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La société de tir d’Albepierre " La Montagnarde " |
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La société de
tir d’Albepierre
" La Montagnarde " (Cantal).
par
Jean-Louis Philippart
1.
L’origine
des sociétés de tir.
2.
Le
but des sociétés de tir.
3.
Les
sociétés de tir du Cantal avant 1914.
4.
La
société de tir d’Albepierre.
5.
Les
armes et munitions.
6. Les
concours.
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1. L’origine
des sociétés de tir
Les
sociétés de tir, dont quelques unes existaient avant 1870, trouvent
pour l’essentiel leur origine après le conflit contre la Prusse et le
traumatisme de la défaite de 1870. Les sociétés civiles étaient
autorisées, à la condition de n'avoir eu aucune compromission politique
antérieurement, mais un décret de 1878 du ministère de la Guerre
favorisant des sociétés mixtes mit un coup d'arrêt aux sociétés
civiles de tir.
Les sociétés mixtes étaient composées de civils, de militaires, de réservistes
et de pupilles âgés de 17 à 21 ans ; elles étaient constituées
au sein de régiments qui fournissaient les stands, les armes
et les munitions. A partir d’octobre 1885, les statuts des sociétés
mixtes de tir durent être soumis à la fois à l’approbation du
ministre de la Guerre et à celle du préfet (1).
Entre
1880 et 1914, les sociétés de tir constituèrent un phénomène
particulier, " une passion nationale ". Les sociétés de
gymnastique, les écoles normales d'instituteurs organisaient des séances
de tir, les amicales laïques comme les patronages catholiques faisaient
du tir leurs raisons de société.
L’esprit de défense de la nation habitait aussi bien la droite
que la gauche. Le patriotisme était partagé, mais les instituteurs qui
étaient chargés de mettre en place un nouvel enseignement primaire voulu
par les lois de janvier et mars 1882 et avaient le désir d’une " refonte
de l’esprit national " (2), eurent un rôle déterminant au
sein de leurs classes et à l’extérieur, par l’organisation
d’activités paramilitaires. D’ailleurs la loi du 28 mars 1882
rendait l'instruction primaire obligatoire pour tous les enfants de six à
treize ans et mettait la gymnastique et le tir au nombre des matières
d'enseignement des écoles primaires publiques de garçons. Beaucoup
d’instituteurs enseignèrent donc le tir à l’école avant l’acte de
naissance officiel des "sociétés de tir scolaires" en 1907.
Après la réduction de 3 à 2 ans du service militaire obligatoire, les
instructions du ministère de l’Instruction Publique de mars et avril
1907 créèrent des sociétés
de tir scolaires dans tous les établissements publics du pays à
commencer par les Écoles Normales qui fournissaient chaque années des
"hussards noirs" à la république. Le ministre de
l’instruction, Aristide Briand, estimait : " au moment où la réduction
du service militaire exige plus que jamais, des jeunes soldats, des
aptitudes et des qualités d'adresse préalablement acquises, il est de
l'intérêt du pays que se multiplient les sociétés scolaires et
postscolaires de tir à courte distance (...) mais aussi à
l'arme de guerre, qui sera donnée par les soins de l'autorité militaire
locale, dans toutes les E.N. dont le siège est une ville possédant une
garnison " (3).
Un
an et demi après les textes créant les sociétés scolaires, parut
l’instruction du 7 novembre 1908 du ministère de la Guerre précisant
les conditions de préparation du Brevet d’Aptitude Militaire déjà décidé
en 1903. Dès cet instant, toutes les associations devaient intégrer dans
leur but la préparation à ce B.A.M. Pour les sociétés agréées par le
gouvernement (S.A.G.), des avantages étaient accordés en termes de
subventions, de délivrance gratuite de munitions, de prêt d’armes ou
encore de récompenses, de prix ou de diplômes.
L’agrément d’une société de tir, souvent demandé pour bénéficier
des avantages et récompenses, n’était pas toujours accordé, notamment
aux sociétés d’obédience cléricale estimées réactionnaires. En
1910, les préfets devaient adresser au ministre de l’Intérieur les
renseignements sur le but réel des sociétés, leurs tendances et
son appréciation personnelle. Ainsi, en août 1911, le préfet du
Cantal donna au ministre un avis défavorable sur la société de
tir de Malbo car elle était " inspirée par le
parti réactionnaire de l’endroit et ne tendait rien moins qu’à
obtenir l’agrément ministériel pour concurrencer plus utilement la 1ère
société " (4). Avis défavorable également pour Soulages :
" sentiments cléricaux et réactionnaires du président, fils du
maire ".
