La lettre d'infos


A voir et à lire
sur
19e.org,
et ailleurs.

S'abonner à la lettre d'infos
 

 L'actualité
sur 19e.org

 
 

 A voir sur le Web

     Vous êtes ici :   Accueil   Documents   La Troisième République                                           Contact
                                                                                Le suffrage universel

 

Le suffrage universel.


Loi du 29 juillet 1913
" ayant pour objet d'assurer
le secret et la liberté du vote
ainsi que la sincérité des opérations électorales ".



par Marc Nadaux


 





Le secret du vote est la condition sine qua non du système démocratique. Déjà entré dans les mœurs du citoyen athénien pendant l'Antiquité, il faut attendre cette loi de 1913 pour voir apparaître dans la France de la Troisième République l'enveloppe, l'urne - celle que nous connaissons de nos jours - et l'isoloir. C'est d'ailleurs avec beaucoup de détails que les articles 3, 4 et 5 nous décrivent ces divers instruments de l'électeur moderne. Car le problème est de taille. Si la formule veut qu'il faut " avoir le courage de ses opinions ", encore faut-il que celles-ci puissent s'exprimer librement. Et comment résister au regard désapprobateur du notable ? Si ce n'est en faisant en sorte que celui-ci ne se porte pas sur le bulletin du votant. 








   RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

LIBERTÉ – ÉGALITÉ – FRATERNITÉ



MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR



LOI DU 29 JUILLET 1913 AYANT POUR OBJET
D’ASSURER LE SECRET ET LA LIBERTÉ DU VOTE
AINSI QUE LA SINCÉRITÉ DES OPÉRATIONS ÉLECTORALES.



Article Premier . Nul ne peut être inscrit sur plusieurs listes électorales.
   Lorsqu’un citoyen est inscrit sur plusieurs listes électorales, le maire, ou, à son défaut, tout électeur porté sur une de ces listes peut exiger, devant la commission de révision des listes électorales, huit jours au moins avant leur clôture, que ce citoyen opte pour son maintien sur l’une seulement de ces listes.
   A défaut de son option dans les huit jours de la notification de la mise en demeure faite par lettre recommandée, il restera inscrit sur les listes dressées dans la commune ou section de commune où il réside depuis six mois et il sera rayé des autres listes.
   Les réclamations et contestations à ce sujet sont jugées et réglées par les commissions et juges de paix compétents pour opérer la révision de la liste électorale sur laquelle figure l’électeur qui réclame l’option, et ce, suivant les formes et délais prescrits par le décret organique du 2 février 1852 et la loi du 7 juillet 1874.
   Toute personne qui aura réclamé et obtenu une inscription sur deux ou plusieurs listes sera punie des peines prévues par l’article 31 du décret organique du 2 février 1852.
   Toute demande de changement d’inscription devra être accompagnée d’une demande en radiation de la liste du domicile électoral antérieur, pour être transmis au maire du dit domicile.
   Toute fraude dans la délivrance ou la production d’un certificat d’inscription ou de radiation des listes électorales sera punie des peines portés à l’article 12 de la présente loi.

Article 2 . Le paragraphe 3 de l’article 14 de la loi du 5 avril 1884 est ainsi modifiée : " la liste électorale comprend : 1. Tous les électeurs qui ont leur domicile réel dans la commune ou y habitent depuis six mois au moins ; 2. Ceux qui figureront pour la cinquième fois sans interruption, l’année de l’élection au rôle d’une des quatre contributions directes ou sur le rôle des prestations en nature, et s’ils ne résident pas dans la commune, auront déclaré vouloir y exercer leurs droits électoraux.
   Néanmoins les électeurs qui en vertu des dispositions du § 3 n°2 de l’article 14 de la loi du 5 avril 1884 ont été inscrit sur une liste électorale continueront à y figurer de plein droit ou pourront s’y faire réintégrer s’ils ont été rayé d’office, alors même qu’ils ne seraient pas inscrits pour la cinquième fois aux rôles d’une des quatre contributions directes ou des prestations.
   Les citoyens français établis à l’étranger et immatriculés au consulat de France conserveront le droit d’être inscrits, s’ils le demandent, sur la liste électorale de la commune où ils ont satisfait à la loi sur le recrutement de l’armée et rempli leurs obligations militaires.

