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Marcelin BERTHELOT
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Marcelin BERTHELOT
(Paris,
25 octobre
1827
- Paris, 18
mars 1907)
Français.
Physicien.
par Marc Nadaux
Quelques dates :
1848,
entre à la faculté de Médecine
de Paris.
1854, soutient une
thèse de doctorat qui traite de la fabrication des premières
graisses artificielles.
1862,
parvient à synthétiser
l’acétylène.
1860, La Chimie
organique fondée sur la synthèse.
1863, titulaire de la nouvelle chaire de
chimie organique au
Collège de France.
Membre de l'Académie de
médecine.
1864, Leçons
sur les méthodes générales de synthèse.
1866,
élu président de la Société
chimique de Paris.
1869,
accompagne
l’Impératrice Eugénie à l’occasion de l’inauguration du
canal de Suez.
1873,
élu à l’Académie des Sciences.
1878,
président de la Commission des
substances explosives au Ministère de la Guerre.
1879,
Essai de mécanique chimique
fondée sur la thermochimie.
1881,
élu sénateur inamovible .
1895,
invité par Clemenceau parmi
les convives du banquet de Saint-Mandé.
1901, à la
Sorbonne, célébration du 50ème
anniversaire de la publication de son premier mémoire.
1907, funérailles nationales
et inhumation au Panthéon.
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Marcelin
Berthelot naît à Paris le 25 octobre 1827. L’enfant aura une sœur, prénommée
Léonie. Fils d’un médecin de quartier, aux origines modestes, il entre
en 1838 au collège Henri IV (le futur Lycée), après avoir effectué
quelques études élémentaires. Sa mère étant souffrante, le collégien
est placé à la pension Crouzet, sise rue de l’Abbé-de-l’Epée.
Berthelot obtient un prix d’honneur de philosophie, où il excelle, au
Concours général, en 1846, année de son Baccalauréat es Lettres. Deux
années plus tard, il est également titulaire du même diplôme, mais en
Mathématiques cette fois-ci. Au mois de novembre 1848, Berthelot entre
donc à la faculté de Médecine, devenant Licencié es Sciences peu de
temps plus tard.
L’étudiant
fréquente à cette époque les cours privés dispensés par Jules
Pelouze, du Collège de France, dans son laboratoire de la rue Dauphine.
En 1851, un autre illustre chimiste, Antoine Balard, le fait nommer auprès
de lui dans l’institution, en tant que préparateur. Toujours aussi peu
enclin à s’engager dans les affaires du temps, Berthelot se consacre
tout entier à ses recherches, celles qui vont contribué à « constituer
la chimie organique – ou chimie des molécules carbonées -, sur la base
de la synthèse (soit l’obtention par réaction chimique de substances
nouvelles ou présentes naturellement dans la nature)». Au mois d’avril
1854, après quelques communications mineures, il soutient une thèse de
doctorat intitulée « Mémoire sur les combinaisons de la glycérine
avec les acides et sur la synthèse des principes immédiats des graisses
des animaux », qui traite de la fabrication des premières graisses
artificielles.
Inscrit comme étudiant à l’Ecole supérieure de Pharmacie, le chimiste
devient docteur de cet autre domaine des sciences, après avoir mis en évidence
le « tréhaloze » et le « mélézitose », des
glucides analogues au sucre de canne. Au moment où est créée, par un décret
impérial du 2 décembre 1859, la première chaire d’enseignement de la
Chimie organique, à l’Ecole de Pharmacie, Berthelot vient de se voir
refuser l’entrée de la Faculté des Sciences. L’heure des honneurs
officiels n’a en effet pas encore sonné pour celui qui n’est âgé
que d’à peine trente ans. Ayant pressenti l’importance future de son
domaine d’investigation dans la fabrication de médicaments, ce nouveau
poste d’enseignant lui est cependant attribué.
