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Léon SAY 

(Paris, 6 juin 1826 - Paris, 21 avril 1896)


Français.

Economiste.



par Marc Nadaux


 

     Quelques dates :

1868,
nommé président de la Société des "  Houillères de Decazeville ".
1871, élu député.
         prend la tête de la direction du Journal des Débats.
1872,
devient le vice-président de la Société d’économie politique.
         nommé ministre des Finances.
1873, chef de file du groupe Centre gauche à l’Assemblée.

1874, entrée
à l'Académie des Sciences morales et politiques.
1877, participe au " Manifeste des 363 ", les Républicains qui se liguent contre le président Mac-Mahon.
1879, accusé de graves malversations financières.
1880, à la présidence du Sénat.
1886, élu à l'Académie française.

 






Léon Say naît à Paris le 6 juin 1826. Sa mère, née Geneviève Bertin, lui assure une ascendance bourgeoise, faite de la fortune de la maison de commerce Chevreux, une entrée dans le monde de la haute finance. Issu d’une famille protestante originaire de Suisse, son grand-père paternel, l’économiste Jean-Baptiste Say, est le célèbre auteur d’un traité d’économie politique publié en 1803. Ses convictions libérales se transmettent à son fils, Horace, élu conseiller général de la Seine en 1846, puis siégeant au Conseil d’Etat trois années durant, de 1848 à 1851. Après des études au Collège Bourbon et à la Faculté de Droit, Léon lui-même s’initie à l’idéologie libérale dans les salons familiaux de l’hôtel Say, rue Boursault, ou de la conférence Molé, un de ces cercles d’éloquence et de formation politique placé sous la présidence d’Ernest Picard et qui fleurit sous le Second Empire. Dans les dernières années du règne de l’empereur Napoléon III, Léon Say fréquente également les tribunes du Corps législatif, à l’affût des discours d’Adolphe Thiers, de Jules Favre…

En 1868, Léon Say est nommé président de la Société nouvelle des houillères et fonderies de l’Aveyron, autrement dit les "  Houillères de Decazeville ". Il joindra toujours ces responsabilités au sein des grands groupes industriels à sa carrière politique. Celle-ci commence au moment où Léon Say se rapproche des députés républicains, Jules Ferry notamment, à qui il apporte son aide dans la rédaction de ses articles publiés dans le quotidien Le Temps. Ceux-ci dénoncent la gestion du préfet de la Seine, le baron Haussmann, et sont en 1868 réunis en volumes sous le titre des Comptes fantastiques d’Haussmann. L’année suivante, il fait son entrée en politique, sous la bannière de l’Union libérale, et entame une campagne hostile au pouvoir en place dans la troisième circonscription de Seine-et-Oise. Ce premier échec l’encourage à persévérer et à être élu conseiller général du canton de l’Ile-Adam. Il se range alors aux côtés d’Emile Ollivier, qui forme un  gouvernement de centre-droit ; celui-ci signifiant une ouverture vers la  parlementarisation du régime. Au cours de ces années cependant, les élus libéraux, formant un clan d’irréductibles opposants à l’Empire se groupent autour d’Adolphe Thiers et se rapprochent des républicains. Ils formeront le Centre-gauche des débuts de la Troisième République.

Au mois de décembre 1872, Léon Say devient le vice-président de la très courue Société d’économie politique, fondée en 1842 et qui regroupe les grands noms de la finances du moment, tels Henri Germain, Michel Chevalier… Elu député en 1871, il prend la tête de la direction du Journal des Débats, propriété de sa famille, imposant l’année suivante à l’influente feuille orléaniste un changement de ligne éditoriale, autrement dit le ralliement à la République. Léon Say apporte un soutien politique et financier à d’autres journaux, provinciaux cette fois-ci, diffusés dans le département de la Seine-et-Oise en particulier, comme l’hebdomadaire Seine-et-Oise illustré lancé en 1886, l’Union libérale et démocratique de Seine-et-Oise fondée en 1868… Ceux-ci sont le soutien de ses campagnes électorales qui le mènent au mandat de sénateur, le 30 janvier 1876, celui-ci étant reconduit jusqu’au 22 septembre 1889. Ajoutons que l’homme politique multiplie également les contributions de circonstance à La Revue des Deux Mondes, au Monde politique… 

Ce grand bourgeois, cet homme d’influence occupe les lieux de la sociabilité associative. Membre de la Caisse d’escompte des associations populaires, de crédit, de consommation, de production, de l’Union d’assistance du 16ème arrondissement de Paris, de la Ligue pour le repos le dimanche, de la Société de statistique de Paris, de la Société d’horticulture… Léon Say multiplie ainsi les réseaux de relation, y compris au moment où il accède aux honneurs. Sa nomination à l'Académie des Sciences morales et politiques en 1874 est suivi, le 11 février 1886, par son entrée sous la Coupole. L’économiste est l’auteur en effet, en parallèle avec ses nombreux engagements dans son siècle, de quelques ouvrages de référence. De 1883 à 1889, il dirige la publication d’un monumental Dictionnaire des finances, puis d’un Nouveau Dictionnaire d’économie politique, de 1889 à 1892. Cette stature intellectuelle, lui qui n’est pas issu de l’Université, lui vaut d’ailleurs d’être présent lors de la fondation d’une Ecole des Hautes études commerciales à Paris, inaugurée le 4 décembre 1881, de devenir membre également du conseil de perfectionnement de l’Ecole libre des Sciences politiques.



