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                                 Ordonnance du Roi sur la formation des Majorats, 25 août 1817

 

Ordonnance du Roi
sur la formation des Majorats
à instituer par les Pairs,
25 août 1817.




par Marc Nadaux







Suivant les principes définis par la Charte de 1814, la Restauration est une monarchie parlementaire suivant le modèle anglais. Son Parlement est composé de deux chambres, mais, suivant les vœux du roi Louis XVIII, la Chambre des Pairs, cette chambre haute, équivalente à la Chambre des Lords d'outre-Manche, doit devenir le principal soutien du régime. Y siègent les grands représentants de l'aristocratie française. Ainsi, l'ordonnance du 19 août 1815 institue l'hérédité de la pairie. Cependant, peu de représentants des grandes familles de la noblesse française peuvent se targuer de rivaliser au moment du décompte de leurs biens avec les Lords anglais. Ces fortunes de plus sont désormais fragilisées et menacées d'éclatement par les nouvelles dispositions du Code civil, qui impose le partage des successions entre les différents ayants-droits. Aussi la Restauration prolonge l'institution du majorat, issu de l'Empire et d'une loi du 1er mars 1808. Celui-ci, érigé par lettre-patente émanant de la chancellerie royale, est un ensemble de biens fonciers ou de rentes immobilisées inaliénables, indispensable pour rendre un titre transmissible à la descendance.








ORDONNANCE DU ROI
SUR LA FORMATION DES MAJORATS
A INSTITUER PAR LES PAIRS




A Paris, le 25 août 1817


LOUIS, par la grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre, à tous ceux qui ces présentes verront, SALUT.


   Suivant l'article 896 du Code civil, les biens libres formant la dotation d'un titre héréditaire que nous aurions érigé en faveur d'un chef de famille, peuvent être transmis héréditairement. Il nous appartient, soit pour concourir à l'éclat du trône, d'autoriser un chef de famille à substituer ses biens libres pour former la dotation d'un titre héréditaire que nous aurions hérigé en sa faveur, et la transmissibilité de ces biens et de son titre à son fils né ou à naître, et à ses descendants en ligne directe de mâle en mâle par ordre de primogéniture. Prenant ces dispositions en considération, et les rapprochants de celles de la Charte constitutionnelle relatives à l'érection d'une Chambre des Pairs, et de notre ordonnance du 19 août 1815, nous avons reconnu que l'institution de la pairie héréditaire rendait nécessaire l'établissement des majorats autorisés par les lois du royaume dans les familles honorées de cette dignité, afin d'assurer à perpétuité à ceux qui seront successivement revêtus de la pairie, les moyens de la soutenir convenablement, comme il appartient aux membres du premier corps de l'Etat.


   A CES CAUSES, nous avons résolu de n'appeler dorénavant à la dignité de pair de France que ceux qui auront préalablement institué dans leur famille un majorat qui puisse devenir la dotation héréditaire de leur titre, ne doutant pas d'ailleurs que les pairs actuels ne s'empressent, ainsi que nous les y invitons, pour le plus grand avantage de l'Etat, de la pairie et de notre service, à former de semblables majorats, toutes les fois que la disponibilité et la situation de leurs biens le comporteront.


   En conséquence, vu l'article 896 du Code civil et notre ordonnance du 19 août 1815,


   NOUS AVONS DECLARE ET DECLARONS, ORDONNE ET ORDONNONS ce qui suit :


ARTICLE 1er . A l'avenir, nul ne sera par nous appelé à la Chambre des Pairs, les ecclésiastiques exceptés, s'il n'a, préalablement à la nomination, obtenu de notre grâce l'autorisation de former un majorat, et s'il n'a institué ce majorat.

ARTICLE 2 . Il y aura trois classes de majorats de pairs : ceux attachés au titre de duc, lesquels ne pourront être composés de biens produisant moins de trente mille francs de revenu net ; ceux attachés au titre de marquis et de comte, qui ne pourront s'élever à moins de vingt mille francs de revenu net ; et ceux attachés au titre de vicomte et de baron, lesquels ne pourront s'élever à moins de dix mille francs de revenu net..

ARTICLE 3 . Les majorats de pairs seront transmissibles à perpétuité, avec le titre de pairie, au fils aîné, né ou à naître, du fondateur du majorat, et de la descendance naturelle et légitime de celui-ci de mâle en mâle et par ordre de primogéniture, de telle sorte que le majorat et la pairie soient toujours réunis sur la même tête.

ARTICLE 4 . Il ne pourra entrer dans la formation des majorats de pairs que des immeubles libres de tous privilèges et hypothèques, et non grevés de restitutions en vertu des articles 1048 et 1049 du Code civil, et des rentes sur l'Etat, après toutefois qu'elles auront été immobilisées.

ARTICLE 5 . Les effets de la création des majorats des pairs relativement aux biens qui les composent, les formes nécesaire pour l'autorisation nécessaire pour l'aliénation de ces biens et remploi de leur prix, seront et demeureront réglés conformément aux dispositions des lois et règlements actuellement en vigueur sur la matière des majorats.

ARTICLE 6 . Toute personne qui voudra former un majorat, adressera, à cet effet, une requête à notre garde des sceaux de France.
   L'affaire sera suivie et les justifications nécessaires auront lieu dans les formes et de la manière prescrite par les lois et réglemens précités.

ARTICLE 7 . Les actes de constitution de majorat seront, par les ordres de notre chancelier de France, président de la Chambre des Pairs, sur la présentation de l'instituant et sur la surveillance du grand référendaire, transcrits sur un registre qui sera tenu à cet effet et déposé dans les archives de la Chambre des Pairs.

ARTICLE 8 . Les droits d'enregistrement et de transcription seront perçus d'après les bases établies par le décret du 24 juin 1808.

ARTICLE 9 . Les membres actuels de la Chambre des Pairs qui désireront instituer un majorat dans leur famille, ainsi que nous les y invitons, procéderont à cette institution en se conformant aux règles prescrites par la présente ordonnance.

ARTICLE 10 . En ce cas seulement, le majorat de chaque titre de pairie pourra être formé successivement et par parties, par les divers titulaires qui se succéderont audit titre, jusqu'à ce qu'il ait été élevé au minimum fixé par la présente ordonnance pour la classe à laquelle il appartiendra.

ARTICLE 11 . Notre président du Conseil des ministres, et notre garde des sceaux, ministre secrétaire d'état de la justice, sont chargés de l'exécution de la présente ordonnance.


   Donné à Paris, au château des Tuileries, le 25e jour du mois d'Août de l'an de grâce 1817, et de notre règne le vingt-troisième.

 

Signé LOUIS.

 
Par le Roi.

Le Ministre Secrétaire d'Etat au département des Affaires étrangères,
Président du Conseil des ministres,

Signé RICHELIEU.