2. Le
but des sociétés de tir.
Dans
les deux tiers des intitulés des sociétés " il
n’y avait aucune intention belliciste affichée mais plutôt
l’expression de la conscience de la nécessité de la défense de la
Patrie " (5). C’est le cas par exemple avec la déclaration des
buts de la société d’Albepierre dont nous parlerons un peu plus loin : "
développer le goût du tir, encourager et vulgariser, dans la mesure
du possible, avec l’arme de guerre et en général avec toutes les
armes, les exercices de tir, de manière à former des tireurs habiles,
animés de sentiments patriotiques et de rendre des services au pays ".
Un peu différente est l’opinion du sous-préfet de Mauriac qui
s’exprime sur les sociétés de tir en ces termes : " pour
que l’armée dispose du plus grand nombre de bons tireurs et pour réduire
les charges militaires sans inconvénient pour la défense du pays
et pour que les hommes ayant quitté les drapeaux entretiennent et
perfectionnent leur instruction
"
(6).
Le
but de la société de gymnastique et de tir d’Aurillac, créée en
1886, était ainsi conçu : " le but de la société est
d’entretenir la vigueur du corps pour conserver celle de l’esprit, de
développer les goûts et les sentiments virils par la pratique des
exercices corporels, d’étendre et de perfectionner l’art du tir, de
resserrer entre les membres les liens d’union, de jeter les bases
d’une bonne discipline et de préparer les citoyens à la défense
de la patrie " (7).
Parfois le but est pacifiste et le tir est considéré comme " un
exercice agréable, une distraction " ; c’est ce que
pensent les responsables de la société de tir de Laveissière,
messieurs Viallard et Glaise, " le but exclusif de ces sociétés
ne doit pas être de former d’habiles tireurs, désireux
d’utiliser leur adresse sur les champs de bataille. Certes si la patrie
était attaquée, personne ne devrait hésiter un instant pour voler à sa
défense ; mais les guerres de conquêtes et les guerres causées par
l’ambition et l’amour de la gloire ne trouveraient, au sein de la
Vallagnonne du moins, que des partisans bien peu enthousiastes. La
revanche elle-même, celle dont tout le monde parle, et que personne ne
veut, les membres de la société de tir de Laveissière souhaitent
ardemment qu’elle soit l’œuvre de nos diplomates plutôt que celle de
nos généraux... " (8).
3. Les
sociétés de tir du Cantal avant 1914.
La
première société de tir pour adultes du Cantal, déclarée à la préfecture,
a été fondée à Murat le 25 janvier 1882 avec l’autorisation du
ministre de la Guerre. La société était mixte, dépendante du 100ème régiment
territorial de Murat (9) et comptait 88 membres. En 1891 elle avait 105
membres, dont 21 civils et 84 militaires ; en 1893 elle déclarait
seulement 5 civils et 102 militaires.
Le 3 mars 1900, seulement 6 sociétés de tir étaient reconnues
officiellement par la préfecture du Cantal. Elles se situaient à Murat,
Marcenat, Aurillac, Pierrefort, Le Bourguet, Saint-Urcize (10). En 1914,
note Germain Pouget, on dénombrait 120 sociétés d’adultes ou
scolaires animées par des instituteurs (11). En fait seulement 59 sociétés
de tir, toutes mixtes, étaient régulièrement constituées et autorisées,
en conformité avec l’article 5 de la loi de 1901 relative au contrat
d’association (12).
" Art. 5 : Toute association
qui voudra obtenir la capacité juridique prévue par l’article 6 devra
être rendue publique par le soin de ses fondateurs. La déclaration préalable
en sera faite à la préfecture du département ou à la sous-préfecture
de l’arrondissement où l’association à son siège social. Elle fera
connaître le titre et l’objet de l’association (...) "
"
Art. 6 : Toute association régulièrement déclarée peut, sans
aucune autorisation spéciale, ester en justice, acquérir à titre onéreux,
posséder et administrer, (...) ".