Au lendemain de la chute du Second Empire, le 7 juin 1871, Léon Say est nommé préfet de la Seine. Spécialiste des questions parisiennes et bénéficiant du soutien de la haute banque – son amitié avec le baron de Rothschild est déjà ancienne à l’époque - , il est l’homme de la circonstance. La ville doit en effet faire face aux échéances des emprunts effectués pour couvrir les exigences prussiennes, pour assurer la reconstruction de la capitale, meurtrie par les bombardements ennemis et portant encore les stigmates de la Semaine sanglante. Le 7 décembre 1872, Léon Say est nommé ministre des Finances dans le cabinet Thiers, ceci est l’aboutissement de ses choix politiques, le ralliement du Centre gauche à la personne d’Adolphe Thiers, "  chef du pouvoir exécutif " de la République. La première mission qui lui incombe est, suivant les vœux du chef du gouvernement, de verser au plus vite les cinq milliards de Francs-or exigés par l’Empire allemand dans le Traité de Francfort, prix de la libération du territoire. La chute d’Adolphe Thiers entraîne celle de son ministre, qui devient, à partir du 18 juin 1873, le chef de file du groupe Centre gauche à l’Assemblée. Le 28 octobre suivant, dans les colonnes du journal de Léon Gambetta, La République française, Léon Say se prononce ouvertement pour le régime républicain, "  une République définitive, conservatrice, libérale ".

Le 10 mars 1875, il retrouve un portefeuille ministériel à la demande du maréchal de Mac-Mahon, le président de la République lui-même, dans le cabinet formé par le Centre droit Louis Buffet. Une ligne de fracture oppose cependant les deux hommes, les deux courants de pensée qu’ils représentent autour de la nature du régime, après le vote des lois constitutionnelles. Le 30 janvier 1876, Léon Say est élu par les collèges de notables de Seine-et-Oise au Sénat, une chambre haute qu’il ne quittera que treize années plus tard. Le 9 mars de la même année, il est reconduit dans ses fonctions de ministre par Armand Dufaure, puis au mois de décembre par Jules Simon. Evincé après le coup d’Etat présidentiel du 16 mai 1877, il est du " Manifeste des 363 ", les Républicains qui se liguent contre le président Mac-Mahon, d’un Comité électoral des gauches. A la fin de l’année, le 13 décembre, encore sous la présidence d’Armand Dufaure, Léon Say se voit confier le portefeuille des finances. Il accepte, malgré ses convictions libérales, de participer à l’aventure du plan Freycinet de construction de lignes ferroviaires. A cette occasion, le vice-président de la Compagnie des Chemins de fer du Nord obtient la promesse du chef de file des Républicains, Léon Gambetta, qu’il n’est pas question dans un avenir proche de nationaliser l’ensemble du réseau.

Avec l’élection à la présidence de Jules Grévy et donc le triomphe des Républicains, après les succès obtenus aux élections législatives et sénatoriales, le ministre des Finances demeure une fois de plus à son poste dans le cabinet formé par William Waddington, un nouveau mandat qui commence le 4 février et s’achève le 28 décembre 1879. Au cours de cette période, Léon Say est accusé de graves malversations financières. Le ministre se refuse en effet à confirmer ou à infirmer la rumeur insistante d’une conversion des rentes à 5 % souscrites lors des grands emprunts de libération en une rente d’un intérêt moins élevé pour les souscripteurs, mais moins coûteux pour l’Etat. Par son silence persistant en effet, Léon Say favorise la baisse des titres, une aubaine pour les gros investisseurs, la banque Rothschild en tête, qui s’emparent des titres. Le 27 février, celle-ci est d’ailleurs prévenue par le ministre des finances, avec l’intermédiaire de Ferdinand Moreau, syndic des agents de change de la Seine, de la " non-conversion " des rentes. C’est un " délit d’initiés " et Léon Say n’échappe aux poursuites pénales qu’avec le soutien coupable d’une majorité des députés.

L’année suivante, il est nommé ambassadeur à Londres avec la charge de renégocier le traité de libre-échange de 1860, avant de briguer la présidence du Sénat. Léon Say occupe ce siége du 25 mai 1880 au 30 janvier 1882, année où l’économiste est rappelé une dernière fois aux affaires, dans l’éphémère second cabinet Freycinet. Au Sénat dans les années qui suivent, puis de nouveau à la Chambre des députés en 1889, Léon Say adopte une attitude conservatrice sur la question de la création des caisses de retraite en 1884, des syndicats en 1892, les accidents du travail l’année suivante… qui s’apparente à une défense des intérêts du patronat. Devant l’avancée de la gauche socialiste, il est encore de la fondation de l’Union libérale en 1896, autour d’Henri Barboux, qui rassemble les fondateurs de la République et les vieux piliers du Centre-gauche. La même année, dans les colonnes de son Journal des Débats, Léon Say publie les 24 et 28 février, le 2 mars 1896 trois articles intitulés " Liberté ", " Egalité " et " Fraternité ", un rappel de son credo républicain, de ces " principes de 1789 qui vont selon lui disparaître sous la pression des radicaux socialistes ".



Léon Say décède le 21 avril 1896 à Paris.