Le 30
mai 1861, Marcelin Berthelot se marie à Sophie Niaudet, une jeune femme
d’une grande beauté, apparenté aux Bréguet, descendant de
l’horloger de la reine Marie-Antoinette. L’année précédente,
l’homme de science avait publié deux forts volumes, sous le titre de La
Chimie organique fondée sur la synthèse. L’ouvrage, goûté par
l’illustre historien Michelet, devenu l’ami de son auteur, avait fait
grand bruit. Celui-ci, titulaire de la Légion d’honneur, a à présent
ses entrées dans le monde. D’ailleurs, sa collaboration avec la firme
Menier de Noisiel lui permet d’augmenter de manière substantielle ses
revenus d’enseignant, et d’assurer ainsi à sa maison un train de vie
bourgeois. Ami de Renan, le critique littéraire, le chimiste et
scientiste participe ainsi aux dîners Magny, organisés au quartier Latin
par les frères Goncourt, où l’on retrouve Gautier, Flaubert, Gavarni,
Sand… A ses anciennes relations du collège Henri IV, s’ajoutent ainsi
les nouvelles célébrités du monde des lettres et des arts. Sainte-Beuve
le présente à la princesse Mathilde. Plus tard, en 1869, Berthelot
accompagnera l’Impératrice Eugénie dans son voyage en Egypte à
l’occasion de l’inauguration du canal de Suez.
Le 17 mars 1862 est également une journée qui aura compté dans
l’existence de Marcelin Berthelot. Dans le laboratoire du Collège de
France et sous les yeux d’Antoine Balard, il parvient à synthétiser
l’acétylène en combinant l’hydrogène et le carbone « sous
l’influence électrique ». L’année suivante, un cours de chimie
organique au Collège de France – et non une chaire comme il l’espérait
– est créé à son intention, grâce à l’action de Victor Duruy, son
ancien professeur au collège Henri IV. Ceci ne manque point de déclencher
la colère du grand savant Louis Pasteur. A la fin de l’année 1864, le
nouveau membre de l’Institut publie ses trente-deux Leçons sur les méthodes
générales de synthèse, issues de ses cours. Négligeant les travaux
de ses jeunes collègues, les « atomistes », Marcellin
Berthelot s’attache à décrire la « recomposition » des
différents produits chimiques, rendant ainsi obsolètes les théories
vitalistes et la « force vitale ».
Avec son ami Léon Péan de Saint-Gilles, il publie trois mémoires
relatifs à la formation des esters (la famille de composés organiques présentant
une fonction chimique bien particulière), dans la lignée donc de ses
travaux de thésard (on appelle cette formation une réaction d’estérification,
il s’agit de la synthèse d’un ester par réaction d’un alcool avec
un acide carboxylique). Ces travaux introduisent dans le domaine de la
chimie deux notions nouvelles, celle de « réaction limitée »
et celle d’ « équilibre chimique ». Précisons que la
réaction d’estérification possède la particularité de ne pas être
totale. En effet, tous ses réactifs de départ (l’alcool et l’acide
carboxylique) ne réagissent pas, donc ne disparaissent pas par
transformation chimique. La réaction est dite « limitée »,
son rendement n’est pas de 100%. Il s’établit un « équilibre
chimique » entre ce qu’il reste des réactifs de départ et les
produits formés (ester et eau). Il est possible de déplacer cet équilibre
dans un sens comme dans l’autre en jouant sur des paramètres physiques
extérieurs tels que la pression ou la température. L’étude de ces
paramètres afin d’optimiser le rendement d’une réaction limitée se
nomme la thermochimie. Le 8 août 1865 enfin, la chaire tant attendue est
créée pour l’homme de sciences, âgé à l’époque de trente-huit
ans.
En
1866, Marcelin Berthelot est élu président de la Société chimique de
Paris. Membre de l’Académie de Médecine depuis le mois de décembre
1863, le savant subit cependant un troisième échec à l’Académie des
Sciences. Quelques années plus tard, il se voit néanmoins attribué, de
nouveau grâce à son ami Duruy, le titre de Directeur du Laboratoire de
l’Ecole Pratique des Hautes Etudes, récemment inaugurée. Après la déclaration
de guerre du Second Empire à la Prusse et le désastre de Sedan qui
s’en suivit, la République est proclamée, le 4 septembre 1870, tandis
que le siège de la capitale par les troupes ennemies commence. A présent
père de cinq enfants, Berthelot place sa famille à l’abri des combats,
à Honfleur, dans la Normandie voisine, avant de revenir à l’intérieur
des murs de la capitale affamée. Là, il est nommé président du Comité
scientifique de Défense nationale, alors que le toit de son appartement,
boulevard Saint-Michel, est partiellement détruit par un obus prussien.
Candidat malheureux aux élections à la Chambre des députés, organisées
peu après l’armistice signé le 29 janvier 1871, Marcelin Berthelot
quitte Paris et la France, et gagne l’Angleterre voisine peu après la
proclamation de la Commune parisienne. Le savant « patriote » ne
rentrera dans la capitale qu’au début du mois de juin suivant, après
l’écrasement du mouvement insurrectionnel par Adolphe Thiers et les
forces versaillaises. De nouveau, le professeur au Collège de France peut
se consacrer à ses travaux scientifiques, qui ont pris ces dernières années
une nouvelle orientation, celle de la « thermochimie ».