Les
sociétés scolaires (S.S.), composées exclusivement de membres du
corps enseignant et d’élèves, n’étaient pas déclarées à la préfecture
et elles étaient dispensées de l’agrément du ministre de la guerre.
Elles relevaient du ministère de l’Instruction Publique et
fonctionnaient sous le contrôle technique du général commandant la
subdivision.
4. La
société de tir d’Albepierre.
La
société de tir d’Albepierre tira ses premières cartouches en
mars 1897. Elle s’appelait " La Montagnarde " et avait
pour Président fondateur M. Babus, instituteur adjoint à
Albepierre qui avait fait son service militaire et pour trésorier M.
Bertrand Rigal, cultivateur à Albepierre (13). La société était
en réalité une société postscolaire ayant une section de pupilles, par
conséquent d’écoliers remplissant les conditions exigées. Seize mois
après la création de " La Montagnarde ", 28 séances
de tir avaient été organisées pour les adultes et presque autant spécialement
pour les élèves. Le tir se déroulait toujours le dimanche. Le succès
fut immédiat puisqu’en moyenne 50 tireurs adultes participèrent à
chaque séance. En application de la loi de 1901 sur les contrats
d’association, la société d’Albepierre fit une déclaration de
constitution de société à la sous préfecture de Murat le 5 mars 1903
et reçu l’autorisation ministérielle le 11 décembre 1903 (14). Sept
membres formaient le bureau :
1
- Delmon Jérôme, Instituteur à Albepierre, Président
2 - Bénessy Félix, conseiller municipal, Albepierre, vice Président
3
- Besson Alexis, instituteur, Albepierre, directeur du tir.
4
- Faucillon Louis, cultivateur, Albepierre, sous-directeur.
5
- Delort Jean-Pierre, cultivateur, Albepierre, secrétaire.
6
- Rigal Bertrand, cultivateur, Albepierre, trésorier.
7
- Jacomy Léon, cultivateur, Albepierre, trésorier adjoint.
Le
nombre d’adhérents actifs était alors de 70 membres. En 1907, la
société comptait 95 adhérents se répartissant ainsi : armée normale
23 ; réserve 37 ; pupille de 17ans à 21ans: 12 ; civils :
23.
Le 21 mai 1911 la société de tir demanda à la commune deux parcelles de
terrain communal destinées à l’installation d’un stand de tir.
L’une de ces parcelles d’une surface de 30 m2 à
prendre sur le terrain communal appelé " Couder del riou ",
devait être employée pour édifier une construction en maçonnerie
destinée à servir d’abri aux tireurs et à remiser le matériel de
tir. L’autre parcelle d’une surface de 34 m2 à prendre sur
le terrain communal appelé "les Cunes ou les Côtes du
Fargiras", devait servir à placer les cibles et à construire
une fosse pour abriter les pointeurs. Le conseil municipal, considérant
que la société de tir était une œuvre éminemment patriotique,
tout en procurant une agréable destination aux jeunes gens de la commune
et les préparant à devenir de bons soldats, fut d’avis d’abandonner
gratuitement à la société de tir, les terrains qu’elle sollicitait
pour qu’elle soit propriétaire à titre définitif (15).
Pendant la construction du bâtiment du tir, une plaque en pierre de lave
gravée fut scellée dans le mur au dessus de la porte ; elle porte
l’inscription " R.F. " puis, en dessous, en lettres
identiques le nom de la société et le nom du maire de l’époque :
le docteur Georges Rabbe. En dessous encore, sont gravées la
date de construction de l'édifice et la devise : " Pro Patria ".
La distance de 260 mètres entre le pas de tir et les cibles était une
longueur exceptionnelle, même pour le tir au fusil de
guerre. L’axe de tir, orienté 60° ouest, obligeait les tireurs,
installés dans l’abri construit au bord du ruisseau, à tirer légèrement
sur leur côté gauche. Les cibles étaient disposées sur un gros mur, en
arrière de la tranchée où étaient abrités les " pointeurs "
en nombre équivalent au nombre de cibles. Le pointeur affecté à une
cible devait indiquer au tireur après le tir, dans les conditions réglementaires
de sécurité, les points d’impact de ses tirs sur la
cible.
