La lettre d'infos


A voir et à lire
sur
19e.org,
et ailleurs.

S'abonner à la lettre d'infos
 

 L'actualité
sur 19e.org

 
 

 A voir sur le Web

     Vous êtes ici :   Accueil   Documents   Police et justice                                                         Contact
               Arrêté de police générale du Préfet du département de la Seine inférieure, 20 janvier 1817

 

Arrêté de police générale
du Préfet du département de la Seine inférieure,
20 janvier 1817.



par Marc Nadaux


 





Il s'agit pour le Préfet du département de donner aux Maires des communes les moyens d'officier. Depuis les lois de 1791 et du 10 vendémiaire an IV, ces derniers sont responsables  des troubles qui pourraient se produire sur leur territoire. Ils peuvent faire appel à la Garde nationale dont le recrutement, devant la nécessité d'assurer soi-même son équipement, ne concerne que peu les franges inférieures de la population. Quant aux cavaliers, ce sont bien entendu les propriétaire terriens qui en fourniront les effectifs. Dans un soucis de maintien de l'ordre, cet arrêté prend soin de mentionner le cas particulier des voyageurs de quelques natures qu'il soit, mendiants et vagabonds aussi bien que représentants de commerce. 








Nous, Comte de Kergariou, 
préfet de la Seine-Inférieure, 
officier de l'ordre royal de la Légion d'Honneur.


Considérant que des attroupements séditieux ont eu lieu dans diverses communes du département et tendent à arrêter la circulation des grains;
Que des bandes de mendiants se répandent de nuit dans les campagnes, et y jettent l'effroi en mettant les cultivateurs à contribution ;
Que la malveillance, profitant de la cherté des subsistances pour exciter des troubles et porter le peuple à des désordres, il importe de prendre des mesures promptes et énergiques pour déjouer ses coupables manœuvres ;

Vu le code pénal ;
Vu la loi du 2 octobre 1795 (10 vendémiaire an IV) sur la police intérieure des communes ;
Les dispositions de la loi du 17 avril 1798 (28 germinal an VI) relative aux émeutes populaires et attroupements séditieux ;
L'arrêté du gouvernement du 2 mai 1799 (13 floréal an VII) et l'ordonnance du Roi du 27 décembre 1815 qui déterminent les cas où la Garde nationale doit un service extraordinaire, ainsi que la nature de ce service ;
Vu enfin l'urgence et l'empire des circonstances ,

Après nous être concerté avec les diverses Autorités et avec l'Inspecteur des gardes nationales,



Avons arrêté et arrêtons ce qui suit :



Police intérieure des Communes.

I. A la réception du présent, les Maires et Adjoints procéderont au recensement des habitants de leurs Communes.

II. Dans les Communes où le Tableau qui a dû être dressé en exécution de la loi du 2 octobre 1795 (10 vendémiaire an IV) et de l'arrêté de notre prédécesseur du 7 mars 1808 (inséré au n° 19, Tome XV de la correspondance administrative) n'existait pas, il sera formé sur le champ.

III. Les Maires ou Adjoints qui négligeront de procéder au recensement ou à la formation du tableau dont il s'agit, demeureront personnellement responsables des dommages et intérêts résultant des délits commis à force ouverte ou violence sur le territoire de leur commune.

IV. Il sera procédé contre les étrangers à la Commune ou contre ceux qui n'y ont pas acquis domicile depuis un an, ainsi qu'il est prescrit par les art. 4, 6, 7 et 8 de l'arrêté du 7 mars 1808.

V. Tous aubergistes, hôteliers et logeurs sont tenus d'inscrire sur un registre timbré et paraphé par le Maire, l'Adjoint ou un commissaire de police, les noms, prénoms, âge, lieu de naissance, domicile ainsi que la date d'entrée et de sortie de ceux qui coucheront chez eux, même une seule nuit. Les contrevenants seront traduits devant les tribunaux ; leurs établissements pourront être fermés par mesure de police.

VI. Les propriétaires, cultivateurs, manufacturiers, les artisans, et généralement toutes autres personnes ne pourront, sous les peines prononcées par la loi recevoir chez eux sous quelque prétexte que ce soit, un individu étranger à la commune, s'il ne présente un passeport en règle ou l'extrait certifié par le maire de la déclaration qu'il aura faite sur le registre de la municipalité.


