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Benjamin DISRAELI 

(Londres, 21 décembre 1804 - Londres, 19 avril 1881)


Anglais.

Homme politique.



par Marc Nadaux


 

     Quelques dates :

1824, devient avocat.
1826, publie un roman, Aylmer Papillion, qui connait le succès.
1837, élu à Maidstone, dans le Kent.
1843, forme le groupe réformateur des Young England.
1852, devient président du parti tory.
         Chancelier de l'Échiquier (ministre des Finances).
1866, accède au poste de premier ministre.
1867, se charge de l'élaboration de la réforme électorale.
1874, retour au pouvoir.
         la journée de travail dans l'industrie se réduit à dix heures.
1875, achat au khédive d'Égypte de ses actions du canal de Suez.
        négocie avec succès l'annexion du Transvaal en Afrique australe.
1876, anoblit.


 






Benjamin Disraeli naît à Londres le 21 décembre 1804. Il est issu d'une famille de marchands juifs italiens, originaires de la région de Ferrare et venus s'installer en Angleterre au milieu du siècle précédent. Son grand-père a fait fortune dans la finance et son père est devenu un homme de lettres réputé, à la fois critique, historien et romancier. Devenu sujet britannique en 1801, il s'attache à l'intégration des siens à la société britannique. Le 31 juillet 1817, ses cinq enfants sont baptisés et donc convertis à l'anglicanisme. Son fils aîné Benjamin effectue ses études dans une institution privée, l'Higham Hall School à Walthamstow, et entre en 1821 dans une étude de juristes de la City. Trois années plus tard, le jeune dandy s'inscrit à l'école de droit de Lincoln's Inn, avant de devenir avocat. En 1825, Benjamin Disraeli et son ami John Murray fondent un nouveau quotidien d'opinion, The Representative, qui ambitionne de concurrencer le très sérieux Times. L'aventure tourne court. Parallèlement à ses activités d'homme de droit, Disraeli spécule à la Bourse, pariant sur la réussite des compagnies sud-américaines. Mal lui en prend, il est bientôt couvert de dettes. Ceci le décide à suivre l'exemple paternel. Il publie deux romans - Aylmer Papillion en 1826 et Vivian Grey l'année suivante - qui connaissent le succès. Sa production s'enrichira par la suite d'autres volumes de critique, de réflexions politiques.

Cette réussite personnelle ne le met pas à l'abri des problèmes de santé. De 1827 à 1830, Disraeli souffre d'une dépression nerveuse. Suivant la mode du temps, il rompt ensuite cet isolement forcé en effectuant un long voyage sur les rivages méditerranéens. Il en reviendra cependant atteint de la syphilis, ne guérissant de cette maladie infamante que grâce à un traitement de choc à base de mercure. De retour en Angleterre, Disraeli mène une intense vie mondaine, collectionnant les conquêtes féminines. L'une d'entre-elles va d'ailleurs servir les vues de ce jeune ambitieux. De 1833 à 1836 en effet, celui-ci se lie avec lady Henrietta Sykes, l'épouse d'un homme politique en vue. Déjà en 1832 à Wycombe, dans le Buckinghamshire, puis de nouveau en 1835, Disraeli avait essuyé un échec aux élections législatives. A l'époque, il défendait un programme radical. Grâce à l'appui de lady Sykes, Disraeli entre l'année suivante au parti tory et est élu à Maidstone, dans le Kent, au mois de juillet 1837, et ce grâce au patronage de Lord Lyndhurst. Ses débuts à la Chambre des Communes sont laborieux cependant. Assis sur les bancs des Backbenchers - les élus sans grand relief - , son Maiden Speech - le premier discours d'un élu devant ses pairs - suscite les rires et l'amusement de l'assemblée, le 7 décembre suivant. Le ton emphatique de ce curieux jeune homme apparaît ainsi comme décalé dans ces lieux. Au mois d'août 1839, il se marie à Mary Ann Lewis, veuve d'un député conservateur. De douze ans son aînée, celle-ci lui apporte sa fortune et donc le confort matériel.



En 1844, Benjamin Disraeli publie un nouveau roman Sybil ou les deux nations, suivi quelques mois plus tard de Coningsby. Ces deux œuvres s'inscrivent dans la veine des romans sociaux, un genre littéraire qui permet notamment à Charles Dickens d'accéder à la célébrité. L'élu conservateur dénonce ainsi l'affrontement des classes sociales sous les effets de l'industrialisation de l'économie. Il souhaite ainsi revenir à un âge d'or, cette époque rêvée où les élites s'attachaient au bien-être du peuple, l'ensemble formant une seule nation. Si le parti tory rassemble à l'époque les grands propriétaires terriens, attachés à une vision statique de la société anglaise, Disraeli se veut lui être un conservateur progressiste et attentif à la misère qui s'étale dans les villes. Il soutient ainsi publiquement le mouvement chartiste et s'oppose également aux Poors Laws, les lois sur les pauvres qui réglementent l'attribution de l'aide publique. Celle-ci ont été réformées en 1834, peu avant l'avènement de la reine Victoria. Exclu du gouvernement conservateur formé par Robert Peel au mois d'août 1841, il doit rassembler d'autres volontés afin d'éviter l'isolement. Disraeli forme ainsi en1843 le groupe Young England, qui réunit autour de lui d'autres hommes politique réformateurs.