Au devant de la fosse, un mur de pierres de 6 mètres de long, d'un
mètre d'épaisseur, d'une hauteur de 2 mètres, soutenant un talus
de terre, perpendiculaire à l'axe de tir, protégeait les pointeurs dont
le nombre était au maximum de trois. La fosse avait 1,3 mètre de large.
Dans la fosse, trois pierres plates de dimensions 30 x 30 x 30
centimètres semblent avoir été placées en face des cibles. A quoi
servaient-elles ? Permettaient-elles aux pointeurs de mieux voir et
indiquer les points d'impact des tirs ?
Les mesures de sécurité actives pendant les séances de tir, et passives
concernant les installations proprement dites étaient prises sous la
responsabilité exclusive des sociétés de tir. Cependant le
fonctionnement de toutes les sociétés de tir agréées par le
gouvernement (S.A.G.), comme celle d’Albepierre, étaient contrôlées
par un officier de l’armée d’active appartenant à l’un des corps
ou service le plus voisin. Cet officier était chargé de guider les
efforts de la société et de contribuer à l’application des méthodes
ou procédés d’instruction réglementaires dans l’armée. Selon les
instructions du ministère de la guerre, l’officier ainsi accrédité ne
devait pas s’immiscer dans le fonctionnement de la société mais servir
exclusivement de " conseiller technique ". Le tir de
cartouche modèle 1886 M, de calibre 8 mm. pour fusils Lebel, n’était
autorisé qu’à la condition que les champs de tir aient été reconnus
présenter des conditions suffisantes de sécurité.
Les
mesures à prendre pour l’exécution des tirs d’infanterie, stipulées
par les instructions ministérielles de 1903, faisaient appel
au clairon placé auprès du directeur du tir, aux "vedettes",
et aux fanions. La sonnerie du clairon " la
retraite "
signifiait que tout était en place et que le tir commencerait
lorsque le fanion rouge de la fosse de tir serait abaissé. La
sonnerie "
en batterie "
correspondait au début du tir. Si pour une cause quelconque le
personnel de la fosse décidait que le tir devait être interrompu,
il levait son fanion rouge. Lorsque le signal était aperçu par le
directeur du tir, celui-ci faisait arrêter le tir par la
sonnerie " halte
".
Le tir pouvait reprendre, avec la sonnerie " en
batterie
",
lorsque le fanion de la tranchée était abaissé. La sonnerie
" ralliement
"
indiquait la fin définitive du tir.
Lorsqu’un chemin traversait le champ de tir, des personnels appelés
" vedettes " interdisaient l’entrée des populations dans le
champ de tir. Elles étaient informées de la fin définitive des tirs au
moyen de la sonnerie "
la berloque ".
Ces sonneries, recommandées, étaient employées dans l’armée
mais elles pouvaient être remplacées par des coups de cornes. Dès 1898
cependant, la société de tir d’Albepierre sonna du clairon lors de ses
séances de tir grâce au clairon que lui offrit le maire de la
commune Georges Rigal (Le
Nouvelliste de Murat
du 11 juin 1898).
Les
cibles, pour le tir à longue distance avec l’arme de guerre, étaient
formées soit d’un carré de 1,5 mètre de coté ayant un cercle de 1 mètre
de diamètre divisé en dix zones avec, au centre, un visuel noir de 20
centimètres de diamètre, soit d’une silhouette de buste de 45 centimètres
de largeur et 77 centimètres de hauteur, apparaissant et disparaissant en
un même point de la tranchée. Cette cible était divisée en trois
zones.
La société de tir d’Albepierre fonctionna jusqu’à la seconde guerre
mondiale. En 1930, se souvient aujourd’hui Marie Parra de la Molède,
elle " tirait encore ". Un dimanche en allant à la messe
avec son amie Antoinette Aguttes, elle se souvient très bien avoir vu
quatre messieurs mettre une cible à la tranchée de tir. En revenant de
la messe, elle dit à Antoinette : " tu sais on va aller
les regarder à la Molède, dans les prés au dessus du communal mais il
ne faudra pas trop s'approcher ". Là haut, dit-elle, " ça
tirait, ça tirait, ça tirait. On avait bien un peu peur car on entendait
les balles siffler ! ".