Voyageurs, passeports

VII. Nul maître de poste, nul entrepreneur de diligences et de voitures publiques, nul voiturier ou charretier, nul maître de barque ou coche d'eau, ne pourra conduire un voyageur s'il n'est porteur d'un passeport en forme.

VIII. Les maîtres de poste, propriétaires, entrepreneurs, directeurs et conducteurs de diligences, coches d'eau et autres voitures publiques seront tenus de remettre tous les jours au maire la liste des voyageurs qu'ils auront conduits. Ces listes seront adressées aux sous-préfets qui en feront l'envoi au préfet.


Mendiants et vagabonds

IX. Tout individu domicilié dans le département de la Seine-Inférieure qui sera trouvé mendiant hors de son domicile sera arrêté et livré aux tribunaux conformément à l'article 274 du code pénal. Les mendiants étrangers au département seront considérés comme vagabonds et punis comme tels.


Attroupements séditieux

X. Les bandes de nuit et les attroupements séditieux seront réprimés par la force.

XI. Les individus faisant partie d'une bande de nuit ou d'un attroupement qui seront saisis, armés ou non armés, sur le lieu du rassemblement seront livrés à la cour prévôtale.

XII. Les individus autres que ceux qui auront dirigé la sédition qui se retireront au premier avertissement des autorités civiles ou militaires sans opposer de résistance et sans armes seront placés sous la surveillance de l'autorité locale. Les armes qui se trouveront à leur domicile seront enlevées et déposées à la préfecture et à la sous-préfecture de leur arrondissement; ils ne pourront sortir de leur commune sans une autorisation spéciale du préfet ou du sous-préfet et seront tenus de se présenter devant le maire lorsqu'ils en seront requis.
   Cependant, si dans le nombre il en est qui aient déjà été mis en surveillance ou qui aient été repris de justice, ils seront arrêtés et traduits devant les tribunaux.

XII. Tout citoyen ayant connaissance qu'il se forme des projets de rassemblement ou des complots contre l'ordre et la tranquillité publique doit en donner avis sur lé champ aux autorités sous peine d'être poursuivi comme complice. Il doit aussi désigner les principaux instigateurs des révoltes et séditions qui pourraient avoir lieu dans les halles et marchés.


Responsabilité des communes

XIV. Chaque commune est responsable conformément à la loi du 12 octobre 1795 (10 vendémiaire an IX) des délits commis à force ouverte ou par violence sur son territoire par des attroupements armés ou non armés, et sera tenue à la restitution des objets pillés ou enlevés de force, ou d'en payer le prix double de leur valeur. Les maires et adjoints doivent, dans les vingt-quatre heures constater sommairement le délit, en décrire les circonstances, et en adresser procès-verbal sous trois jours au plus tard, au procureur du roi près le tribunal civil. Un double du procès verbal sera envoyé au préfet.


Armes et effets militaires qui sont chez des particuliers

XV. Les individus non compris dans la garde nationale et qui seraient détenteurs d'armes et d'effets militaires tels qu'habits, shakos, etc. seront tenus d'en faire le dépôt à la mairie de leur commune sous trois jours à compter de la publication du présent ; passé ce délai, if sera fait des perquisitions, et les délinquants seront poursuivis conformément à l'ordonnance du 24 juillet dernier et à notre circulaire du 8 décembre 1815.


Service de la garde nationale à pied et à cheval

XVI. Pour donner aux maires tous moyens de dissiper les rassemblements et de maintenir l'ordre, ils sont autorisés à mettre sur le champ la garde nationale en état de réquisition permanente, et à l'employer à faire des patrouilles de jour et de nuit pour assurer la circulation des grains, la police des marchés et arrêter les malveillants et rôdeurs de nuit.

