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Odilon Marc
LANNELONGUE
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Odilon Marc
LANNELONGUE
(Castera-Verduzan,
Gers, 4 décembre 1840 –
21 décembre 1911)
Français.
Médecin.
par
Agnès Granjon
Quelques dates :
1869, chirurgien des hôpitaux de Paris.
1882, tente en vain de sauver son ami Gambetta qui succombe
à une septicémie.
1883, élu à l’Académie de médecine.
1893,
élu député du Gers.
1895, devient membre de l’Académie des Sciences.
1896, fait en France les premières applications
des rayons X aux maladies des os.
1906, élu sénateur.
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Odilon-Marc Lannelongue naît le 4 décembre
1840 à Castera-Verduzan, un petit village du Gers, où son père exerce le
métier d’officier de santé. Orphelin de mère à 15 ans, le jeune Odilon
effectue une brillante scolarité à l’école communale, puis au lycée
impérial d’Auch. Après l’obtention de son bachot à Toulouse, il
s’installe en 1858 à Paris pour préparer l’Ecole Polytechnique. Mais,
suivant les traces paternelles, il se tourne finalement vers la médecine.
Il a alors pour professeurs Charles-Pierre Denonvilliers et Auguste Nélaton.
Interne en 1862, ce bourreau de travail obtient la médaille d’or en 1866
et passe son doctorat l’année suivante avec sa thèse sur « la
circulation veineuse des parois auriculaires du cœur ». L’étudiant
s’intéresse également à la politique. Ardent républicain, il se mêle
aux soirées du café Procope et se lie alors d’amitié avec Gambetta. Cet
engagement lui vaut en 1863 d’être menacé de révocation, à la suite de
sa participation à une manifestation des internes dans l’enceinte de Bicêtre.
Dès lors, le jeune homme se montrera plus mesuré dans ses engagements
politiques.
En 1868, tout en préparant l’agrégation de chirurgie, Lannelongue
travaille comme prosecteur, chargé de préparer les dissections et de
former les élèves à celles-ci. En 1869, il est reçu major à l’agrégation
de médecine et devient chirurgien des hôpitaux de Paris. Très vite, la
guerre arrive, suivie du siège de Paris et de la Commune. Chirurgien-major
des ambulances militaires de Bicêtre et d’Ivry, également chargé d’un
cours de chirurgie de guerre à la faculté et suppléant du professeur Paul
Broca à l’hôpital de La Pitié, le jeune médecin a alors aussi en
charge un service d’une soixantaine de lits installé par la Croix Rouge
au palais de l’Industrie. Il sillonne Paris en tout sens pour secourir les
blessés. C’est au chevet de l’un d’entre eux qu’il rencontre sa
future femme, Marie Cibiel, la riche veuve du vicomte Pierre de Rémusat. De
quatre ans son aînée, la pieuse Mme de Rémusat se consacre aux démunis
depuis son veuvage, et a ouvert une ambulance en son hôtel pour accueillir
les soldats blessés.
Durant la Commune, Lannelongue fait preuve d’une prudente neutralité. La
paix revenue, il devient rapidement l’un des chirurgiens les plus recherchés
de Paris. Il n’oublie cependant pas ses engagements politiques et, sous le
couvert de l’anonymat, soutient son ami Gambetta en écrivant plusieurs
articles médicaux pour son journal La République française. Il
succède aussi à son père décédé à la tête de la mairie de
Castera-Verduzan et y favorise le thermalisme. Le 22 novembre 1876, Odilon
Lannelongue épouse Marie de Rémusat à la mairie du 8ème
arrondissement de Paris. Une union religieuse est célébrée le lendemain
à la chapelle de l’Assomption. Les mariés partent ensuite pour Rome, où
ils reçoivent la bénédiction papale au cours d’une audience particulière.
L’amour et ses mutuelles concessions permettent au jeune couple de
surmonter leurs différences sociales, politiques et religieuses. Ce mariage
marque un tournant dans la vie de Lannelongue. Sa femme sera son alliée
discrète et sans faille tout au long de leur vie commune.
Rattaché à l’hôpital Sainte Eugénie, le jeune chirurgien se passionne
pour les découvertes médicales de son temps. Il se spécialise en
chirurgie infantile. Son sens clinique très fin, joint à la précision des
études de laboratoire qu’il dirige vont faire de lui un chirurgien réputé.
Ses recherches sur l’ostéomyélite lui permettent de démontrer en 1879
que toutes les formes d’ostéites (inflammations des os) ou de périostites
(inflammations du tissu entourant les os) s’identifient à une unique
maladie issue de la cavité médullaire (de la moelle osseuse). Fin 1882, il
tente en vain de sauver son ami Gambetta qui succombe à une septicémie,
suite sans doute d’une appendicite. Alors que le jeune chirurgien
pressentait l’infection, les grands noms de la médecine lui ont refusé
l’opération. En 1883, Lannelongue est élu à l’Académie de médecine
et devient chef de service à l’hôpital des Enfants Malades de Trousseau.
L’année suivante, il est nommé professeur de pathologie chirurgicale à
la faculté de médecine de Paris. Sur les traces de Pasteur, il s’intéresse
un temps aux méfaits du refroidissement. Par ses expériences, il atteste
que des cobayes sont plus résistants au bacille de la tuberculose s’ils
sont abrités dans une cave plutôt qu’en plein air en haut d’une
montagne. Lannelongue étudie également l’amélioration des techniques
chirurgicales. Il réussit ainsi à réséquer le rebord costal pour ôter
les tumeurs de la face convexe du foie et à découper circulairement la
calotte crânienne des microcéphales pour soulager le cerveau. Cette dernière
innovation est récompensée par le prix Monthyon que lui décerne l’Académie
des Sciences. Il réalise aussi les premiers essais de transplantation de la
glande thyroïde et se passionne pour les nouveaux instruments tels que le
microscope. Il est surtout l’un des premiers et fervents promoteurs de la
radioscopie. Ses moyens financiers lui permettent de mettre en place la
première installation radiographique hospitalière française à Sainte Eugénie
très peu de temps après la découverte de Röntgen. Dès le 10 février
1896, il présente avec Oudin à l’Académie des Sciences la radiographie
d’une ostéite diaphysaire (affection osseuse) du fémur d’un enfant de
8 ans. Il fait ainsi en France les premières applications des rayons X aux
maladies des os.