En 1948, la société de tir n’ayant plus d’activité, le conseil
municipal donna en location à M. Terrisse, cantonnier à Albepierre,
le bâtiment de tir moyennant une redevance de 500 francs par an. Si
la société de tir avait eu à utiliser cette construction, M. Terrisse
aurait été tenu de l’évacuer dans un délai de un mois après
avertissement par les responsables de la société (17).
5.
Les
armes et munitions.
Les
sociétés de tir ou de gymnastique pouvaient être dotées de trois
types d’armes pour le tir à longue distance (150-200 mètres).
D’abord le célèbre Chassepot de la guerre franco-prussienne,
adopté officiellement en 1866 et d’un calibre de 11 mm. puis, après
1874, le fusil Gras, de 11 mm.également, et enfin le fusil 1886
modifié 1893 de calibre 8 mm., dit " Lebel " du nom de son
inventeur. Cette arme excellente, d’un poids raisonnable (4,180 kg),
avec laquelle les tireurs obtenaient de brillants résultats, pouvait
tirer jusqu'à une douzaine de coups par minute, ce qui représentait un
progrès considérable par rapport aux trois ou quatre coups du Gras.
Pour les élèves, une carabine " La Française " était proposée
par l’Union des sociétés de tir de France, crée en 1886, dont le rôle
était d'organiser des championnats nationaux et scolaires, d'établir des
records et de préparer la jeunesse à l'obtention du certificat
d'aptitude militaire. L’arme, de calibre 6 millimètres, était
prévue pour le tir à 10-12 mètres mais sur demande, la carabine pouvait
être chambrée pour le tir à longue portée (150 à 200 mètres) ;
dans ce cas elle employait une cartouche longue. Les élèves de l’école
d’Albepierre disposaient, eux, d’un fusil système gras, modèle
1874 réduit, d'un calibre également de 6 millimètres.
Les armes de guerre pouvaient être cédées à titre de prêt par le
ministère de la Guerre ou cédées à titre onéreux. Albepierre, par
exemple, fit l’acquisition contre payement d’un fusil pour le
tir à longue portée en décembre 1897, grâce à une souscription
ouverte à cet effet (18). A son début, la société mixte de Murat possédait
trois fusils modèle 1874-85. En 1891, l’Aurillacoise déclarait
neuf fusils Gras, deux fusils Chassepots et quatre revolvers. Marcenat et
Murat possédaient respectivement quatre et six fusils Gras.
Après 1908, les S.A.G. pouvaient disposer du fusil 1886 modèle 93. Ce
fut le cas en juillet 1911 pour la S.A.G. d’Albepierre qui
disposa de fusils Lebel pour son concours annuel (19).
L’instruction d’avril 1892 (20) permettait aux sociétés mixtes de
tir de percevoir à titre de prêt au maximum dix fusils Gras modèle
1874-85 ou 1885 et dix fusils ou mousquetons modèle1874 M 80 et quatre
revolvers. Les fouilles pratiquées dans le talus au devant de la fosse
des pointeurs construite en 1911 par " La Montagnarde " montrent
très clairement que la société de tir d'Albepierre n'avait pas ou
n'avait plus en 1911 de fusils Chassepot ou Gras (ou pas de munitions pour
ces armes), car aucune balle de calibre 11 mm. n'a été retrouvée dans
le talus. En cas de mobilisation, la réintégration des armes devait être
immédiate et sans préavis, cependant il est possible que les armes prêtées
n’aient pas été rendues car en décembre 1914 le ministre de la
Guerre invita les généraux commandants les régions à mettre des armes
et munitions à disposition des sociétés de tir (21).
Les demandes de cartouches, à titre onéreux, devaient être adressées
au général commandant le corps d’armée. La délivrance de munitions
à titre gratuit pouvait être accordée sans dépasser annuellement 30
cartouches par homme. A partir de 1908, il est alloué chaque année
gratuitement 40 cartouches pour les membres militaires et les jeunes gens
âgés au moins de 17 ans, et 20 cartouches pour les civils et les élèves
des sociétés scolaires âgés de 15 à 17 ans.
