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Etienne ARAGO
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Etienne ARAGO
(Perpignan, 9 février 1802 -
Paris, 6 mars 1892)
Français.
Homme
politique.
par Marc Nadaux
Quelques dates :
1822, assiste à l’exécution des quatre sergents de La
Rochelle.
1830, décoré de la croix de Juillet
.
1842,
au théâtre,
Les Mémoires du diable.
1848,
prendre la direction des Postes, le 24février.
élu député de la future Assemblée constituante.
1849, exil après la
manifestation du 13 juin.
1859, de retour à Paris.
1870,
proclamé maire de Paris.
1871, élu de nouveau
député.
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Etienne Arago
naît le 9 février 1802 à Perpignan. Ses parents viennent alors de
quitter Estagel pour le chef-lieu du département où Bonaventure Arago a
été nommé directeur de l’Hôtel de la Monnaie sous le Consulat.
Choyé par ces derniers, par sa mère Marie Roigt notamment, âgée à l’époque
de 46 ans, l’enfant est élevé suivant les principes de la religion. Il
entre très tôt au collège de Sorèze, une institution tenue par les
Bénédictins, fort réputée. Cependant, avec le retour des Bourbons et
la révocation de son père, faute de moyens financiers, il en est retiré
en 1816. Grâce à l’aide de son frère François, membre de l’Institut
depuis 1809, Etienne Arago est accueilli à l’Observatoire de Paris,
avant d’être placé auprès de Louis Joseph Gay-Lussac à l’École
Polytechnique en 1819.
Celle-ci est à l’époque connue pour son républicanisme et par l’activisme
de ses étudiants. Arago y fait bientôt la rencontre d’Auguste Comte et
surtout d’Eugène de Cavaignac. Ensemble, les deux jeunes gens sont
initiés à la Charbonnerie, une société secrète venue de l’Italie
voisine. Ces sympathies avec les milieux militants l’obligent à quitter
Polytechnique, sans renoncer pour autant à ses convictions politiques. Il
participe ainsi à l’évasion de compagnons républicains, dont Joseph
Merilhou, futur pair de France et Garde des Sceaux sous le Monarchie de
Juillet, enfermés à la prison de Perpignan. Le 21 septembre 1822,
Etienne Arago assiste également à l’exécution des quatre sergents de
La Rochelle avant de rejoindre l’Espagne et ceux qui luttent contre l’expédition
du Duc d’Angoulême, venue au secours des Bourbons.
A son retour à Paris, après avoir fait la connaissance d’Auguste
Lepoitevin de l’Egreville et d’Honoré de Balzac, il se lance dans une
carrière littéraire. Ensemble les trois amis rédigent au cours des
années qui suivent de nombreux vaudevilles, courts romans et autres
pièces de théâtre. Sans grand succès. Le 15 janvier 1826, poursuivant
son activité de plume, Etienne Arago fonde un journal baptisé Le
Figaro. Placé sous la gestion de Maurice Alhoy, cette feuille
hebdomadaire, qui se destine à couvrir l’actualité des arts et de la
mode, ne trouve cependant pas son lectorat. L'affaire est cédée trois
semaines plus tard à Lepoitevin Saint-Alme qui fera du premier Figaro
un des grands journaux du temps. Arago continue lui à livrer de nombreux
articles de critique et d’actualité pour la presse parisienne, avant d’être
nommé en 1829 à la direction du Théâtre du Vaudeville.
Affirmant toujours ses convictions républicaines, Etienne Arago ne peut
qu’être indigné par la publication des quatre ordonnances par le roi
Charles X le 25 juillet 1830. Coïncidant avec la dissolution de la
Chambre, celles-ci sont contraires à l'esprit de la Charte et sonnent
comme un véritable coup d’État politique. Le lendemain, Arago assiste
au discours que prononce son frère lors de l’inauguration de ses
nouvelles fonctions de secrétaire perpétuel pour les mathématiques à l’Académie
des sciences. Cet éloge funèbre d’Augustin Fresnel sonne comme une
véritable critique du régime. Le public présent est enthousiaste. Le
lendemain, sonné par la crise économique, Paris se couvre de barricades.