Article 3 . Dans toutes les élections, le vote a lieu sous enveloppes.
   Ces enveloppes sont fournies par l’administration préfectorale.
   Elles sont opaques, non gommées, frappées du timbre à date des préfectures ou des sous- préfectures, et de type uniforme pour chaque collège électoral.
   Elles seront envoyées dans chaque mairie, cinq jours au moins avant l’élection, en nombre égal à celui des électeurs inscrits.
   Le maire devra immédiatement en accuser réception.
   Le jour du vote, elles seront mises à la disposition des électeurs dans la salle du vote.
   Avant l’ouverture du scrutin, le bureau devra constater que le nombre des enveloppes correspond exactement à celui des électeurs inscrits.
   Si, par suite d’un cas de force majeure, du délit prévu à l’article 12, ou pour tout autre cause par , ces enveloppes réglementaires font défaut, le président du tribunal électoral est tenu de les remplacer par d’autres, d’un type uniforme, frappées du titre de la mairie, et de procéder au scrutin conformément aux dispositions de la présente loi. Mention est faite de ce remplacement au procès-verbal, et cinq des enveloppes dont il a été fait usage y sont annexées.

Article 4 . A son entrée dans la salle du scrutin, l’électeur, après avoir fait constaté son identité suivant les règles et usages établis, ou après avoir fait la preuve de son droit de voter par la production de la décision ou de l’arrêté mentionné à l’article 213 de la loi municipale du 5 avril 1884, prend lui-même une enveloppe. Sans quitter la salle du scrutin, il doit se rendre isolément dans la partie de la salle aménagée pour le soustraire aux regards pendant qu’il met son bulletin dans l’enveloppe ; il fait ensuite constater au président qu’il n’est porteur que d’une seule enveloppe : le président le constate sans toucher l’enveloppe que l’électeur introduit lui-même dans l’urne.
   Dans chaque section de vote, il y aura un isoloir par trois cent électeur inscrits ou par fraction. Les isoloirs ne devront pas être placés de façon à dissimuler au public les opérations électorales.

Article 5 . L'urne électorale n'ayant qu'une ouverture destinée à laisser passer l'enveloppe contenant le bulletin de vite devra, avant le commencement du scrutin avoir été fermée à deux serrures dissemblables, dont les clefs restent, l'une entre les mains de l'assesseur le plus âgé.
   Si, au moment de la clôture du scrutin, le président n'a pas les deux clefs à sa disposition, il prendra toutes les mesures nécessaires pour posséder à l'ouverture de l'urne.

Article 6 . Tout électeur atteint d'infirmités certaines et mettant dans l'impossibilité d'introduire son bulletin dans l'enveloppe et de glisser celle-ci dans la boite du scrutin, est autorisé à se faire assister par un électeur de son choix.

Article 7 . Les frais de fourniture des enveloppes et ceux qu'entraîne l'aménagement spécial prévu à l'article 4 seront à la charge de l'État.

Article 8 . Après la clôture du scrutin, il sera procédé au dépouillement de la manière suivante : la boite du scrutin est ouverte et le nombre des enveloppes est vérifié. Si ce nombre est plus grand ou moins grand que celui des émargements il en est fait mention au procès-verbal. Le bureau désigne parmi les électeurs présents un certain nombre de scrutateurs sachant lire et écrire, lesquels se divisent par tables de quatre au moins. Si plusieurs candidats ou plusieurs listes sont en présence, il leur sera permis de désigner respectivement les scrutateurs, lesquels devront être répartis également autant que possible dans chaque table de dépouillement. Dans ce cas, les noms des électeurs proposés seront remis au président, une heure avant la clôture du scrutin, pour que la liste des scrutateurs du scrutin puisse être établie avant le début du dépouillement. Le président répartit entre les diverses tables les enveloppes à vérifier. A chaque table, l'un des scrutateurs extrait le bulletin de chaque enveloppe et le passe déplié à un autre scrutateur ; celui-ci le lit à haute voix ; les noms portés sur les bulletins sont relevés par deux scrutateurs au moins sur des listes préparées à cet effet. Si une enveloppe contient plusieurs bulletins, le vote est nul, quand ces bulletins portent des listes et des noms différents ; il ne compte que pour un seul quand ils désignent la même liste ou le même candidat.

Article 9 . Les bulletins blancs, ceux ne contenant pas une désignation suffisante ou dans lesquels les votants se font connaître, les bulletins trouvés dans la boite sans enveloppe ou dans des enveloppes non réglementaires, les bulletins écrits sur papier de couleur, les bulletins ou enveloppes portant des signes intérieurs ou extérieurs de reconnaissance, les bulletins ou enveloppes portant des mentions injurieuses pour des candidats ou pour des tiers n'entrent pas en compte dans le résultat du dépouillement.
   Mais ils sont annexés au procès-verbal, ainsi que les enveloppes non réglementaires et contresignés par les membres du bureau.
   Chacun de ces bulletins annexés devra porter mention des causes de l'annexion.
   Si l'annexion n'a pas été faite, cette circonstance n'entraînera l'annulation des opérations qu'autant qu'il sera établi qu'elle aura eu pour but et pour conséquence de porter atteinte à l'a sincérité du scrutin.