Ses idées avancées sur le plan social voisinent cependant avec une foi protectionniste décalée. Disraeli s'oppose ainsi avec force à la remise en cause des Corn-Laws, les lois sur les céréales qui réglementent leurs importations et protègent selon lui les intérêts des petits paysans. Si l'abolition de cette réglementation protectionniste est votée, la polémique entraîne la chute du gouvernement Peel et l'affaiblissement durable du parti tory, à présent divisé. En 1847, Disraeli milite en faveur de l'égalité des droits des juifs avec les anglicans, ce qui lui aliène une partie de ses amitiés politiques. L'année suivante cependant, il renforce son appartenance au milieu conservateur en faisant l'acquisition d'un vaste domaine à Hughenden, dans son fief électoral du Buckinghamshire. En 1852 enfin, il devient président du parti tory, prenant ainsi la succession de lord Derby. Celui-ci lui accorde d'ailleurs sa confiance au moment où il occupe le pouvoir. Benjamin Disraeli devient ainsi Chancelier de l'Échiquier (ministre des Finances) en 1852, puis en 1858-1859. Ces décennies d'expansion économique sont marquées par l'hégémonie du parti whigs, les libéraux, et le début d'une lutte entre le leader tory et Benjamin Gladstone. A la différence de ce dernier cependant, Disraeli, le dandy, parvient à gagner la confiance de la reine Victoria, qu'il tient au courant des affaires en cours. De nouveau au gouvernement du mois de juin 1866 au mois de novembre 1868, il accède pour la première fois au poste de premier ministre, suite à la maladie qui touche son aîné, lord Derby. C'est d'ailleurs Disraeli qui se charge en 1867 de l'élaboration de la réforme électorale. En doublant le corps électoral, celle-ci accorde le suffrage à des non-propriétaires, cette middle class qui prend de plus en plus d'importance. Le ministre conservateur est ainsi convaincu que la déférence du peuple envers les capacités feraient élire des représentants de l'élite par les voix populaires.



De nouveau dans l'opposition, Benjamin Disraeli se consacre à la rédaction d'un nouveau roman, Lothaire, publié en 1870, ainsi qu'à la réforme du parti tory. Est ainsi créée la National Union of Conservative Association, une fédération des associations de circonscriptions électorales. Celle-ci a pour vocation de rapprocher les élus de leurs électeurs, comme des militants. Disraeli crée également le Central office, placé sous l'autorité d'un président et qui dirige le parti. L'année 1872 enfin est marquée par deux discours importants - le 3 avril au Free Trade Hall de Manchester, le 24 juin au Crystal Palace de Londres - par lesquels il définit les orientations politiques des conservateurs. Face aux Little Englanders, Benjamin Disraeli se prononce ainsi pour une politique coloniale agressive et l'extension de l'Empire. Contre le mouvement républicain qui s'affirme, il rappelle également la vocation de son parti à défendre les institutions du pays, la monarchie notamment. Enfin, ne négligeant pas ses convictions profondes, Disraeli fait également le pari de réformes sociales hardies. Revenu au pouvoir en 1874, après une victoire historique des conservateurs aux élections législatives - la première depuis 1841 - , il peut alors mettre en place cette nouvelle politique.

A partir de 1874, la journée de travail dans l'industrie se réduit à dix heures, tandis que l'année suivante, avec l'Employers and Workmen Act, sont désormais interdites toutes poursuites à l'égard des ouvriers grévistes. Ces lois sociales sont complétées par un Public Health Act qui permet aux autorités d'intervenir en matière sanitaire et de logement. Ce conservatisme social travaille à l'unité nationale, le " one nation toryism ", de même que la politique extérieure menée par Benjamin Disraeli. Au mois de novembre 1875, celui-ci fait en effet racheter par son gouvernement au khédive d'Égypte ses actions du canal de Suez, procurant ainsi à l'Angleterre un accès direct vers les Indes. Afin de répondre à la proclamation sur le continent de l'Empire allemand, la reine Victoria devient d'ailleurs Impératrice des Indes l'année suivante. En 1877, Disraeli négocie avec succès l'annexion du Transvaal en Afrique australe. Enfin, pour prix de son intervention dans un conflit russo-turc, l'Angleterre annexe Chypre. Cette dernière intervention, qui provoque une crise internationale aiguë, voit aussi se développer au sein de l'opinion britannique un chauvinisme exacerbé, le jingoisme. C'est que tout ceci, cette politique impérialiste flatte l'orgueil nationaliste des sujets de la reine Victoria. A cette occasion, celle-ci accorde à son ministre, ce " cher Dizzy ", l'ordre de la Jarretière.



Depuis le mois d'août 1876 d'ailleurs, ce dernier a été anobli et porte à présent le nom de Lord Beaconsfield. Il siège à la chambre des Lords, loin des débats importants et de la vie parlementaire. Celle-ci s'anime. Le retournement de la conjoncture économique, comme les revers britanniques en Afghanistan ou en Afrique du Sud face aux tribus zoulous, donnent ainsi la possibilité à l'opposition libérale de renaître de ses cendres. L'éloquence de Gladstone se fait plus enflammée et les Tories sont bientôt défaits aux élections législatives de 1880. Benjamin Disraeli quitte alors définitivement le pouvoir. En 1880, il publie un dernier roman, Endymion. Tombé brusquement malade, il décède à Londres le 19 avril 1881.