La directeur du Vaudeville ferme son théâtre et se met alors à la tête
des insurgés. Il est sur tout les fronts pendant les Trois Glorieuses
qui conduisent à la chute des Bourbons.
S’il se voit décerné la croix de Juillet par le nouveau souverain au
mois de novembre suivant, Etienne Arago dénonce peu après la révolution
confisquée au profit des Orléans. Le 14 février 1831, il est à Saint
Germain-l’Auxerrois où éclate une émeute anticléricale que doit
réprimer son frère François, alors officier de la Garde nationale. On
le retrouve dans la foule des manifestants lors des funérailles du
général Lamarque, le 5 juin 1832. Deux années plus tard, après les
insurrections républicaines à Lyon et à Paris, les autorités arrêtent
de nombreux activistes de la Société des Saisons. Ceux-ci choisissent
Arago comme défenseur lors de leur procès, un choix qu’écarte la
Chambre des Pairs. Le 12 juillet 1835, aux cotés d’Armand Barbès, il
parvient à faire évader 28 des 164 conjurés de Sainte-Pélagie, leur
prison parisienne.
Quelques années plus tard, au mois de juillet 1838, le Vaudeville est
ravagé par un incendie. Installé ensuite boulevard Bonne-Nouvelle, son
directeur est néanmoins renvoyé par les actionnaires, au mois de
novembre 1839. Ces derniers reprochent ainsi à Etienne Arago sa gestion
aventureuse de l’établissement. Celui-ci connaît de grandes
difficultés financières. Il doit faire face à ses nombreux financiers
et reprend ainsi son travail de plume. En 1842, une de ses pièces, Les
Mémoires du diable, écrite en collaboration avec Paul Vermond,
obtient un joli succès. Son auteur adhère bientôt à la Société des
Gens de Lettres, aux cotés de son ancien ami Balzac. Il récidive en 1847
avec une comédie en cinq actes, Les Aristocrates, jouée au
Théatre-Français. Etienne Arago collabore également au journal La
Réforme, dans lequel il publie un feuilleton, Les Bleus et les
Blancs, sur les guerres de Vendée. En 1846, il participe à la
fondation de L’Indépendant des Pyrénées orientales, qui
soutient la candidature de son frère François lors des élections
législatives.
A partir de 1840, la vie politique de la Monarchie de Juillet est dominée
par François Guizot et les conservateurs. Ceux-ci n'acceptent désormais
aucune réforme, en particulier à propos du mode de scrutin des
élections qui demeure censitaire. Les mouvements réformistes et
révolutionnaires se multiplient alors tandis que le mécontentement est
aiguisé par les crises économiques. L'interdiction d'une manifestation,
le 22 février 1848, provoque bientôt une émeute dans la capitale
parisienne. Le surlendemain, le palais des Tuileries est pris d'assaut,
Louis-Philippe Ier doit abdiquer. Un gouvernement provisoire est alors
formé, dans lequel figure François Arago, qui se prononce peu après en
faveur de la République. Son frère Etienne lui aussi a pris part aux
événements. Tirant les leçons de l'échec des Trois Glorieuses,
il dirige la foule en armes, avant de prendre opportunément la direction
des Postes, dans l’après-midi du 24 février. Celle-ci doit donner aux
insurgés la main sur les départements. Etienne Arago informe ainsi la
France de la déchéance de Louis-Philippe d’Orléans et de la
proclamation d’une nouvelle République. Il est bientôt confirmer
officiellement dans ses nouvelles fonctions.