Lannelongue construit sa carrière en s’appuyant sur une équipe
d’assistants dévoués, Comby, Achard, Ménard ainsi qu’Auguste Broca à
partir de 1892. Ceux-ci effectuent pour lui les observations minutieuses de
ses patients et des recherches bibliographiques poussées. Leurs travaux
sont à la base de plusieurs de ses publications. De l’ostéomyélite
aiguë durant la croissance paraît en 1879, suivi en collaboration avec
Ménard, d’une série d’études sur la tuberculose osseuse : Abcès
froids et tuberculose osseuse en 1881, Coxotuberculose en 1886 et
Tuberculose vertébrale en 1888. Il publie également avec Achard le traité
des kystes congénitaux, somme de 1240 pages, en 1886, puis Leçons
de clinique chirurgicale en 1888, et en 1891 le traité des
affections congénitales de la tête et du cou. Dans ses Cliniques
chirurgicales, publié en 1905, Lannelongue témoigne aussi de ses
pratiques, et relate en particulier les derniers instants de son ami
Gambetta.
A partir de 1892, le professeur Lannelongue préside la société centrale
de l’association générale de prévoyance et de secours mutuels des médecins
de France. De son côté, son épouse Marie fonde à Clichy, en
collaboration avec les dames de l’association Notre Dame du Salut, une
nouvelle œuvre charitable pour « la préservation et la réhabilitation
des jeunes filles de quinze à vingt-cinq ans ». La politique attire
toujours autant Lannelongue, qui côtoie, et soigne parfois, les grands noms
de son époque, tels que Casimir Périer, Félix Faure et Armand Fallières.
Très attaché à son département natal, il se présente dès 1879 à la députation
et, après deux échecs successifs, il est élu député du Gers le 20 août
1893. Au cours de son mandat, il s’oppose à « l’invasion périlleuse
des ouvriers étrangers », obtient la création d’un doctorat
d’université pour les médecins étrangers, ainsi qu’un an de sursis
supplémentaire pour les étudiants en médecine et des crédits pour la
construction de l’Académie de Médecine dont les travaux débuteront en
1899. Lannelongue ne renouvelle cependant pas son mandat et reprend un poste
de chef de service en 1898 à l’hôpital des Enfants Malades. Entre-temps,
en 1895, alors que son ami Félix Faure accède à la présidence de la République,
il devient membre de l’Académie des Sciences en remplacement de Verneuil
le 25 novembre. Confident et médecin de Faure, le professeur a chargé son
fidèle Achard d’injecter régulièrement au président un médicament
sensé revigorer sa virilité défaillante. Le 16 février 1899, il assiste
aux derniers instants du président et veille à ce que sa dépouille ne
subisse pas d’autopsie.
Les Lannelongue mènent une vie mondaine animée en dehors des moments passés
dans leur château normand de Valmont. Adepte des congrès, le professeur
parcourt aussi l’Europe avec sa femme. Il participe au congrès
international de médecine et de chirurgie de Rome en 1894, puis à celui de
Moscou en 1897. La même année, les Lannelongue assistent à Londres en
tant qu’invités officiels au jubilé de la reine Victoria. En 1900, consécration
pour Odilon Lannelongue, il préside le XIIIe congrès international de médecine
qui se tient à Paris. L’année suivante, une chaire de clinique
chirurgicale infantile et orthopédique est créée spécialement pour lui
à l’hôpital des Enfants Malades. Mais le professeur la refuse, trop
pris, dit-il, par la politique. En décembre 1901, il est décoré de la médaille
de commandeur de la légion d’honneur. Ses dernières recherches visent,
en vain, à découvrir un sérum antituberculeux.
Quatre ans plus tard, le 7 janvier 1906, Lannelongue est élu sénateur par
les grands électeurs du Gers. Le 18 février suivant, il participe à l’élection
du président Fallières, Gascon comme lui. Le 1er juin 1906, sa
bien aimée Marie décède. Effondré, Lannelongue ne sera plus jamais le même.
Vers la fin de sa vie, il montre un intérêt accru pour l’histoire régionale. Il rédige
ainsi en 1903 avec La Morandière, Histoire de la maison
d’Estouteville, précédée de notes descriptives sur la contrée de
Valmont, suivi en 1908 par Le château et la contrée de Valmont.
D’octobre 1908 à juillet 1909, il entreprend un tour du monde, au cours
duquel il découvre successivement l’Indochine, la Chine, la Corée, le
Japon, le Canada et les Etats-Unis, et publie ses impressions dès son
retour. Dans son village natal de Castera-Verduzan, il fonde un petit musée,
et finance en 1911 un chantier de fouilles archéologiques à Séviac sur le
site d’une villa gallo-romaine. Début 1911, il est élu président de
l’Académie de Médecine et créé alors la médaille internationale de
chirurgie en souvenir de sa femme. Il décède le 21 décembre de la même
année. Sur ordres du président Fallières et de ses exécuteurs
testamentaires, l’ensemble de ses archives privées, jugées sans doute
compromettantes, sont détruites. Le professeur Lannelongue est enterré
dans son village natal, auprès de son épouse.
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