XVII. Les citoyens qui ont été désignés par les conseils de recensement pour faire partie des brigades de cavalerie de chaque canton seront tenus de se monter, de s'équiper, de s'armer et de se rendre sans délai au chef-lieu du canton dans lesquels ils résident sur l'ordre qui leur en sera donné par le maire de leur commune d'après la réquisition du sous-préfet. Ils seront à la disposition de ce magistrat, qui les fera diriger sur les points de son arrondissement où l'ordre serait troublé. Les hommes de bonne volonté qui peuvent se monter, s'équiper et s'armer doivent également se rendre au chef-lieu de leur canton pour renforcer les brigades. Les officiers et sous-officiers de la garde nationale à cheval seront nommés provisoirement par les sous-préfets de concert avec les commandants d'arrondissement.

XVIII. La garde nationale à pied de chaque commune devra se porter dans les autres communes du canton si elle en est requise par le sous-préfet ; elle sera tenue, ainsi que la garde à cheval, de se porter au besoin dans tout l'arrondissement.

XIX. La garde à pied sera sous les ordres de l'officier le plus élevé en grade lorsqu'elle sera employée pour le service du canton.

XX. La garde nationale restera en service extraordinaire tant que les circonstances l'exigeront; ce service sera dirigé par le commandant de l'arrondissement et ne cessera que sur ordre du préfet ou du sous-préfet.

XXI. Les gardes nationaux qui n'obtempéreraient pas aux réquisitions qui leur seraient données et ne justifieraient pas de l'impossibilité de le faire, seront traduits devant les conseils de discipline qui prononceront sur les cas de leur ressort ou dénoncés aux tribunaux pour être condamnés aux peines portées par la loi du 3 août 1791.

XXII. Dans les lieux où il existe de la gendarmerie, le commandant de la garde nationale et celui de la gendarmerie se concerteront pour porter leurs forces sur les points où elles seraient le plus utiles.


Emplois de la force des armes pour dissiper les attroupements

XXIII. La force ne devant être déployée qu'à la dernière extrémité, le sous-préfet ou le maire doit se rendre sur le lieu du rassemblement et user de toute son influence pour déterminer les séditieux à rentrer dans le devoir ; en cas de résistance, il leur fera, par trois fois et à haute voix la sommation suivante "Obéissance à la loi, on va faire usage de la force, que les bons citoyens se retirent ".
   Si les personnes attroupées ne se retirent pas paisiblement, la force des armes doit être à l'instant déployée contre les séditieux sans aucune responsabilité des événements. Ceux qu'on pourra saisir seront déférés à la Cour prévôtale.


Dispositions générales

XXIV. Les préposés aux douanes ainsi que les gardes forestiers, les gardes champêtres seront tenus de concourir au maintien de la paix publique toutes les fois qu'ils en seront requis par les autorités locales.

XXV. MM. les sous-préfets et maires sont autorisés à faire des réquisitions de voitures et de chevaux pour accélérer au besoin la marche de la force armée. Ils assureront sa subsistance, soit par des distributions, s'il est possible, soit en faisant placer des hommes chez les habitants les plus aisés. Au moyen des bons officiers commandants, il sera formé par les soins des maires, faisant fonctions de commissaires des guerres, des états totaux de subsistance dont les communes devront être indemnisées.

XXVI. MM. les sous-préfets et maires doivent mettre dans toutes leurs mesures prudence et fermeté. Ils emploieront tous leurs moyens pour maintenir la libre circulation et la vente des grains au prix du cours et de gré à gré, assurer des secours aux indigents et tenir partout une force imposante à leur disposition. Tels sont les moyens de rétablir promptement l'ordre et de prévenir de nouveaux troubles : ils auront soin d'informer exactement l'autorité supérieure.

XXVII. MM. l'Inspecteur des gardes nationales du département, les sous-préfets, commandants d'arrondissement, commissaire général de police, maires-adjoints, juges de paix, commissaires de police, officiers de la garde nationale et de la gendarmerie sont chargés de veiller et concourir, chacun en ce qui le concerne, à l'exécution du présent arrêté qui sera inséré dans notre correspondance avec les autorités administratives, adressé aux principaux fonctionnaires et sera affiché dans toutes les communes du département.
   Il en sera adressé une expédition à leurs excellences les ministres de l'Intérieur et de la Police générale.



A Rouen, en l'hôtel de la préfecture le 20 janvier 1817.