Le nouveau directeur entend réorganiser l’institution, qui devient un
véritable service public. Il augmente les salaires les plus bas et
diminue les plus hauts, faisant également peser une nouvelle discipline
au sein des différents services. Dans un soucis d’efficacité, Etienne
Arago demande de nouveaux moyens pour les Postes, des wagons notamment. Si
l’envoie des journaux est à présent détaxé, de nombreuses dispenses
d’affranchissement disparaissent au nom de la rentabilité. Poursuivant
son activité politique, il est élu le 23 avril 1848 député de la
future Assemblée constituante dans les Pyrénées-Orientales, tout comme
son frère et son neveu. Figurent ainsi trois Arago parmi les cinq
parlementaires qui représentent le département à Paris ! Le 15
mai, le nouveau député se tient éloigné de la manifestation qui
réunit les Montagnards dans une protestation commune contre l’attitude
neutraliste de Lamartine, le ministre des Affaires étrangères, face aux
événements de Pologne. Celle-ci tourne d’ailleurs à l’émeute et au
complot contre les autorités, sous l’action des partisans d’Auguste
Blanqui. Les plus chauds républicains sont arrêtés ou en fuite.
Soupçonné de complicité, Etienne Arago est néanmoins maintenu à son
poste.
Le 24 août 1848, l’Assemblée vote enfin sur sa proposition le décret
sur le système postal. Celui-ci signifie l’adoption du timbre-poste à
partir du 1er janvier 1849, suivant le modèle anglais. Une réforme qu’Arago
juge " généreuse et fraternelle ". Celle-ci
nécessite cependant un impressionnant travail d’impression du futur
timbre à l'effigie de Cérès et d’apposition d’affiches décrivant
leur emploi aux populations. Soutenu par son ancien ami, le général
Cavaignac, devenu chef de l’exécutif suite aux Journées de Juin,
Etienne Arago se consacre à cette immense tache. Comme son neveu
Emmanuel, à l’époque ambassadeur de la Seconde République à Berlin,
il donne cependant sa démission le 10 décembre 1848, au soir de l’élection
de Louis-Napoléon Bonaparte à la présidence de la République. Seul son
frère François est candidat aux élections législatives du mois de mai
1849, Etienne pour sa part y renonce. Le 13 juin suivant, aux cotés de
Ledru-Rollin, il est un des principaux organisateurs d’une manifestation
de la gauche républicaine qui protestent contre l’expédition de Rome.
Celle-ci est réprimée dans le sang par le nouveau pouvoir et Arago doit
s’exiler. Le 7 juillet 1849, il est en Belgique.
En France, il est condamné par contumace à la déportation et à la
saisie de ses biens. Assigné à résidence à Spa, Etienne Arago rédige
en 1851 une diatribe sur la ville en forme de poème qui lui assure la
célébrité. Il s’installe ensuite à Bruxelles, créant une Commission
d’assistance fraternelle, qui par des loteries ou des appels à la
solidarité, vient financièrement en aide aux proscrits de l’Empire. En
1853 cependant, un poème en cinq chants, Le Deux Décembre, le
fait expulser du pays. Il gagne la Hollande, puis Genève et enfin Turin
où Georges Sand lui rend visite. Le 15 août 1859, peu après la victoire
de Solférino, Napoléon III signe un décret d'amnistie des proscrits
républicains du coup d'État. Contrairement à d’autres illustres
compagnons d’exil - Louis Blanc, Victor Hugo, Victor Schœlcher, Armand
Barbès, Edgar Quinet… - , Arago décide alors de rentrer en France
après dix années passées à l’extérieur de ses frontières.
