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Pierre-François LACENAIRE
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Pierre-François LACENAIRE
(Lyon,
20 décembre
1803 - Paris, 9 janvier 1836)
Français.
Criminel.
par Marc Nadaux
Quelques dates :
1834, Pétition d’un voleur à un roi, son voisin.
1835, arrêté, jugé et condamné à mort.
1836, Mémoires, révélations et poésies de Lacenaire
écrits par lui-même, à la Conciergerie.
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Pierre-François
Lacenaire est né le 20 décembre 1803, au sein d’une honorable famille
de commerçants établie près de Lyon. A partir de 1812, commencent ses
études qui le conduisent, comme chaque fils de bonne famille dans la région,
au lycée de Lyon. Lacenaire est ensuite admis au petit séminaire d’Alès
dont il est bientôt chassé en raison de son inconduite. Le jeune homme
s’installe alors à Chambéry où il entame une licence de droit en
1819.
Lacenaire abandonne bientôt sa qualité d'étudiant et, fort de ses
connaissances et de son savoir-vivre, il trouve à se placer, dans les années
qui suivent, chez un avoué puis chez un notaire où il est clerc, enfin
auprès d’un banquier. Cependant, les indélicatesses qui se répètent
auprès de ses employeurs, ses débauches dans la ville de Lyon le font
renvoyer après quelques mois d’activité.
Privé alors du soutien financier de sa famille avec la faillite de
l’entreprise paternelle, Lacenaire est bientôt contraint à chercher
refuge à Paris en 1825. Il sait s’y faire accueillir par les journaux
de l’opposition et entame une carrière littéraire, rédigeant à
l’occasion quelques pièces de vaudeville. Cependant, en 1826, Lacenaire
décide de s’engager dans l’armée française, avant de renoncer
quelques mois plus tard. A Paris, il reprend son activité journalistique
avant de renouveler l’expérience en 1828. Celle-ci s’achève l’année
suivante. Pierre-François Lacenaire déserte de nouveau lors de l’expédition
de Morée.
Un duel malheureux suite à un différent survenu avec un neveu de
Benjamin Constant, qu’il tue, le prive bientôt de ressources. Lacenaire
vole alors un cabriolet qu’il revend peu après. Arrêté, ce délit lui
vaut un an de réclusion. Il purge sa peine à la prison de Poissy et fait
là, dira-t-il par la suite, son "université criminelle".
Dès sa sortie en effet, Lacenaire fonde une association de malfaiteurs,
spécialisée dans l’organisation de vols à la tire et de cambriolages.
En 1833 cependant, il est de nouveau arrêté par la police parisienne
pour avoir dérobé l’argenterie d’un restaurant. Pierre-François
Lacenaire encourt bientôt une nouvelle condamnation. Son deuxième séjour
à la prison de Poissy doit cette fois-ci durer treize mois.
Il rédige alors une ballade, Pétition d’un voleur à un roi, son
voisin, qui le rend célèbre. Profitant de cette nouvelle notoriété,
Lacenaire collabore de manière régulière au journal Le Bon Sens,
que dirige Altaroche, un détenu politique. Il livre plusieurs papier à
cette feuille, dont un article remarqué sur le régime pénitentiaire, Les
Prisons et le régime pénitentiaire. L’ancien prisonnier y décrit
l’initiation criminelle et les mœurs infâmes qui sont de règle dans
les maisons centrales.
Sans argent, il assassine Chardon, un ancien camarade de prison, ainsi que
sa mère qui loge passage du Cheval-Rouge à Paris, avec l’aide d’un
complice nommé Avril. Ayant épuisé rapidement l’argent du crime,
Lacenaire se décide à commettre un nouveau forfait. Le 31 décembre 1834
et avec l’aide de François, il tente ainsi d’égorger le dénommé
Genevay, garçon de recettes d’une banque parisienne qui s’en
retournait de sa tournée. Attiré par les deux malfaiteurs, dans la cour
située au n°36 de la rue Marie Stuart, située entre la rue Montorgueil
et la rue Dussoubs, celui-ci parvient cependant à s’échapper. Après
l’échec de cette deuxième tentative, Lacenaire fuie alors la capitale
afin de se réfugier à Lyon. Sur le chemin cependant, il est arrêté à
Beaune, le 2 février 1835, sous le nom de Jacob Lévy, le meurtrier se prétendant
négociant en voyage.
Inculpé de faux en écriture par la rédaction de lettres de change
falsifiées, Pierre-François Lacenaire est bientôt identifié par le
policier Canler, la confrontation avec un témoin révélant sa véritable
identité. L’escroc devenu criminel est alors transféré à Paris et détenu
à la Conciergerie, en attendant l’ouverture du procès aux Assises de
la Seine. Celui-ci, pendant lequel Lacenaire est jugé en même temps que
ses complices, se déroule du 12 au 14 novembre suivant. Lacenaire et
Avril sont alors condamnés à mort, François voyant sa peine commuée en
travaux forcés à perpétuité.
Le procès cependant est suivi avec passion par l’opinion publique. En
effet, à l’ouverture de la première audience apparaît devant
l’auditoire qui assiste aux débats un jeune homme à la fine moustache,
vêtu avec élégance d’un redingote bleue à col de velours et qui
s’exprime bientôt avec aisance. Il tranche alors avec le public
habituel des cours d’Assises auquel appartiennent ses deux complices,
l’un ouvrier parqueteur et l’autre menuisier, mais tous deux figures
grossières et sans éducation du peuple des classes laborieuses.
Lacenaire s’emploie alors à démontrer la culpabilité d’Avril et de
François qui n’ont pas hésité à le dénoncer. Le dandy pour sa part
ne craint pas la peine capitale, il prend d’ailleurs la place de
l’avocat général en s’accusant également des crimes commis. Son
cynisme scandalise et fascine le public bourgeois qui se presse bientôt
dans l’enceinte du prétoire afin d’entendre et de voir Pierre-François
Lacenaire.
Après sa condamnation et en attendant l’exécution, Lacenaire
s’occupe à rédiger ses mémoires, bien éloigné des tourments du
remord. Ayant entamé une copieuse correspondance, il reçoit également
dans sa cellule la haute société parisienne qui vient solliciter des
autographes. Le condamné commente alors l’actualité en compagnie de
ceux, hommes d’Église et politiciens, savants ou journaliste, qui
sollicitent du criminel un entretien. Le vaudevilliste Jacques Arago
publiera ainsi le récit de ses conversations, intitulé Lacenaire après
sa condamnation. Pendant ces quelques semaines, la Conciergerie se
transforme en un lieu de mondanités tandis que le destin du " bandit
lettré " est bientôt le sujet des conversations à Paris et en
Province.
Pierre-François Lacenaire est guillotiné le 9 janvier 1836, au petit
matin, à la barrière Saint-Jacques, après s’être refusé à recevoir
les prières de l’aumônier. Sa mort est, elle aussi, le sujet d’un
scandale, le Garde des Sceaux intervenant personnellement afin
d’affirmer dans La Gazette des Tribunaux que le criminel n’a
pas su affronté l’échafaud sans trembler, montrant ainsi sa
repentance. La censure de la Monarchie de Juillet frappent également les
Mémoires, révélations et poésies de Lacenaire écrits par lui-même, à la
Conciergerie dont le texte publié quelques mois plus tard est
expurgé. Pierre-François Lacenaire y évoque ainsi les motivations de sa
" vengeance " à l’égard d’une société qui
n’a, selon lui, pas su lui donner la place qui lui revenait. L’ouvrage
donnera néanmoins corps au mythe qui vient de naître.
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