Il publie ainsi en 1879 un Essai de mécanique chimique fondée sur la
thermochimie qui dresse un premier bilan de ses travaux. Ceux-ci
s’inspirent des découvertes antérieures, celles du danois Julius
Thomsen notamment. A l’heure où l’on distingue molécules et atomes
et où le russe Dimitri Mendeleïev a publié son « Tableau périodique
des éléments », le savant français a délaissé la chimie
organique et la synthèse. Ayant également rédigé pendant le siège de
Paris un opuscule, La Force de la poudre et des matières explosives,
il est choisi par le ministère de la Guerre pour faire partie du Comité
des Poudres et devient même, le 14 juin 1878, président de la Commission
des substances explosives, un domaine de la science militaire en pleine
mutation depuis le Second Empire. Thermochimie et substance explosive se
rejoignent bientôt quant Berthelot s’essaie à prévoir le comportement
détonant de certaine substances à l’aide de mesures calorimétriques
(la calorimétrie est une technique d’analyse permettant l’étude des
échanges de chaleur lors de réactions chimiques). Ainsi, le savant met
en évidence les propriétés explosives du nitrate d’ammonium (pour la
petite histoire, c’est ce qu’il s’est passé en septembre 2001 pour
l’usine AZF de Toulouse…), jusqu’alors considéré comme inerte. En
1883, il fera paraître un nouveau traité, Sur la force des matières
explosives d’après la Thermochimie, suivi en 1893 d’un Traité
pratique de calorimétrie. Vient ensuite le temps où Marcelin
Berthelot s’intéresse au cycle de l’azote, et donc aux végétaux et
aux sols. A Meudon, sur un terrain cédé par l’Etat au Collège de
France dans le but d’y installer une station de chimie agricole, il se
fait construire une haute tour destiné à étudier l’action de l’électricité
atmosphérique sur ces éléments naturels…
A cette époque cependant, Berthelot, enfin élu à l’Académie des
Sciences, dans la section de Physiques et non dans celle de Chimie, le 3
mars 1873, nommé Ingénieur général de l’enseignement supérieur, est
entré en politique. Ses débuts sont laborieux cependant et jalonnés de
candidatures malheureuses ou avortées, à la députation en 1871 et 1875
notamment. Après avoir fait parti – timidement - , de quelques cercles
parisiens et de gauche, le savant est enfin élu sénateur inamovible en
1881. Quelques années plus tard, prenant la suite de Jules Ferry, René
Goblet appelle l’homme de sciences au ministère de l’Instruction
publique et des Beaux-Arts dans le cabinet qu’il vient de former.
Celui-ci sera éphémère.
Le secrétaire perpétuel à l’Académie des Sciences, Grand Officier de
la Légion d’honneur, est invité par Georges Clemenceau parmi les
convives du banquet de Saint-Mandé, dont le but est « d’honorer
la science comme base de la politique républicaine ». Celui-ci
rassemble plus de 800 invités au Salon des Familles, dans l’Est
parisien, le 4 avril 1895. Quelques mois plus tard, le 1er novembre
suivant, Marcelin Berthelot est nommé aux Affaires Etrangères aux cotés
de Léon Bourgeois, le président du Conseil.
Au Quai d’Orsay, il ne peut qu’inscrire son action dans le
prolongement de celle de son illustre prédécesseur, Gabriel Hanotaux.
Berthelot informe notamment la Chambre des députés de l’évolution de
la situation à Madagascar, une île où la France venait de proclamer son
protectorat , le 1er octobre. Les événements de Haute Egypte, où la
France et l’Angleterre avaient des intérêts communs, précipitèrent
sa démission le ministre maladroit ayant au passage froissé par son
langage peu diplomatique les successibilités outre-Manche.
Le 24 novembre 1901, Berthelot, le savant, se voit honoré par la Troisième
République. Dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, est en effet célébré
le cinquantième anniversaire de la publication du premier mémoire du
savant. Celui-ci, accablé par la disparition de son épouse, le 18 mars
1907, décède ce même jour d’une crise cardiaque dans son appartement
de l’Institut. Le 26 mars suivant, des funérailles nationales sont
organisées en son honneur, au cours de laquelle Marcelin et Sophie
Berthelot sont inhumés au Panthéon.
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