L’année suivante, il publie Une Voix de l’exil puis Les
Postes en 1848. L’ancien député de la Constituante s’éloigne de
la vie politique, cadenassée par les autorités avec le système des
candidatures officielles. Il livre quelques articles au journal Le
Siècle sous le pseudonyme de Jules Ferney, ce qui lui assure de
maigres revenus, puis lance Le Corsaire en 1869, après la
promulgation d'une loi qui accorde quelques libertés à la presse. La
même année, Etienne Arago apporte son concours à son neveu Emmanuel,
bientôt élu député du Corps législatif. En sa compagnie, il
fréquente le petit cercle des opposants au Second Empire, Léon Gambetta
notamment. Arago vote les crédits nécessaires à la déclaration de
guerre à la Prusse. Après quelques semaines de combat, le 1er septembre
1870, Napoléon III et les troupes françaises sont encerclées à Sedan.
Plus tard, les députés républicains se prononcent pour la déchéance
du régime en place, avant que la République ne soit proclamée à l'Hôtel-de-Ville,
le 4 septembre.
Un gouvernement provisoire se forme placé sous la présidence du
populaire général Trochu et qui ordonne la résistance à outrance face
à l'ennemi. Dans ses rangs figurent les principaux hommes politiques
républicains, dont Emmanuel Arago, ministre sans portefeuille. Son oncle
Etienne est proclamé maire de Paris. Cependant, quelques jours plus tard,
le 19 septembre suivant, les troupes allemandes encerclent la capitale.
Commence alors le long et terrible siège de la capitale. Entre temps,
Etienne Arago s’est entouré d’une équipe de collaborateurs, des
militants républicains comme le jeune Georges Clemenceau à qui il offre
la mairie du XVIIIème arrondissement. Le premier maire de Paris doit s’employer
sur plusieurs fronts : le ravitaillement et l’hygiène dans les
rues de la ville, le soin des blessés et des malades, la répression de l’agitation…
Des élections municipales sont organisées le 6 novembre 1870, qui
confirment ses choix. Arago lui n’est pas candidat à sa propre
succession. Il démissionne d’ailleurs le 15 novembre, étant remplacé
par Jules Ferry, ministre du gouvernement de la Défense nationale avec
une " délégation près l'administration du département de la Seine
". Plus tard, mis en cause par une commission d’enquête le jugeant
en partie responsable de la naissance de la Commune, Etienne Arago
justifiera son administration dans une brochure intitulée L’Hôtel
de ville de Paris au 4 septembre et pendant le siège.
Il refuse ensuite sa nomination à la direction de la Commission des
Monnaies et Médailles. Le 8 février 1871 en effet, Arago est élu
député des Pyrénées-Orientales, tout comme son neveu, l’ancien
ministre du Gouvernement provisoire. Il résilie également ce nouveau
mandat de parlementaire, invoquant son age, et part en Italie, en tant qu’envoyé
extraordinaire du gouvernement. A son retour, Etienne Arago se consacre à
la mise en ordre de ses finances : il vend quelques toiles provenant
de sa collection. Éloigné des allées du pouvoir, le militant
républicain, celui qui a été de toutes les révolutions du siècle,
fréquente à présent les cercles artistiques et littéraires. Il se
passionne pour le problème de la reconstruction des Tuileries, incendiées
par les communards, avant d’être nommé archiviste de l’École des
beaux-arts, le 12 février 1878. Le président du Conseil Jules Ferry, qu’Arago
a côtoyé en d’autres temps, lui confie l’année suivante le musée
du Luxembourg, consacré à l’époque aux œuvres des artistes vivants.
Au soir de sa vie, pendant une dizaines d’année, le conservateur se
consacre à l’organisation des lieux, qu’il juge trop exigus, à la
mise en place des collections. Curieusement, il ne se passionne que peu
pour le mouvement impressionniste et ceux-ci ne sont pas exposés au
Luxembourg. Avec le retour du Sénat dans ses murs, le musée est
transféré à Versailles à l’Orangerie et, pour l’inauguration des
nouveaux locaux, le 1er avril 1886, le directeur reçoit son vieil ami, le
président Jules Grévy, celui auprès de qui il siégeait en 1848 sur les
bancs de la Constituante.
Etienne Arago décède à Paris, le 6 mars 1892.
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