaine, dont il fait partie, est vite prise au piège sous Metz. Face à la résignation de son supérieur, Lebœuf persiste à adopter une attitude résolument combative. Lors du conseil de guerre du 24 octobre, il propose de tenter une sortie désespérée. Cette " héroïque folie " selon ses propres termes n’a pas de grandes chances de réussir, mais au moins sauvera-t-elle l’honneur de l’armée de Metz. Elle est rejetée. Quatre jours plus tard, le maréchal Lebœuf subit le sort de toute l’armée Bazaine. Fait prisonnier par les Prussiens, le 28 octobre, il est interné à Cassel avec Napoléon III auquel il reste fidèle malgré la défaite, puis à Bonn. 



Libéré au mois de mars 1871, le maréchal Lebœuf se rend quelques mois à La Haye, avant de rentrer en France au mois d'août suivant. Cet officier toujours profondément bonapartiste assiste aux funérailles de l’empereur déchu le 15 janvier 1873 en Angleterre, à Chislehurst, où il témoigne d’une douleur profonde et sincère. L'officier passe les dernières années de sa vie dans l’Orne, retiré dans son château du Moncel, près de Bailleul. Cet homme, méprisé pour avoir occupé le ministère de la Guerre à la veille de la plus cinglante défaite que la France ait connu jusqu’alors, s’éteint chez lui, le 7 juin 1888.