A l'origine la balle du fusil Lebel (longueur 30,5 mm ; diamètre 8,17
mm.) se composait d'un noyau de plomb durci et d'une enveloppe de
"maillechort" (
invention de Messieurs Maillot et Chorier) : alliage composé à 95
% de plomb et 5 % d'antimoine. Cet alliage était fondu et coulé dans des
moules à balles puis les noyaux étaient comprimés et vérifiés
avant d'être réunis à l'enveloppe. L'enveloppe était formée d'un
alliage à 80 % de cuivre et 20 % de nickel ou bien de cuivre pur. La
balle était très légèrement conique et se terminait par un léger méplat
de 4 mm. qui disparaîtra en 1890 au profit d'un sommet arrondi. Aux
vitesses atteintes par ces projectiles de nombreux incidents de tir furent
constatés par déchirement de l'enveloppe entraînant le " déchemisement
" partiel de la balle. Ces incidents conduisirent à la fabrication
de balles en laiton massif à partir de 1898. Les
fouilles réalisées à Albepierre révèlent en effet que la "
fragilité " des premières balles du
Lebel.
6.
Les
concours.
Des
concours de tir locaux organisés pour les élèves du secondaire et
pour les adultes, drainaient une foule considérable. Moment
d’exaltation patriotique, ce type d’initiative était encouragé par
le gouvernement. Un concours était annuellement organisé à Paris, à
Lyon et dans chaque corps d’armée. Il avait lieu un dimanche et toutes
les S.A.G. pouvaient y participer. Des prix étaient décernés par
le ministère de la guerre dans chaque région à l’issue du concours.
En 1892 un grand concours national de tir, avec le fusil Lebel, eut
lieu à Paris sous la présidence du Ministre de la guerre. A l’occasion
du concours de 1895, le ministre de l’intérieur décerna sept médailles
de bronze, dont trois à la société d’Aurillac et trois à celle de
Marcenat (22).
Les
élèves de l’école d’Albepierre se sont souvent distingués au
championnat annuel des écoles primaires organisé par l’Union des Sociétés
de tir de France, notamment au quatrième championnat de 1899 où
l’école d’Albepierre fut classée neuvième sur 446 participants au
concours (23). Chaque école présentait seulement cinq élèves. Au sixième
championnat de 1901, l’école fut classée trentième sur 862 et
obtint une carabine de tir (24). Au huitième championnat de 1903, grâce
encore à la compétence de M. Babus, l’instituteur de l’école,
les élèves d’Albepierre se classèrent dixièmes sur 747 (25).
Notes
:
1
-
Archives Départementales du Puy de Dôme. R 1983.
2 - Claude
Digeon, La Crise allemande de la Pensée française (1870-1914),
Paris, P.U.F., 1959, pages 365-366.
3 - Pierre
Arnaud, Les Athlètes de la République, Bibliothèque historique
Privat, 1987, page 127.
4 - A.D.C.
(Archives Départementales du Cantal) 59 M 9.
5 - Christian
Estève, A l’Ombre du Pouvoir, page 489.
6 - A.D.C.
59 M 10.
7 - A.D.C.
59 M 9.
8 - Journal
hebdomadaire : Le Nouvelliste de Murat, du 20 février 1904.
9
-
Avant la guerre, le régiment existait surtout sur le papier et comme
tous les régiments territoriaux il était formé d’hommes âgés de
40 à 46 ans. Pendant la première guerre mondiale, il fut, par nécessité,
employé sur le front ; voir Le Nouvelliste de Murat du 11
septembre 1915.
10 - A.D.C.
59 MA (5 à 27).
11 - Germain Pouget, R.H.A.
12 - Chaque
société de tir déclarée avait aussi une section de scolaire, d’où
le chiffre annoncé par G. Pouget.
13 - Le
maire François Rigal offrit en 1898 un clairon à la société de
tir (Le Nouvelliste de Murat du 11 juin 1898).
14 - A.D.C.
59 M 9.
15
-
Délibération du conseil municipal de Bredons du 21 mai 1911.
17 - Délibération
du conseil municipal de Bredons du 23 mai 1948.
18 - Le
Nouvelliste de Murat du 18 décembre 1897.
19 - Le
Nouvelliste de Murat du 23 juillet 1911.
20 - Archives
du Puy de Dôme, série R 1179.
21 - Idem.
22 - A.D.C.
59 M 10.
23 - Le
Nouvelliste de Murat du 19 août 1899.
24 - Le
Nouvelliste de Murat du 19 octobre 1901.
25 -
Le
Nouvelliste de Murat du 25 juillet 1903.
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