Article 10 . L'article 33 du décret réglementaire du 2 février 1852 est modifié ainsi qu'il suit :
   " Les procès-verbal des opérations électorales de chaque commune sont rédigés en double. L'un de ces doubles restera déposé au secrétariat de la mairie ; l'autre sera déposé de suite à la poste sous pli scellé et recommandé à l'adresse du préfet pour être remis à la commission de recensement ".

Article 11 . L'article 34 du décret réglementaire du 2 février 1852 est modifié ainsi qu'il suit :
   " Le recensement général des votes se fait pour toute circonscription électorale au chef-lieu du département en séance publique, au plus tard le vendredi qui suit le scrutin.
   Il est opéré par une commission composée du président du tribunal civil, président, et des quatre membres du conseil général non candidats, qui y compteront la plus longue durée de fonctions ; en cas de durée égale, le plus âgé se trouvera désigné.
   Si le président du tribunal civil se trouve empêché, il est remplacé par le vice-président et à son défaut, par le juge le plus ancien. Les conseillers sont eux-mêmes en cas d'empêchement remplacés suivant l'ordre d'ancienneté.
   L'opération du recensement est constatée par un procès-verbal.
   En cas de renouvellement intégral de la Chambre des députés, il sera constituée autant de commissions que le département aura de fois cinq députés, ou fractions de cinq députés à élire.
   Ces commissions seront composées et présidées suivant les prescriptions ci-dessus édictées ; à défaut de conseillers généraux en nombre suffisant, elles seront complétées par des membres des conseils d'arrondissement du département désignés dans les mêmes conditions. Les dossiers seront répartis entre elles par voie de tirage au sort.
   Le tirage au sort aura lieu en séance publique toutes les commissions réunies.
   Un arrêté préfectoral publié au moins cinq jours avant l'ouverture du scrutin fera connaître les lieu, jour, heure, de réunion des commissions.
   Les décisions des commissions ne seront valables que si elles sont rendues par trois commissaires au moins.

Article 12 . En dehors des cas spécialement prévus par les dispositions des lois et décrets actuellement en vigueur, quiconque, soit dans une commission administrative ou municipale, soit dans un bureau de vote ou dans les bureaux des mairies, des préfectures ou sous-préfectures, avant, pendant ou après le scrutin, aura, par inobservation volontaire de la loi ou des arrêtés préfectoraux, ou par tous autres actes frauduleux, violé ou tenté de violer le secret du vote, porté atteinte ou tenté de porter atteinte à sa sincérité, empêché ou tenté d'empêcher des opérations du scrutin, ou qui en aura changé ou tenté de changer le résultat sera puni d'une amende de cent francs à cinq cents francs (10 fr. à 500 fr.) et d'un emprisonnement d'un mois à un an ou de l'une de ces deux peines seulement.
   Le délinquant pourra, en outre, être privé de ses droits civiques pendant deux ans au moins et cinq ans au plus.
   Si le coupable est fonctionnaire de l'ordre administratif ou judiciaire, agent ou préposé du Gouvernement ou d'une administration publique, ou chargé d'un ministère de service public, la peine sera portée au double.
   L'article 463 du Code pénal est applicable aux dispositions ci-dessus.

Article 13 . Les dispositions de l'article 50 du décret organique du 2 février 1852 sont applicables à l'action publique et à l'action civile intentées en vertu de la présente loi.

Article 14 . Les articles 479 à 503 du Code d'instruction criminelle seront désormais inapplicables aux crimes et aux délits, ou à leurs tentatives qui auront été commis dans le but de favoriser ou de combattre une candidature de quelques nature que ce soit.

Article 15 . Les dispositions des lois et décrets antérieurs sont abrogés en ce qu'elles ont de contraire à la présente loi.

Article 16 . La présente loi est applicable à l'Algérie. Les frais prévus à l'article 7 seront à la charge du budget algérien.
   Des règlements d'administration publique détermineront les conditions d'application de la présente loi dans les colonies représentées au Parlement ; les frais prévus à l'article 7 seront à la charge des budgets locaux de ces colonies.

Article 17 . Des affiches contenant le texte de la présente loi seront fournies par l'administration préfectorale et placardée, par les soins de la municipalité, à la porte de chaque mairie, pendant la période électorale, et à la porte de chaque section de vote le jour du scrutin.

Article 18 . La présente loi sera applicable loi sera applicable trois mois après sa promulgation.